La langue des choses cachées de Cécile Coulon
Catégorie(s) : Littérature => Francophone
Moyenne des notes :
(basée sur 2 avis)
Cote pondérée :
(42 990ème position).
Visites : 2 615
Tout ça pour ça !
Cécile Coulon nous dit qu’elle a écrit ce court roman dans un état hypnotique, bouillonnant et fiévreux. Et on veut la croire : la façon de raconter cette histoire semble l’avoir été sous une hypnose bouillonnante et fiévreuse, à tel point qu’on serait tenté de lui conseiller d’aller voir un psy.
Une guérisseuse est sur le point de mourir. Elle a transmis ses dons à son fils et celui-ci est appelé dans un village auprès d’un cas désespéré ; mais, il va commettre une erreur et cette erreur va réveiller tout un passé abominable. Sa mère, la guérisseuse, était passée avant lui dans ce village et… la suite est dans le roman.
L’histoire est bien imaginée mais ce qui est pour le moins bouillonnant ce sont les personnages ; par exemple, le personnage principal, la guérisseuse : « … Dans les cas extrêmes elle se métamorphosait : elle étirait ses membres, creusait ou gonflait sa peau, se recouvrait de terre ou de sang frais, la couleur de ses yeux changeait au fil des saisons (…) parfois elle se parait d’une beauté renversante, d’autres fois elle était si hideuse qu’on en perdait la vue... ». Brrr ! C’est bouillonnant, fiévreux, hypnotique mais, ce n’est pas tout : un jour « elle était sur la grande plage de sable brun où treize baleines avaient péris (…) ». Un autre jour, elle était « dans les plaines sauvages, au nord, où il était impossible de s’y rendre les jours de neige ou d’été flamboyant ». et encore une autre fois elle était « au milieu d’immeuble écroulés (…) elle se faufilait entre les ambulances et les casques, montait dans les étages noirs de fumées, s’attardait dans les salons coupé en deux, au milieu des corps enchevêtrés, aux membres disloqués, qu’on prenait pour des lampes ou des morceaux de table ». Et ce n’est pas tout : on la rencontre encore sur des pistes « où les fauves gisaient sur du sable souillé par l’urine et les excréments. Des lionceaux lançaient des cris inaudibles, des singes pendaient aux branches, des lynx, des tigres et des guépards avaient du sang qui coulait de leur babine et leurs langues séchées tombaient de côté... »
Bref, ce personnage extravagant se retrouve partout où se passent des drames extraordinaires avec « des choses cachées » qu’elle est la seule à comprendre. C’est très impressionnant mais on se demande ce que ça ajoute à cette histoire.
L’histoire se passe dans un village qui est dramatisé d’une manière outrancière et, à mon avis, tout à fait inutile ; par exemple, il y a un pont dans ce village et sous ce pont il y a des pendus : « un vieillard aux mains brisées par d’autres hommes, deux garçons solides pour qui on a doublé les cordes et un jeune de dix-huit ans qui ressemble à une poupée et dont les jambes sont bleuies par les coups, se balancent au dessus de l’eau comme des branches sans fleurs … »
Tout ça est, certes, très bien écrit avec même une dose de poésie bienvenue dans certaines descriptions de paysage. On aime ou on n’aime pas. Personnellement je ne me suis jamais ennuyé mais, il m’a semblé que l’auteur(e) a voulu faire des effets d’écriture pour montrer qu’elle savait imaginer des situations glauques, putrides, sanguinolentes à souhait mais, à mon avis, ça sent beaucoup trop l’artifice. Et c’est dommage parce que l’histoire est bien imaginée et, sans ces effets de manche, elle aurait été une vraie réussite.
Les éditions
-
La Langue des choses cachées
de Coulon, Cécile
l'Iconoclaste
ISBN : 9782378804046 ; 17,90 € ; 11/01/2024 ; 134 p. Broché
Les livres liés
Pas de série ou de livres liés. Enregistrez-vous pour créer ou modifier une série
Les critiques éclairs (1)
» Enregistrez-vous pour publier une critique éclair!
Une histoire de châtiment, à l'ambiance de conte gothique et horrifique, à mi-chemin entre Giono et "L'exorciste"
Critique de Eric Eliès (, Inscrit le 22 décembre 2011, 51 ans) - 17 août 2025
Je ne pensais pas lire un roman de Cécile Coulon mais je me suis laissé séduire, sur un coup de tête, par la très belle couverture et le titre, à la fois mystérieux, ténébreux et poétique. Je n’ai pas regretté mon impulsion. Ce court roman m’a même fait changer d’avis sur Cécile Coulon, car j’ai été surpris par l’intensité du récit à laquelle je ne m’attendais pas. Au contraire de SJB, j’ai aimé l’atmosphère de violence étouffante et glauque, percée d’éclairs de noirceur, qui nimbe le récit comme un halo ténébreux, jusqu’au dénouement paroxystique. Le récit se déroule dans un village reculé, où un prêtre convoque une sorte de rebouteuse pour guérir un enfant malade. Mais la rebouteuse est désormais trop âgée et elle envoie son fils, qu’elle a formé pendant des années. En outre, un secret, que son fils ignore, la lie à ce village. L’ambiance est très étrange : on dirait un mélange de Giono, dont la langue poétique évoquait les forces embusquées au cœur de la nature campagnarde, et de « L’exorciste ». J’ai également songé à « Nativité cinquante » de Lionel-Edouard Martin. En fait, la rebouteuse et son fils sont d'authentiques sorciers : ils possèdent d’étranges pouvoirs, que leur confère la maîtrise de « la langue des choses cachées ». La violence exacerbée dénoncée par SJB dans sa critique principale est omniprésente : elle est parfois révoltante, culminant dans la scène finale, mais elle n’est pas en trop car elle est consubstantielle au récit qui s’apparente, y compris dans son style assez lourdement chargé en métaphores pour susciter un sentiment d'horreur, à un conte gothique du 19ème siècle. Je n’en dirai pas trop pour ne pas spoiler et gâcher le plaisir de lecture mais la tension du récit s’appuie sur une histoire de vengeance, et une conception assez choquante de la justice qui suppose que tout crime (en l’occurrence le viol) mérite châtiment, quitte à broyer un innocent pour punir le coupable. La tension est forte dès le début du récit et, là où Cécile Coulon m’a réellement impressionné (et je la lirai sans doute avec un autre regard), c’est qu’elle parvient à entretenir cette tension et à la faire progresser et même croître, jusqu'au dénouement atroce qui marque durablement le lecteur.
Forums: La langue des choses cachées
Il n'y a pas encore de discussion autour de "La langue des choses cachées".


haut de page