Le voyant d'Étampes de Abel Quentin

Le voyant d'Étampes de Abel Quentin

Catégorie(s) : Littérature => Francophone

Critiqué par Pucksimberg, le 16 mars 2022 (Toulon, Inscrit le 14 août 2011, 44 ans)
La note : 9 étoiles
Moyenne des notes : 7 étoiles (basée sur 2 avis)
Cote pondérée : 4 étoiles (49 907ème position).
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Jean Roscoff, antihéros des temps modernes

Jean Roscoff est un universitaire qui a écrit un essai sur Robert Willow un poète américain venu en France dans les années 60 et qui a connu de grandes figures de la littérature comme Sartre ou James Baldwin. Ce poète est mort accidentellement en voiture. Jean Roscoff souhaite donc faire découvrir cet artiste méconnu injustement. Cet acte louable n’est pas vu comme tel ! Il a osé parler d’un homme noir sans mettre en avant la couleur de peau de ce poète. Les polémiques s’enchaînent : on lui reproche d’avoir eu l’attitude d’un homme blanc incapable de penser comme un homme noir. Cet engrenage est très bien dépeint par Abel Quentin qui explore ces groupes d’opposition et défense d’idées, ces personnes conscientisées que sont les wokes. Jean Roscoff est divorcé, alcoolique, a une fille en couple avec une femme militante intransigeante, très engagée pour protéger ses valeurs mais qui possède une grille de lecture du monde quelque peu rigide bien que ses idées soient audibles et valides. Notre antihéros est en prise avec toutes ses réactions soudaines et incontrôlables qui circulent vite avec les réseaux d’aujourd’hui. Il faut dire qu’il joue avec la malchance car son précédent livre sur les époux Rosenberg avait aussi rencontré quelques difficultés.

Ce roman est jubilatoire, intelligent et souvent amusant. Abel Quentin nous plonge dans le monde d’aujourd’hui et du débat d’idées et ose questionner sur cette génération engagée et parfois aveuglée par la cause unique qui fait sens dans leur existence. Certaines scènes sont vraiment truculentes et ce pauvre personnage, antihéros tragique des temps modernes, est en prise avec des jugements et des interprétations qui le mettent en difficulté. L’écrivain soulève le fait qu’il y a des sujets sur lesquels on ne peut plus débattre parce qu’il faut avoir une réflexion consensuelle. Pire encore : nous ne sommes pas tous habilités à parler de certains sujets selon notre couleur de peau, notre genre, nos idées politiques … Sartre déjà débattait de ce sujet quand on lui reprochait de défendre des causes populaires alors qu’il venait d’un milieu bourgeois.

L’écriture est vive et les chapitres brefs permettent de dynamiser le récit. Les dialogues aussi occupent une grande place dans ce roman réussi. Il y a les multiples scènes où Jean Roscoff est avec sa fille et sa copine, celles où il dialogue avec son éditeur tantôt soutien tantôt fébrile, les discussions avec son ex-femme … Ce roman est aussi une photographie du monde d’aujourd’hui, d’une génération qui a connu les débuts de SOS Racisme dans les années 80, du monde universitaire et de ses travers, du monde de l’édition mais aussi des prises de position sans appel de la jeune génération. Abel Quentin ne juge pas et entend tous ces points de vue différents, mais fait surgir intelligemment certaines dérives et certaines limites.

Un des meilleurs romans français du XXIème siècle à ce jour.

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Mais quelle était l'intention de l'auteur ?

4 étoiles

Critique de Mimi62 (Plaisance-du-Touch (31), Inscrit le 20 décembre 2013, 71 ans) - 14 octobre 2022

Bien difficile de cerner les intentions de l'auteur.
Le sujet est présenté comme les recherches sur un poète américain méconnu par Roscoff, un écrivain français tout aussi méconnu mais en plus raté.

Le propos sur le poète n'apparaissent que comme un prétexte pour faire parler l'auteur français sur sa propre déchéance, ses propres échecs. Pour cela le personnage vivant revient sur sa propre vie, ce qui est prétexte (là aussi) à jeter quelques lignes de ci de là, sur des faits de société, sur les changements de cette dernière.
Il est bien question de changement et non d'évolution car on n'a aucune idée de ce que Roscoff a bien pu faire entre ces deux périodes.

La lecture, sans être enthousiasmante, n'est pas rébarbative. Contrairement à ce que j'ai lu par ailleurs, et que je respecte, je n'ai rien trouvé qui m'ait prêté à sourire voire même à rire pour certains. Je n'ai trouvé qu'observations là où d'autres ont vu une analyse. Je n'ai vu que fadeur là où d'autres ont trouvé de la truculence.

Pourquoi n'avoir pas adhéré à cet ouvrage ? Tout d'abord parce que j'ai eu le sentiment que l'auteur n'a pas su choisir son type d'ouvrage : roman, critique sociale, analyse historique, biographie fiction ? Il a mélangé, sans bonheur, tous ces points de vue ce qui fait qu'il en ressort une sorte de mélange qu'il faudrait passer à la centrifugeuse puis au tamis pour séparer les éléments et les réassembler de façon plus logique.
L'ensemble m'est apparu traîner en longueur avec des passages dont l'intérêt m'a échappé.

Lorsque l'on prend connaissance de la mort du poète, je ne peux m'empêcher de penser à ce qui s'est passé à Villeblevin, lorsque Gallimard conduisait sa Facel Vega avec Camus à ses côtés.
Je ne pense pas que ce soit un hasard de la part d'Abel Quentin dont le choix du pseudonyme est une référence à un personnage de film.

Peut-être cela aussi : je cherche un roman qui me permet de naviguer dans un univers, je cherche un livre qui m'éclaire sur un sujet, je cherche un livre qui me rapporte des faits historiques. Je n'ai rien trouvé de cela dans ces pages ou plutôt j'ai trouvé un peu de tout de cela. Le sucré salé ce n'est pas ma tasse de thé.

Peut-être est-ce cela que l'on appelle littérature ?
Peut-être y manque-t-il davantage de rythme ?
Peut-être me manque-t-il des clés mais je n'ai aucune idée de ce qu'elles sont.

Difficile de donner une conclusion, un avis autre que ce n'est pas le genre littéraire fait pour moi.

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