Belgiques de Liliane Schraûwen

Belgiques de Liliane Schraûwen

Catégorie(s) : Littérature => Francophone

Critiqué par Débézed, le 31 janvier 2025 (Besançon, Inscrit le 10 février 2008, 77 ans)
La note : 7 étoiles
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La Belgique vue par une fille ayant vécu son enfance en Afrique

C‘est Liliane Schraûwen la romancière, nouvelliste, poétesse, … qui a été choisie pour écrire cet opus de la revue Belgiques qui est traditionnellement réservée à un seul auteur qui doit consacrer ses textes à un seul et même propos : la Belgique sous différentes formes. Liliane a vécu une bonne partie de son enfance en Afrique d’où elle ne revenait que tous les trois ans pour un long séjour de six mois qui lui a permis de connaître une partie de sa patrie natale, notamment le Flandre maritime où elle passait souvent ses vacances estivales. C’est donc à travers son regard d’enfant qu’elle apprend à connaître ce pays qui pour elle n’est pas seulement bipolaire mais plutôt multiethnique grâce à l’installation de plusieurs communautés nouvelles. Pour elle, la querelle des Flamands et des Wallons n’a pas beaucoup de sens, les deux communautés faisant partie de son espace et de sa patrie originale, tous les Belges ont un peu de sang flamand dans les veines.

Elle raconte, à travers un mélange de textes tirés de ses propres expériences et de celles de personnages purement fictifs qui lui ressemblent un peu tout de même, différents coins de la Belgique : Bruxelles (le cimetière de Laeken, le Père Lachaise de Bruxelles, la majestueuse Grand Place, lieu de justice et d’exécution, les Marolles où elle s’est baladée avec des personnages hauts en couleurs, Uccle dont elle a fréquenté le pensionnat de jeunes filles, Schaerbeek où vivaient ses grands-parents et où fut imprimée la première édition des Misérables de Victor Hugo, la Faculté de Saint-Louis où elle étudia et pour clore cet inventaire à la Prévert l’incendie de l’Innovation qui détruisit de nombreuses vies, … ) ; la Gaume chez des amis, en vacances, en week-end, pour garder la maison, … ; la Flandre, vers Ostende, pour des vacances au bord de l’eau…

Ces déambulations et pérégrinations sont prétextes à de nombreuses observations, à des souvenirs comme un accident survenu à Auderghem, des visites comme à Orval et de nombreuses rencontres parfois fâcheuses, parfois ennuyeuses mais quelques fois fort enrichissantes. Elle raconte notamment des anecdotes croustillantes vécues à l’occasion de cocktails littéraires un peu monotones entre écrivains entre eux, entre écrivains et leurs lecteurs et même d’écrivains avec leur propre égo, des écrivains toujours obligés de mettre leur art en quarantaine le temps de promouvoir et vendre leur livres qui ne peuvent exister que s’ils sont lus.

Ces pages sont des morceaux de l’histoire belge, des témoignages de ce qu’une jeune fille pouvait éprouver en Belgique pendant les Trente Glorieuses, les souvenirs d’un retour au pays avec moins de moyens, de belles balades dans la verte Gaume et dans les brumes de la Flandre de Brel, … tout un ensemble de témoignages et de réflexions qui constituent un bel exercice de nostalgie, comme un devoir de mémoire envers tous ceux qu’elle a connus et tous ceux que ses personnages fictifs auraient pu connaître. Un plaidoyer aussi pour les écrivains qui éprouvent certaines difficultés pour étaler leur talent et parfois faire comprendre leurs réflexions à leurs lecteurs. Je me souviens d’un propos de Marcos Malavia qui disait qu’un livre n’existe que lorsqu’il a été lu. Auteur et lecteur sont condamnés à cohabiter pour faire vivre le livre qu’ils apprécient

Marcos Malavia écrit dans Tragaluz : « C’est alors que j’ai compris qu’à chaque lecteur que je serais susceptible de croiser surgirait une histoire différente… Il y aurait autant de variantes que de lecteurs ».

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