Barroco tropical de José Eduardo Agualusa

Barroco tropical de José Eduardo Agualusa
(Barroco tropical)

Catégorie(s) : Littérature => Africaine

Critiqué par Septularisen, le 5 mars 2021 (Inscrit le 7 août 2004, - ans)
La note : 10 étoiles
Visites : 3 086 

«CENT ANS DE SOLITUDE», SAUCE ANGOLA!

Au début de l’histoire nous sommes en Angola de nos jours. Nous faisons la connaissance de Bartolomeu Falcato, journaliste, écrivain, cinéaste et... borgne. Il est en train de se promener en voiture, et de discuter avec la jeune et belle Kianda, la chanteuse angolaise mondialement connue, qui est aussi sa maîtresse. Alors, que celle-ci lui annonce qu’elle le quitte définitivement, ils sont dans une tempête aussi brusque qu’impétueuse, et alors qu’ils sont à l’arrêt, une femme tombe du ciel et s’écrase sur la route juste devant eux.

Bartolomeu apprendra plus tard qu’il s’agit de Nubia, ex reine de beauté et ex-miss Angola reconvertie comme présentatrice de télévision, et avec qui il a eu une relation sexuelle fortuite dans un avion quelque temps auparavant. Les malheurs de Bartolomeu vont alors commencer. D’autant plus que Kianda a révélé leur liaison a Barbara Dulce, la femme de Bartolomeu et celle-ci a quitté l’appartement familial en emmenant leurs deux filles.

En bon journaliste qui se respecte, Bartolomeu veut mener l'enquête sur l'accident dont il a été témoin. Mais, dans un pays qui est loin d’être une démocratie, dans une ville de Luanda où la corruption règne en maître, et dans ses bas-fonds où la vie ne tient qu’à un fil, ce n’est pas toujours chose facile! D’autant plus que Nubia qui fréquentait la jet-set et était la maîtresse de nombreux hommes politiques, en savait sans doute beaucoup sur leurs secrets les plus inavouables. Ces mêmes politiciens croient d’ailleurs que celle-ci a peut-être parlé de certaines choses à Bartolomeu.

Un soir, Bartolomeu reçoit un mystérieux appel téléphonique. Une voix masculine le prévient de ne surtout pas retourner dans son appartement, car un tueur l’y attend pour l'assassiner…

Encore une fois, je finis ébahi par la beauté et l’imagination de l’écriture de l’Angolais. Complètement sous le charme. Quel conteur (ou devrais-je dire quel charmeur?..), hors-pair ce M. José Eduardo AGUALUSA (*1960). On commence, on lit dix pages et voilà, ça y est, on est déjà piégé dans l’histoire, déjà complètement accro, déjà on veut connaître la suite de l’histoire et donc on continue à lire…

Que dire de plus ce livre? Il est pratiquement impossible de résumer un livre aussi déconstruit, fou et déjanté, surtout sans en divulgâcher une partie! J’ai d'ailleurs la curieuse impression que tout ce que je pourrais vous en dire sera de trop!.. Ou alors pas assez!.. C’est prenant, intense, brillant, audacieux, intriguant, compliqué, énigmatique mystérieux à souhait et pourtant… C’est un régal! C’est choral, on s’y perd, on se retrouve, on s’attend qu’il arrive n’importe quoi à n’importe quel personnage, à n’importe quel moment (et cela arrive d’ailleurs!..). De nombreuses histoires se croisent et s’entrecroisent, se perdent et se retrouvent. Même chose aussi pour les nombreux personnages, tous aussi incroyables les uns que les autres!

L’auteur brise même le «quatrième mur», et s’adresse directement au lecteur, pour lui dire p.ex. comment est né l’idée de ce personnage, ou pourquoi l’histoire évolue dans ce sens-là, ou de relire un chapitre si on a oublié qui est le personnage secondaire dont il est en train de vous parler, etc...

C’est aussi polyphonique, il y a de nombreux retours en arrière et une flopée de personnages secondaires qui pourtant tous ont leur importance. C’est toujours sur le fil du rasoir entre le réel et l’imaginaire, mais ce n’est pas un roman fantastique. Il y a une intrigue policière, mais ce n’est pas un roman policier. Il y a une amourette, mais ce n’est pas un roman d’amour. Il y a une intrigue politique, mais ce n’est pas un essai moralisateur etc... Bref, ce n’est pas toujours facile à lire, mais, finalement et malgré tout, on en redemande!

En conclusion, et pour faire simple, je dirais que si vous avez aimé le roman de Gabriel GARCIA MARQUEZ «Cent ans de solitude», vous allez aimer «Barroco tropical». Personnellement, je n’ai qu’un conseil à vous donner: Lisez-le, lisez-le, lisez-le…

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