Sang impur de Hugo Hamilton
(The Speckled People)
Catégorie(s) : Littérature => Anglophone
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d'où sommes-nous et qui sommes-nous ?
Irlandais de naissance, fils d’un nationaliste irlandais viscéralement attaché à la langue gaélique comme expression identitaire et d’une mère allemande, le narrateur, l’auteur, nous raconte comment, enfant, la question de l’identité s’est posé à lui.
Un roman qui pourrait entrer dans la catégorie des classiques selon Colum Mac Cann…
Le style est simple, rythmé et c’est bel et bien par le biais du regard d’un enfant que nous voyons évoluer cette famille germano-irlandaise dans une Irlande récemment indépendante et manquant cruellement de confiance en soi.
L’usage interdit de l’anglais en faveur du gaélique et de l’allemand bouleverse cette fratrie, étrangère chez elle à double titre. Elle parle allemand après la guerre, elle parle gaélique et surtout par l’anglais…Elle en meurt d’envie, elle le fait parfois, au prix de coups de baguette…Car pour que l’Irlande soit l’Irlande, tous ses enfants doivent parler la bonne langue, pas celle de l’ennemi, pas celle du colon. Le père utilise ses enfants comme arme de restauration de l’esprit et de l’essence irlandaise. Ces enfants qui veulent, eux, être simplement comme les autres, pas des nazis, pas des irlandais…des enfants qui parlent et jouent comme les autres…
Ces enfants ne comprennent pas tout. Ils ne comprennent pas non plus ce film en noir et blanc, rapporté par bribes par leur mère. Des bribes de plus en plus claires, un film qui retrace l’Allemagne nazie telle qu’elle l’a vécue, telle qu’elle l’a soufferte…
Tout cela est émouvant et drôle à la fois. La jeunesse du narrateur permet de dédramatiser bien des choses tout en les pointant sérieusement du doigt. Il nous rappelle que nous jugeons trop, souvent trop vite…c’est l’histoire d’enfant « brack », tachetés, qui vivent, parlent dorment et rêve en allemand, en irlandais, en anglais…dans un monde où il faut appartenir à une catégorie seulement, les bons ou les mauvais, mais nous sommes tous bons, tous mauvais, tous tachetés…
Les éditions
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Sang impur [Texte imprimé], roman Hugo Hamilton trad. de l'anglais (Irlande) par Katia Holmes préf. de Joseph O'Connor
de Hamilton, Hugo O'Connor, Joseph (Préfacier) Holmes, Katia (Traducteur)
Phébus / D'aujourd'hui. Étranger (Paris)
ISBN : 9782752900173 ; 13,97 € ; 03/09/2004 ; 279 p. ; Broché
Les livres liés
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Les critiques éclairs (8)
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Intégration de cultures
Critique de Mimi62 (Plaisance-du-Touch (31), Inscrit le 20 décembre 2013, 71 ans) - 26 août 2019
Pour lui, l'Irlande, dont il faut impérativement sauver les traditions pour ne pas être avalé et digéré par l'Angleterre, voisin ennemi. Ce sauvetage passe impérativement, à ses yeux, par la conversation de la langue. Ce sera le combat de sa vie, combat qu'il imposera à ses enfants sans que ces derniers n'en comprennent les raisons, les causes, les aboutissements. Ce sera là, paradoxalement, la première difficulté rencontrée par ses enfants pour pouvoir s'intégrer dans leur propre pays.
Pour elle, l'Allemagne, où elle a été physiquement abusée par son patron, qui reste SON pays, un pays qu'elle aime, bien que des images contradictoires se bousculent, se superposent. Tantôt une certaine douceur de vivre, tantôt le contexte de guerre, tantôt des souvenirs de bonheur, tantôt des images de violence. Elle évoquera cela auprès de ses enfants sous la forme d'un film où elle a un rôle actif, où elle est actrice et non pas le film où elle n'a été qu'un personnage qui subit leur laissant un parfum d'histoire permettant de transmettre ce qu'elle a vécu sans que cela soit empreint de la réalité des violences. Cette origine étrangère sera la seconde difficulté à porter pour traverser leur intégration.
Lui est dur, exigeant, empreint de réalisme. Elle est douce, accommodante, rêveuse. Tous deux, à leur façon, aiment leurs enfants mais s'ils vivront plutôt dans un milieu aimant pour l'époque, la violence sera une notion toujours présente à leur esprit et même physiquement.
Le narrateur a volontairement choisi le parti pris de se remettre à la place de l'enfant, de raconter avec ses mots ce qu'il voit avec son regard et perçoit avec son âge. Cela permet de communiquer son ressenti sans qu'il soit nécessaire de s'étendre longuement.
Au final, la richesse du livre n'est pas tant dans les faits car il ne se passe que peu de choses, mais dans les nuances de perception de l'enfant auteur, dans leur évolution dans le temps.
Un ouvrage intéressant, sensible que l'on peut décider de recevoir uniquement à ce niveau pour en savourer la fraîcheur, mais que l'on peut aussi refermer avec la volonté de prendre du recul en s'interrogeant sur la façon de vivre son attachement à une culture, à l'usage que l'on veut en faire, à la juxtaposition de plusieurs au sein d'un cellule familiale, à l'intégration, aux intérêts de l'enfant tant ceux qu'il a que ceux que l'on décide pour lui.
Un livre qui ne laisse pas indifférent, où l'on trouvera de quoi se poser quelques questions, ou de se laisser promener dans ce monde si particulier de l'enfance, ou de découvrir une vie militante, une vie en Irlande.
Brack people
Critique de Lu7 (Amiens, Inscrite le 29 janvier 2010, 38 ans) - 7 juillet 2011
Comment grandir en portant, en plus du poids de sa propre famille, le poids de ses origines et de sa nationalité.
Comment accepter d'être par nature coupable de faits passés dont on n'imagine même pas la cruauté.
Etre Boche et Paddy à la fois, apprendre à haïr les Brits sans comprendre pourquoi, savoir être brack, tacheté, dans cette société irlandaise qui s'auto-détruit à force de lutter pour sa reconstruction.
Le style est superbe, épuré, naïf et poétique.
Certains reprochent à ce roman de ne pas évoluer, de ne pas laisser place à l'action; j'y répondrais que c'est justement la plus belle des actions qu'il nous est donné de lire ici : la naissance et la construction d'une personne nouvelle, tournée vers l'avenir, dont l'enfance a pourtant été résolument plongée dans le passé.
Simple et touchant
Critique de Courgette (, Inscrite le 28 janvier 2010, 32 ans) - 9 avril 2010
Certaines lignes sont remplies de poésie. J'ai aimé l'écriture simple, mais touchant, sans trop. Je le recommande.
Double nationalité
Critique de Aaro-Benjamin G. (Montréal, Inscrit le 11 décembre 2003, 55 ans) - 18 décembre 2009
(Prix Fémina Étranger)
Langue pure, langage monotone
Critique de Erve (Jalhay, Inscrit le 20 novembre 2004, 58 ans) - 28 septembre 2007
Mordre les vagues...
Critique de Dirlandaise (Québec, Inscrite le 28 août 2004, 69 ans) - 5 avril 2006
La lecture de Patryck Froissart
Critique de FROISSART (St Paul, Inscrit le 20 février 2006, 77 ans) - 28 février 2006
Titre : Sang impur
Traduit de l’anglais par Katia Holmes
Genre : roman
Editeur : Phébus
ISBN : 2752900171
Comment un enfant voit-il notre monde ? Comment se situe-t-il dans cet univers de violence, de guerres, de haines racistes ? Qu’y comprend-il ?
Le regard de l’enfant, voilà le point de vue adopté par Hugo Hamilton dans ce roman prenant, dont le narrateur est Hamilton redevenu petit dans une société de grands.
Très autobiographique, le roman est dit par la voix narratrice d’un enfant d’une famille « mixte » : mère allemande, père irlandais.
Le couple s’installe en Irlande, après la deuxième guerre mondiale. Les enfants naissent Irlandais, mais portent des Ledrehosen venus tout droit d’Allemagne, et des chandails d’Aran tricotés à la main. La mère, Irmgard, nostalgique du pays qu’elle a quittée, porte sur elle, bien qu’elle vienne d’un milieu anti-nazi, toute la faute de l’Allemagne hitlérienne, et ses enfants sont traités constamment de boches nazis par leurs condisciples, alors que certains milieux irlandais, dans leur haine de l’Angleterre, la félicitent d’avoir « donné la raclée » à l’ennemi séculaire.
Le père fonctionne sur des règles strictes, qu’il crée, et qu’il impose à tous. En premier lieu, chacun est tenu d’adhérer à son nationalisme irlandais si extrémiste qu’il en est ridicule et suspect, y compris aux yeux de la plupart de ses compatriotes. Il faut dire qu’il a un grand-père qui a combattu dans la marine anglaise, et qu’il se sent tenu de réparer cette trahison familiale en se faisant plus nationaliste que quiconque.
Les enfants sont obligés de parler l’irlandais, et ils sont les seuls à le faire dans le village, dont les habitants sont devenus anglophones depuis belle lurette. Tout mot anglais prononcé en présence du père est sanctionné d’une bastonnade.
La cruauté quotidienne des rapports entre les gens du quartier, l’esprit borné d’un père pitoyable qui rate, par ailleurs, l’une après l’autre les entreprises farfelues qu’il met en œuvre pour tenter d’améliorer la situation familiale, les souvenirs entrevus, bribe par bribe, de la jeunesse de ces parents singuliers, en particulier l’esclavage sexuel auquel la mère a été soumise dans sa jeunesse par un patron ayant des relations dans le parti national-socialiste, ou l’aveu par le père de sa vocation contrariée à la prêtrise, les tiraillements entre les deux langues et cultures des parents, sont autant d’éléments qui s’offrent à intense et lucide interprétation du monde des adultes, apparaissant comme pas très beau, par le jeune narrateur.
Un humour frais, teinté de l’innocence de l’enfance, baigne le tout.
Le lecteur sort du roman peut-être un peu plus pessimiste, s’il conservait encore quelque illusion quant à « l’humanité de l’homme ».
Je préconise un remède, pour retrouver la volonté de se battre pour espérer un jour changer les choses : se (re)plonger immédiatement dans le magnifique livre d’Amine Maalouf : Les identités meurtrières…
Patryck Froissart, le 28 février 2006
Enfance dublinoise
Critique de Sahkti (Genève, Inscrite le 17 avril 2004, 50 ans) - 20 avril 2005
Racines doubles dans un pays tiers que Hugo Hamilton narre avec humour, tendresse mais aussi amertume, on devine la souffrance derrière tout cela.
Son père est un obsédé du verbe, rien ne peut se dire en anglais, tout doit s'exprimer en irlandais pure souche (le gaélique) ou en allemand sous peine de brimades et de gifles. Apprentissage violent étalé dans ces pages qui transpirent la colère. Comment pourrait-il en être autrement? Comment, même en comprenant le désir profond de ce père tyrannique, accepter les violences subies par sa famille au nom d'un idéal linguistique et personnel?
Face à ce père par moments complètement fou s'oppose le mutisme désabusé d'une mère débarquée d'Allemagne, un pays qu'on ne dissocie pas du nazisme. Lourd fardeau pour Hugo Hamilton qui rend à travers ses belles lignes un vibrant homme à cette femme qui a tenté du mieux qu'elle pouvait de le combler d'amour.
Je me suis sentie complètement envahie par ces lignes, par cette révolte contre l'ennemi impérialiste dont la langue est bannie à table, par cet amour de la patrie irlandaise qui conduit à tous les extrémismes, par l'idéal d'un homme qui sacrifie le bonheur des siens au nom d'une cause... Oui, tout cela est fort, très fort, comme un hommage à des parents restés jusqu'au bout fidèles à eux-mêmes et à leurs espoirs enfouis.
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