L'innocence à l'épreuve de l'humanité

« Blessures » est un roman fort mettant en scène de nombreuses blessures et la tension est présente à tous les niveaux dans ce texte.

Le lecteur suit plusieurs personnages dans ce village dans lequel tout le monde se connaît. Suzanne est la belle garde-barrière dont Nicolas est tombé amoureux. Elle vit avec sa mère Léonie et son père Léopold qui contemple son jardin aux multiples rosiers. Tout ceci semble idyllique mais il n’en sera rien. En effet, une volcanique et envieuse femme gère un café dans lequel de nombreux personnages viennent se désaltérer : il s’agit de Maria, à la fois commère et méchante. Elle est mariée à un homme mourant de la tuberculose et mère d’une fille, Irène, belle et discrète jeune-fille qui ne sait pas se mettre assez en avant selon les dires de sa mère. Maria aurait adoré que sa fille plaise à Nicolas, mais elle semble sans énergie, sans esprit d’initiative, plus végétale qu’humaine. Oskar est le charretier qui vient régulièrement boire des bières au café et qui s’imagine bien remplacer le mari mourant de Maria. Le roman se déroule lors d’un été accablant qui semble exacerber les tensions et la violence sous-jacente de certains personnages.

A la lecture de ce roman, j’ai souvent pensé à Zola dans la façon de peindre les personnages, dans les tensions parfois implicites entre les personnages, dans son goût pour le tragique. La violence, le désir et la colère traversent tout le roman. La chaleur est étouffante, les personnages transpirent, la nature souffre à cause du risque d’incendie. Maria, elle, est rongée de l’intérieur par sa haine pour certains personnages féminins du roman, se plaint de sa fille qui n’a pas le tempérament qu’elle aurait aimé, elle est aussi habitée par le désir et maudit certains personnages. Oskar a aussi une certaine violence en lui tant dans son comportement avec sa jument qu’avec les femmes. Un personnage important va se blesser violemment, ce qui aura des conséquences sur la suite des événements. Tout se tient dans ce roman. L’atmosphère est à la hauteur de ce que ressentent les personnages et le lecteur sent que tout va crescendo.

Le style de Paul Willems m’a aussi séduit. Il dépeint parfaitement les relations humaines et les défauts des personnages. Il parvient aussi à donner naissance à merveille à ce village que l’on parvient à visualiser tant ce climat est bien rendu. Les liens qu’il tisse entre les réactions des personnages et cette chaleur incandescente sont bien menés et donnent une dimension lyrique à ce drame. Certaines scènes sont très fortes et marquent les esprits comme celle de la blessure dans la rivière, les scènes où Nicolas est dans le bar, celle où il est question d’un feu … Je reste évasif sur ces épisodes pour ne rien gâcher à de futurs lecteurs.

Ce roman est très bien construit, très bien écrit, possède un côté romanesque qui peut rappeler certains grands textes du XIXème siècle bien que ce roman ait été écrit durant la seconde guerre mondiale. Sans doute, cet épisode historique traumatisant a-t-il laissé quelques traces dans ce roman.

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  Blessures

  de Willems, Paul
  Labor
  ISBN : 9782804022181 ; 4,56 € ; 24/11/2005 ; 240 p. ; Poche

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  Blessures [Texte imprimé], roman

  de Willems, Paul
  Espace Nord
  ISBN : 9782875685704 ; 8,50 € ; 02/12/2022 ; 240 p. ; Poche

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