La guerre des pédés de Copi

La guerre des pédés de Copi

Catégorie(s) : Littérature => Francophone

Critiqué par Septularisen, le 5 avril 2023 (Luxembourg, Inscrit le 7 août 2004, 56 ans)
La note : 7 étoiles
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CHRONIQUE D’UN ARGENTIN À PARIS.

Dans ce livre, COPI met en scène une communauté d’homosexuels respectables, gentiment amalgamés à la société des années 70 - 80. Il y a là Jean-Jacques sociologue, Gontran son ami médecin, Michou le psychiatre, Lulu le diamantaire, Copi le dessinateur, le héros du récit et son ami Pogo Bedroom, styliste américain bien musclé, blond à moustaches.

Alors qu’ils mènent une petite vie tranquille sur les hauteurs de la Butte, la quiétude de ces militants homosexuels du 18e arrondissement va être troublée par un couple de travestis brésiliens : Une prostituée, Conceïçâo do Mundo et sa «mère», Vinicia da Luna, dont on découvrira par la suite qu’elle est un homme.
Notre petite communauté parisienne se retrouve prise pour cible par un gang de travestis brésiliens, bien décidés à mettre tout le quartier à feu et à sang. Jusque-là, Brésil et travestis rimaient plutôt avec divertissement, ricanement, pour se faire peur, tout en fumant des joints de la meilleure brésilienne. Mais l’objet du plaisir se retourne contre celui qui en jouit.

Un beau jour, les travestis brésiliens ne «jouent» plus avec les homosexuels français contre de l’argent, comme ceux-ci l’exigeaient, mais ils les martyrisent pour de vrai et gratuitement.
Entre le clan des homos respectables et celui des barbares latinos, la guerre s’annonce sans merci. Terrifiés, paniqués par ce qu’ils prennent pour un remake de mai soixante-huit, les homosexuels parisiens ne parlent plus que d’insécurité, songent à créer leur propre service d’ordre et vont même jusqu’à réclamer la peine de mort pour les insurgés.

Seulement voilà : Copi, l’un des Parisiens, va tomber sous le charme de Conceïçâo do Mundo, la très belle créature du camp adverse, qui l’arrachera à son confort petit-bourgeois pour l’emmener au bout du monde et de lui-même…

Si COPI (1939 – 1987, de son vrai nom Raúl DAMONTE BOTANA), est surtout connu comme dessinateur de BD, il n’en est pas moins aussi l’auteur de romans, pièces de théâtre et d’essais. Dont, bien sûr «La guerre des pédés», où il nous expose sans aucune pudeur, et avec beaucoup de provocations une satire de la société et en particulier de la communauté homosexuelle des années 70 - 80. Rétif à toute forme de dogme et de théorie, COPI met ainsi en scène les rapports ambigus qu’il n’a cessé d’entretenir avec elle.

Que dire de plus? C’est un récit fragmenté, puisque rappelons-le, au départ ce roman a été publié sous forme de feuilleton dans le mensuel Hara-Kiri entre octobre 1980 et novembre 1981. C'est une satire sociale, c’est provocateur à souhait, c’est un univers débridé, chaotique, décalé, inventif et osé… C’est aussi un roman d’aventures exotique un Space Opera au second degré, une comédie féroce et jubilatoire sans aucune retenue… Car rappelons-le, l’homosexualité à l’époque de la parution de ce livre est toujours considérée comme honteuse, traumatique, marginale, condamnable (l’abrogation du «délit d’homosexualité» date du 4 août 1982, donc après la publication de ce livre…) ou jugée déviante.

Chaque épisode est rempli d’un nombre incalculable de rebondissements, comme des petites pièces de théâtre très denses, ou des sketches, tous plus hallucinés les uns que les autres. C’est écrit à la manière des pulps, ces feuilletons américains du début du vingtième siècle qui proposaient une littérature d’évasion pour les masses. Ainsi, le récit s’ouvre sur une simple chronique homosexuelle, cela prend ensuite des allures de roman noir, puis cela se transforme en un vaudeville décadent, un pseudo-thriller, pour finir en SF psychédélique, une dystopie post-apocalyptique, une utopie lunaire.

Est-ce que je conseille la lecture de ce livre? Oui, sans aucun doute, si vous n’avez pas peur de lire une critique des communautés, toujours prêtes à se transformer en gangs… Oui, si vous n’avez pas peur de lire un livre avec un langage cru et très direct, comportant des mots et des phrases qui aujourd’hui ne sont plus considérées comme «politiquement corrects»… Oui, si les provocations «intellectuelles», suspectes d’être non commerciales, ne vous laissent pas indifférents… Sinon, passez votre chemin!..

P.S. : En raison du langage très cru et des descriptions très explicites, notamment de scènes de sexe, présentes dans ce livre, on évitera de le donner à lire aux plus jeunes et aux personnes les plus sensibles… Ce livre est à réserver à un public adulte et averti!

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