L'instinct d'Inez de Carlos Fuentes
( Instinto de Inez)
Catégorie(s) : Littérature => Sud-américaine
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La musique, les femmes
Gabriel Atlan-Ferrera est un chef d'orchestre un peu particulier. Il déteste la professionnalisation de la musique et exècre ceux qui en tirent un succès certain leur assurant leurs moyens de subsistance. N'est-ce pourtant pas de la musique que lui-même vit depuis des années? Si, mais c'est différent, il aime la musique, il la vit et la ressent, contrairement aux autres dont il dénonce le manque d'âme et la tendance à la routine. Gabriel serait du genre plutôt doué, fichu caractère mais beaucoup de talent. Lors d'une représentation de la damnation de Faust, il croise la route d'Inès (qui deviendra Inez), une choriste mexicaine qui le fascine, il l'emporte le temps d'un week-end. La confrontation est violente, il la quitte, la retrouve dix ans plus tard et puis encore bien plus tard.
Rencontres douloureuses, deux êtres qui s'attirent mais ne peuvent s'aimer qu'en se séparant. Dilemme présent tout au long du récit qui s'articule sur deux tons. Le premier enrobe l'histoire d'un couple classique, Gabriel et Inès, le quotidien amoureux, les aléas de la vie. Le second style est dédié à l'universalité de l'émotion, à une fusion presque irréelle, éternelle, qui relie deux êtres, mais également un être et un art.
Beaucoup de subtilité dans l'écriture de Carlos Fuentes, il décrit les contradictions des sentiments affectifs, les déraisons causées par les émotions, tant en musique qu'en amour d'ailleurs, avec une certaine justesse.
Fuentes s'attache également beaucoup au personnage de la Femme. la femme en tant qu'objet de désir, mais aussi plus largement, en tant que mère et créatrice universelle.
Tout au long de son récit, Fuentes introduit des digressions sur le passé lointain, sur les instincts affectifs ancestraux. Par moments, cela complique le récit, il faut suivre, car la rupture de style est frappante et peut désarçonner. On passe de la classicité d'un couple ordinaire à l'allégorie d'un sentiment général et symbolique. Carlos Fuentes excelle dans les deux registres d'écriture, la "pratique" et la "chantante" mais les deux se marient peu harmonieusement. J'ai trouvé que Fuentes décrivait suffisamment les états d'âmes et les réflexions métaphysiques de ses deux héros, sans avoir de surcroît besoin d'allonger le débat et de l'expliquer différemment à l'aide de métaphores et d'allégories. Ce regret n'a cependant pas empêché à cette lecture d'être très agréable, l'écriture de Fuentes est musicale, comme le contenu.
Les éditions
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L'instinct d'Inez [Texte imprimé], roman Carlos Fuentes trad. de l'espagnol, Mexique, par Céline Zins
de Fuentes, Carlos Zins, Céline (Traducteur)
Gallimard / Du monde entier (Paris)
ISBN : 9782070763702 ; 17,75 € ; 06/11/2003 ; 198 p. ; Broché
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Les critiques éclairs (3)
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Ambitieux.
Critique de Tistou (, Inscrit le 10 mai 2004, 68 ans) - 10 juin 2009
Il a la tentation de l’onirisme débridé d’un Gabriel Garcia Marquez mais tempéré de l’art du récit des Anglo-Saxons tel un Richard Ford. Equilibre instable, lecture tout aussi instable, où l’on passe de « zones d’inconfort » - propos éthérés, considérations dérapantes, morceaux d’intrigue oniriques – à des zones plus « habituelles, conventionnelles, certainement plus confortables à notre intellect occidental.
Ambitieux car la construction de l’intrigue voit loin, très loin (très loin en arrière faudrait-il même dire !), mais pas trop réussi car « mal à accrocher », rebondissements heurtés, effets mal dosés ( ?).
Gabriel Atlan-Ferrara est un jeune chef d’orchestre français au destin manifestement prometteur lorsqu’il monte « La damnation de Faust », de Berlioz, à Londres en 1940, en pleine période de bombardements ; le « Blitz ».
Inès Rosenzweig est une jeune cantatrice mexicaine qui débute sa carrière à Londres, dans le choeur que dirige Gabriel, encore immature, déja hors normes.
C’est la première rencontre. Une rencontre inaboutie, conflictuelle à fleurets mouchetés.
En viendront deux autres, plus tard, et même trop tard. Mais Carlos Fuentes ne se contente pas de ce synopsis. Il vient intercaler dans tout ceci des télescopages de temps monstrueux puisque nous remontons brutalement jusqu’à l’aube de l’humanité, faisant finalement appel au concept de métempsychose. Et je ne vous parle pas de personnages à peine introduits, qu’on oublie, et qui se révèlent avoir une importance insoupçonnée !
Le tout est difficilement résumable et d’ailleurs je ne m’y lancerais pas au risque de déflorer certains ressorts du roman, habiles certes, mais compliqués ou peut-être mal mis en oeuvre ?
C’est compliqué, par moments pénible à lire, mais il y réside des moments fulgurants et de vraies idées. Du fond, il y en a, c’est plus avec la forme que j’ai du mal.
Passée à côté
Critique de Fanyoun06 (, Inscrite le 19 août 2008, 55 ans) - 1 mai 2009
Gabriel Atlan-Ferrera est chef d'orchestre et compositeur. Son imaginaire l'entraîne à 93 ans à une longue réflexion sur l'héritage et surtout sur sa liaison avec la diva Inez Prada. L'avenir est pour lui la mort, mais son passé est Inez et l'amour impossible (et oui, encore !!!) qu'ils ont partagé, Inez représente l'éternité. Histoire développée sur une quarantaine d'années. Ceci est la première histoire.
La seconde est très différente de la première. Elle est également tragique car amour (incestueux ou pas ?) et elle se passe dans l'ère des grandes glaciations avec grotte, vie tribale, parricide, fratricide.... Inez est rattrapée par ses ancêtres.
Pour être plus claire, je vais vous dire ce que je crois avec nuance avoir compris... ce n'est pas gagné !!! Je me lance :
C'est un roman relativement court (197 pages) et Fuentes a fusionné ces deux histoires, disparates à première vue. Différentes car la narration change comme une rupture de style et cela m'a quelque peu déconcertée. Je me suis aussi posée la question de la symbolique du fameux sceau de cristal et j'en ai déduit que c'est peut-être le lien entre espace et temps, entre mysticisme et réalité. La connexion est l'oeuvre de Berlioz La Damnation de Faust et les paroles chantées par le Démon dans les choeurs qui définit presque la relation entre Inez et Gabriel.
Je n'ai trouvé aucune virtuosité à ce roman ou peut-être il y en avait-il trop pour que je l'apprécie vraiment. Les méthaphores et allégories m'ont quelque peu échappé. Il y en avait beaucoup. beaucoup trop
C'est un grand roman d'amour, d'amour rarement comblé, différé, à la recherche d'une pureté originelle, animale, soudain, explosif et cependant délivré à la damnation : "Je n'ai pas pêché, vous les anges, vous le savez, vous m'emportez au paradis à contrecoeur, mais vous ne pouvez qu'accepter ma joie sensuelle dans les bras de mon amant" (Cf : La république des lettres). Cette phrase qui ne m'a sauté aux yeux pendant ma lecture, je la trouve magnifique et elle m'interpelle maintenant intimement.
J'avais acheté après avoir cherché dans quatre librairies L'instinct d'Inez sans succès, Les années avec Laura Diaz à défaut. Une cinquième librairie se trouvant sur mon chemin, j'y suis entrée et là, une pile de L'instinct d'Inez s'y trouvait (maintenant vous comprenez pourquoi vous avez eu du mal à acquérir ce roman : tous les exemplaires se trouvaient à la librairie Jean Jaurès à Nice). Je crois que mon premier achat m'aurait davantage plu. Comme je ne veux pas rester en froid avec Fuentes qui, outre ses talents d'écrivains, est un homme engagé politiquement, je vais laisser passer un peu de temps et lire Ma vie avec Laura Diaz et si, sait-on jamais, un Docteur es Lettres passe dans le coin, qu'il me fasse signe. Je crois que, comme pour L'enfer de Dante, un cours magistral s'impose.
En mode mineur
Critique de Gryphon (Mexico DF, Inscrit le 22 juillet 2004, 59 ans) - 30 septembre 2008
La constellation chef d'orchestre/cantatrice n'est pas des plus originales. Si on ajoute le sceau de cristal que relie les deux histoires, on se retrouve en plein univers hoffmannien, même si Fuentes est plus mystique que romantico-grotesque.
Un Fuentes mineur, en somme. A noter une petite interférence pour tout lecteur français, du moins dans les premières pages: ce chef d'orchestre, qui en pleine guerre mondiale monte "La Damnation de Faust" de Berlioz, comment ne pas se l'imaginer sous les traits de Louis de Funès, dont c'est précisément le rôle dans "La grande vadrouille"?...
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