Faim Blanche de Amin Zaoui

Faim Blanche de Amin Zaoui

Catégorie(s) : Littérature => Francophone

Critiqué par Karimmbata, le 13 février 2023 (Inscrit le 13 février 2023, 47 ans)
La note : 10 étoiles
Visites : 999 

Lecture narrative.

Après quelques semaines de réflexion, je viens cher lecteur vous faire part de ma Propre lecture de ce roman merveilleux "FAIM BLANCHE". de son célébrissime auteur mon ami le Pr: Amin Zaoui .

Le Roman Faim Blanche, est un roman dénonciateur, qui préserve la tradition de ses prédécesseurs, les pionniers du roman Algerien francophone, c'est un texte qui peut être rapproché de plusieurs angles, vue la multitudes des thèmes abordés, la technique de l'écriture est élégante et captivante, malgré le manque d'une chronologie, le lecteur est emporté par le courant narratif, avec lequel il va découvrir -et celà malgré lui- la fine ficelle qui réunit l'ensemble des éléments du roman.
La chronologie est bannie du texte, c'est nous les lecteurs qui sommes sollicités à l'établir.
La sexualité, peut-être la sexualisation de la femme, la guerre fratricide, le climat sociopolitique,ce sont tous des thèmes parmi d'autres présentés par l'auteur dans un style d'écriture pareil à une délivrance, presentée par des mots crus et sans scrupules, caractérisant ainsi, le style de l'auteur qui ne ménage pas la vérité et ne maquille jamais le fait par des mots venus du dictionnaire de l'hypocrisie populiste.

Le Roman que j'ai avalé d'un trait, m'a donné beaucoup de grains de sel à déglutir, et un très long fil à retordre.
Je passais mes nuits à ressasser ses 32 chapitres, tantôt immergé dans la beauté des deux personnages du roman, la courageuse, la mutine Taous, et l'ambianceur Mustapha Bouzadi; tantôt englouti malgré moi, dans le stupre de ces "certains" personnages qui ressemblent à nos mémoires secrètes et notre quotidien hypocrite et maquillé, ce pervers de youcef, ce pasticheur de Alain Delon de Jérusalem, et ce scélérat, dépravé de Cheikh El Ghazali.

J'ai mangé de la faim blanche, et j'ai côtoyé ce Satan bienfaiteur et vertueux, j'ai maculé mes mains de sang de ménarche avec cet allumeur de réverbères, j'ai tombé dans le doute et la suspicion avec ce pauvre Rabah ou Rabha le fils frère de sa mère, j'ai volé avec les ailes de la folie et dansé avec les abeilles, en m'unissant avec les papillons de l'au delà, j'ai goûté du lait de la honte des seins pendants de cette allaiteuse juive dénigrée par ses propres enfants de son sein, transformés de simples nourrissons suceurs de lait, à de fossoyeurs de l'innocence.

J'ai su enfin que même l'aveugle préfère certaines couleurs, et les doigts de nos mains ne sont pas toujours au même nombre de cinq. J'ai suivi les pas du Prophète berbère mais je n'ai rien pu lire de son quatrième livre, j'ai fais face au vent de sable soufflant de la fenêtre du vent, et je me suis enseveli sous l'avalanche de sable, enterré avec des millions de secrets enfouis dans nos gènes, qui ressemblent aux ténèbres de la haine, de l'hypocrisie et de la démence. A la fin de ce voyage et sur le chemin du passé et des souvenances, à la recherche d'un autre livre de révélation, j'ai fait face au dernier quartier de l'orage.

Amin Zaoui, a su très bien comment ficeler ce roman sémiotique et pluri-thématique par excellence, mais il y a en chaque oeuvre bien ficelée, un âme de fil qui rassemble le tout pour lui donner une identité et un caractère, dans notre cas c'est le sujet préféré et primordial de l'auteur, qui n'est que "la condition de la femme" dans sa société et à travers le temps.

Taous la narratrice principale, nous embarque dans un voyage à travers ses réminiscences trouées de blanc, pour nous raconter sa vie de jeune fille dans sa famille disloquée qui habite un village appelé El Malha.

Dans cette petite société post coloniale, qui essaye de se réimplanter dans son environnement libéré des mains du colonisateur, mais qui souffre comme souffrent toutes les autres sociétés revenues d'une longue période d'effacement, sa souffrance est identitaire.

Un égo nationaliste démesuré, conjoncturelle ment légitime, une pruderie religieuse portée à l'emphase par un socialisme islamisé, ou un islam socialisé, et une recherche de soit parmi les decombres d'une histoire tumultueuse et un futur encore flouté dans les âmes et les cerveaux.

Dans cet société, il y a un mal organique, viscéral, qui la ronge de l'intérieur sans qu'elle ne s'aperçoive, c'est la condition de la femme, réduite au silence ou à seulement une figuration sociale, pareille à un amateur de karaoké qui ne fait que répéter les paroles dictées en essayant de les chanter sur un air prédéfini.

La femme cette créature sanctifiée, violée sur tous les autels sacrés de la société, tantôt sous le Saint toit de la famille, dans un inceste prémédité, acculé par des envies criminelles; tantôt dans la demeure du dieu, sous un voile de chasteté forcé et fétichiste, et tantôt dans le saint des saint de l'école sur une table destinée à appuyer l'innocence d'un enfant dans son voyage vers la connaissance.
La femme sanctifiée pour être violé, puis réduite au silence, à la reddition et la démission de sa vraie vocation en tant que personne dotée d'une conscience et une volonté.

Tassadit la folle, le puits qui garde bien ses secrets, mais continue à irriguer sa terre, sans rien demander en retour, la fille sans nom qui repond à tous les noms, par soumission ou par folie, elle donna sans corps en pâture à son beau père dans un inceste travesti, sans même se demander si elle avait droit de refuser par éducation ou par volonté, elle vécut l'ennemie de sa mére, soeur de son fils bâtard, jusqu'au jour où elle donna sa dernière révérence en un éclat de rire et de folie.

Taous la fille qui sait tout, mais qui sait aussi comment garder sa bouche cousue, la fille qui découvre son corps et veut s'y découvrir à travers, la fille qui refuse sa condition et veut la changer, la fille qui hait sa propre vie et veut la fuir, la fille qui nous a fait part de ses secrets en toute liberté et courage.

La mère de ces deux fille, ce gouffre de tous les maux, cette haineuse qui se déteste dans l'image de ses propres filles, cette prisonnière dans son propre foyer, cette criminelle, infidèle qui tua son geôlier pour y ramener un autre.

L'innocente Sahara, cette petite fille, cet éclat de pureté et de fraîcheur qui subit un viol à son insu, par l'homme qui devait la protéger, son instituteur de la parole de dieu, Sahara qui oublia tout ce qu'elle avait appris, et abandonna la vie de l'innocence enfantine, pour une vie d'adulte précoce.

Rabeh ou Rabha, avec son mal trismégiste,ce fils-frère de sa maman, par la faute d'un pervers, et l'innocence programmée d'une petite fille, et le silence imposé de la maman et la tante, par la complicité de toute la société jusqu'à l'erreur bureaucratique, entame un voyage de doute et d'incertitude, est-il une fille ou garçon, est-il le fils de sa mère ou son frère, est-il un simple enfant ou une créature Nyctalope.

Moustapha Bouzadi, ce beau jeune homme au pieds de Bigfoot, cet apatride qui cherche son élément dans le silence des cimetières, ce Merrouki qui cherche à se détacher de ses lointaines racines pour se greffer de nouvelles, mais le vent de sable soufflant des fenêtre de son foyer ambulant, l'oblige à se rappeler de ses origines de son grand père hexadactyle et son quatrième livre Saint.
Ce jeune amoureux qui ne sait pas comment l'exprimer, ce jeune qui sait raconter son passé mais ignore comment imaginer son futur, ce jeune homme qui subit lui aussi un viol, mais voyons!.. un homme peut-être violé par une femme? Une question qui écorcha la conscience de Mustapha sans laisser vraiment une trace, lui aussi tomba amoureux de sa violeuse la soeur blanche, la religieuse au tablier blanc.

Pourquoi on tombe amoureux de son violeur? C'est ça la vraie question. Pourquoi on tombe prisonnier, esclave sans volonté de son violeur ? C'est ça l'autre question que Amin Zaoui devra élucider dans un autre ouvrage.
Pourquoi on cherche constamment un foyer qui n'est pas le nôtre?

Faim blanche, prend sa fin dans un incertain commencement, Mustapha bouzadi tomba dans la blancheur de la démence, la folie n'est-elle pas un blanchiment du cerveau?, n'est-elle pas un nouveau commencement? Après un exil loin de sa liberté, il regagna son chemin vers son passé perdu à jamais.

Taous Reprit sa quête et découvrit enfin sa vraie vocation dans la littérature et la beauté de la lettre.

Le village El Malha continue d'abriter les mêmes gens, les mêmes noms, les mêmes maux, les mêmes secrets et les mêmes aspirations.

Et moi je prends ce livre rose de la "faim blanche" pour le poser à côté de son frère "canicule glaciale".

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