Des poèmes à découvrir

Ce recueil de poèmes a quelque chose de mélancolique. Guy Goffette arrive à communiquer cet état d’âme à son lecteur car ce dernier est rattaché au temps qui passe, au vieillissement, situation que nous devrions tous connaître. Le lecteur y perçoit aussi une certaine solitude, des allusions à un amour qui s’éteint, à la disparition d’êtres chers. Il a un rapport au monde qui interroge, ce monde qui existe indépendamment de notre condition.

« … la vie / promis, mais on a trop de jambes, trop / de bras et le cœur fait des nœuds / - assieds-toi donc mon âme, assieds-toi, laisse / l’enfant de tes rides, l’enfant perdu, / défaire le filet du pauvre pêcheur d’eau. »

L’écriture est moderne et certains images totalement vertigineuses comme celle du titre du recueil. Le rythme suit celui de la charge émotionnelle du poète. Les phrases enjambent sur la strophe suivante. Les phrases commencent souvent à l’extrême fin d’un vers. La forme même des poèmes est moderne. En effet, il utilise surtout des quatrains, des tercets et des distiques sans forcément viser une grande régularité dans la structure. Entrer dans ses poèmes, c’est accepter de perdre quelque peu ses marques et de se laisser porter par son écriture.

Des scènes du quotidien peuvent susciter l’intérêt du poète. Il décrit aussi des natures mortes, évoque les saisons, et rend hommage à de grands poètes comme Supervielle, Francis Jammes et Paul Claudel. Il y a aussi ce « blues du mur roumain » qui se compose de plusieurs poèmes. Ce recueil de poèmes regorge de trouvailles, tant dans le contenu que dans la forme. Certains poèmes méritent une lecture attentive pour en dégager les enjeux.

« Dire que nous avons cru au bonheur
Comme les gosses battant pavillon

Sur un peu d’eau croupie dans l’arrière-cour
- Ils savent qu’un rien suffirait

A renverser la mer sur sa quille,
Mais font comme si en attendant

Qu’une vague plus haute et qui blesse
Leur enlève le goût

De tutoyer l’éternité. Nous aussi,
Nous avons cru que la terre tournait

Entre nos bras, et tournerait toujours
Comme le soleil autour du pommier

- O paisible torpeur, quand déjà
Le ver était sous l’écorce,

Affûtés les outils dans la remise ardente
Et le sang bouillonnant dans les muscles

Des équarrisseurs de rêves."

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  Le pêcheur d'eau [Texte imprimé] Guy Goffette

  de Goffette, Guy
  Gallimard / Collection Poésie (Paris. 1966)
  ISBN : 9782070346158 ; 6,80 € ; 20/04/2007 ; 132 p. ; Poche

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