Les Mangeurs de nuit de Marie Charrel

Les Mangeurs de nuit de Marie Charrel

Catégorie(s) : Littérature => Francophone

Critiqué par Pascale Ew., le 4 juillet 2023 (Inscrite le 8 septembre 2006, 57 ans)
La note : 8 étoiles
Moyenne des notes : 9 étoiles (basée sur 2 avis)
Cote pondérée : 6 étoiles (23 201ème position).
Visites : 1 112 

La férocité des hommes et la résilience

En 1926, des Japonaises embarquent pour le Canada afin d’épouser des maris qui leur sont promis. Ces mariées de papier ("picture brides") tombent souvent de haut lorsqu’elles rencontrent pour de vrai ceux dont elles ont rêvé. C’est le cas d’Aika, dont la famille porte la honte du père qui s’est ruiné à cause du jeu. Elle doit épouser un homme ayant fait fortune dans la pêche, mais lorsqu’elle voit cet homme pauvre de 45 ans, toutes ses illusions s’envolent d’un seul coup pour ne laisser la place qu’à l’amertume. Kuma a beau être un homme doux, rêveur et conteur, elle ne tombera jamais amoureuse de lui. Et lorsqu’elle met au monde Hannah, elle s’en désintéresse totalement. Bien des péripéties l'attendent encore jusqu'à ce que survienne la guerre et que tous les immigrés japonais soient expédiés et parqués dans des camps de travail, les hommes séparés des femmes.
Jack est un « creekwalker » solitaire. Orphelin, il ne lui reste que sa belle-mère indienne. Ils ne se remettent pas de la tragédie qui a frappé le frère de Jack, Mark. Mark a été kidnappé jeune pour être « éduqué » par les blancs. A son retour, il a fréquenté des hommes violents. Puis, finalement, il est parti à la guerre.
Les destins de Hannah et Jack vont se croiser et ces deux êtres farouches devront s'apprivoiser l'un l'autre.
Cette histoire est racontée en alternance entre les différentes époques et le puzzle prend forme petit-à-petit pour reconstituer toute l’histoire.
Je ne connaissais pas le sort de ces Japonais, qui ont été ostracisés et persécutés. Je suis frappée par le parallélisme avec le sort des juifs. Et l’auteure de s’interroger également sur la passivité de ce peuple qui s’est laissé arracher toutes ses maigres possessions pour se laisser enfermer.
J’ai beaucoup apprécié le style magnifique de l’écriture de Marie Charrel, qui décrit notamment la nature avec beaucoup de poésie.

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De l'aventure, de la poésie et une leçon d'humanité

9 étoiles

Critique de CHALOT (Vaux le Pénil, Inscrit le 5 novembre 2009, 76 ans) - 21 février 2024

Les mangeurs de nuit


L'histoire racontée se situe des années 1920 à la fin de la deuxième guerre, en « Colombie britannique »donc au Canada.
Qui connaît le contexte ?
Une minorité japonaise s'est installée, là dans ce pays, cherchant à s'intégrer .
C'est une mission impossible dans ce pays où la xénophobie anti japonaise est forte....Le rejet de cette « communauté » se transforme en haine au moment de l'entrée en guerre du Japon contre les USA.
Les japonais sont parqués en zones de concentration, privés de tout droit.
L'ironie de l'histoire c'est que ces nations vont entrer en guerre contre la barbarie nazie tout en se conduisant, à une échelle moindre à une même sauvagerie contre cette minorité asiatique.
Hannach est une fille d'immigrés japonais, née de l'union d'une jeune femme avec un homme plus âgé, le tout arrangé et organisé par correspondance !
Ce pays est magnifique avec cette nature si variée et si riche et une population diverse avec ces amérindiens et ces japonais pourtant rejetés qui bercent leurs enfants de mythes anciens dans le respect de la nature.
Hannah qui perd son père puis son petit frère et sa mère, n'accepte pas d'être contrainte au travail forcé et au confinement.
Elle s'enfuit avec d'autres et cherche à survive.
Sa peine est immense .
Elle n'a plus d'espoir .
Des rencontres dramatiques et une autre magique, celle improbable avec un « ermite » protecteur des animaux et des forêts, payé par le gouvernement pour empêcher que la soif d'argent conduise des hommes à détruire la flore et la faune.
Ces deux là sont marqués par la vie.
Hannah rencontre fortuitement la mère de Jack – l'ermite- qui, tout en souffrant de la perte d'un fils et d'un mari donne cette leçon inoubliable à la jeune japonaise poursuivie comme d'autres par la haine des racistes et la mort de ses proches :
« Regarde les oiseaux, les arbres, les insectes, la pluie, la beauté de chaque chose. La lune se couchant sur l'océan. Ecoute le chant de la cascade offrant sa fraîcheur à la nuit..... »

C'est beau, c'est dramatique, passionnant et tellement bien écrit !

Jean-François Chalot

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