La mort ne porte pas de talons aiguilles de Gabriel Noncris

La mort ne porte pas de talons aiguilles de Gabriel Noncris

Catégorie(s) : Littérature => Francophone

Critiqué par Débézed, le 31 janvier 2022 (Besançon, Inscrit le 10 février 2008, 76 ans)
La note : 7 étoiles
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Aphorismes suicidaires

Avant de lire ce recueil, il importe de prendre connaissance de l’avertissement proposé en préambule par l‘éditeur : « Les vues et opinions exprimées dans ce présent ouvrage sont ceux de personnages fictifs et ne sauraient donc être imputables à l’auteur… ». Ce texte est un document trouvé aux côtés d’un quidam décédé, par un passant qui a tenu à informer les lecteurs éventuels de la dangerosité que comportait la lecture de cet ouvrage. « Prends garde, donc, réfléchis bien à ce que tu vas faire ; si tu poursuis ta lecture, tu fais le choix de t’engager dans des ténèbres opaques et hideuses dont tu n’as pas encore idée… ». Gabriel Noncris a prêté sa plume à un certain Claude qui a écrit ce qui précède après avoir lu ce qu’un certain Christian a écrit avant de mourir (de se suicider ?) en laissant auprès de lui un coffret contenant le fruit de son écriture. Un fruit dangereux.

Gabriel Noncris, selon le préfacier, Théophile de Giraud, est un auteur qui « pratique avec un art peu commun ce plaisir que Baudelaire qualifiait d’aristocratique : celui de déplaire ». Il entraîne le lecteur au tréfonds de textes abyssaux, nihilistes, cyniques, morbides, tristes et désespérants. D’autres qualificatifs tout aussi négatifs et affligeants pourraient être ajoutés encore à cette sombre liste. Noncris est un philosophe du néant, du morbide, de l’échec de la vie sur terre, de l’incapacité des hommes, de la négation des religions, de l’inéluctable suicide, …, il ne croit en rien ! Les aphorismes qu’il prête à Christian, le personnage qu’il a créé pour la rédaction de ce livre, le démontrent à longueur de pages.

Ces aphorismes évoquent une volonté destructrice :
« J’aime les gens heureux : il reste en eux quelque chose à détruire. »
« Ne pas jouir, c’est rater sa vie ; ne pas se suicider c’est rater sa mort. »
« Le suicide est le seul acte que l’on peut véritablement qualifier de révolutionnaire : seul un mort ne participe plus au réel. »

La médiocrité de l’humanité :
« Le seul remède contre la médiocrité, c’est le cyanure. »

Le rejet des autres :
« Tout Homme qui ne haït pas est soit un saint, soit un imbécile. »

Le rabaissement de la femme :
« Religieuses ou prostituées, - le destin des femmes semble d’être à genoux. »

La négation des religions :
« Vu l’état du monde que Dieu gouverne seul l’archange maudit est digne de nos prières. »

La vacuité de l’écriture et de la philosophie :
« Les philosophes et les écrivains sont des fanfarons qui parodient la souffrance humaine comme les singes imitent les Hommes. »

Christian, cet écrivain fantôme de Noncris, dont le désespoir est absolu et l’attirance funeste pour le néant irrépressibles, se réfère souvent à Cioran, Nietzsche, et même Nihil Messtavic pour écrire ses aphorismes négatifs, suicidaires, morbides, … Mais n’oublions pas que Noncris, sous son propre nom, a lui-même écrit le manifeste pour « Le droit au suicide indolore » que certains peuvent accepter surtout si comme Christian il « … rêve d’une mort au goût de framboise ». A L’heure où le débat sur l’euthanasie ou le droit de mourir dans la dignité est à nouveau en plein débat, d’aucuns penseront certainement comme Christian le porte-plume : « A défaut d’avoir choisi de naître, ayons le choix de mourir en douceur ! ».

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