La familia grande de Camille Kouchner

La familia grande de Camille Kouchner

Catégorie(s) : Littérature => Francophone

Critiqué par CHALOT, le 15 janvier 2021 (Vaux le Pénil, Inscrit le 5 novembre 2009, 76 ans)
La note : 9 étoiles
Moyenne des notes : 8 étoiles (basée sur 6 avis)
Cote pondérée : 6 étoiles (14 663ème position).
Visites : 3 580 

roman et essai : un livre courageux

"La familia grande"
livre de Camille Kouchner
éditions Seuil
janvier 2021

J'ai beaucoup hésité avant de lire cette oeuvre , le battage médiatique m'ayant indisposé.
J'ai ouvert le livre hier soir et j'ai attendu la fin pour le refermer.
Le titre est bien trouvé, c'est une grande famille recomposée.... Ce sont au départ des intellectuels, à gauche, engagés, ayant une conception libertaire de l'éducation des enfants et de leur éducation sexuelle.
Certains vont se rapprocher du pouvoir et perdre leurs références premières.
Il y a là bien souvent, même si ce n'est pas dit, une confusion des générations, une levée des interdits qui peut mener , au pire, à l'inceste au viol, de fait.
L'auteure raconte son enfance, les drames qu'elle a vécus comme le suicide de sa grand-mère et le grand désespoir de sa mère.
C'est un drame alors qu'elle a été entourée, aimée par sa mère et peut-être son père qui, comme d'autres, s'est occupé des enfants du monde mais peu des siens.
Le coupable, le beau-père, l'incestueux, n'est pas détesté, c'est ce qui fait hésiter la narratrice qui ne dénonce pas son beau-père et qui se tait jusqu'au moment où seule la parole peut la libérer, elle et son frère.
Elle a écrit ce livre après la mort de sa mère.
Elle explique bien, indirectement, à son beau père qui a abusé de son frère jumeau qui lui a été confié :
"Et la contrainte, alors? Comme une putain de contrainte morale! Comme le fait qu'on t'ait tellement aimé, tu vois? Comme le fait qu'on ait eu tellement confiance en toi et qu'on aurait pu te défendre jusqu'à la mort, s'il l'avait fallu"

C'est une lecture qui marque.

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Un puissant témoignage

10 étoiles

Critique de Falgo (Lentilly, Inscrit le 30 mai 2008, 85 ans) - 9 juin 2022

Je lis ce livre avec beaucoup de retard sur sa publication. Je constate que les critiques précédentes l'ont bien résumé et exprimé des opinions que je partage largement, surtout celles émises par Blue Cat. Il s'agit d'un témoignage à prendre comme tel, pour lequel je ne regarde pas vraiment les qualités littéraires. Mon propos est du coup différent de celui des critiques déjà émises, concernant, en gros, la sociologie de cette famille et du groupe qui l'entoure. Il s'appuie, en particulier, même si existent d'autres approches, sur l'admirable ouvrage du couple Pinçon-Charlot "Sociologie de la bourgeoisie". Le monde que décrit Camille Kouchner est le sien, qu'elle a adoré durant toute son enfance et auquel elle continue d'appartenir puisque son compagnon (Thiago dans le livre) se nomme Louis Dreyfus, membre de l'association "Le Siècle" dont son beau-père a été, un temps, président. Ce monde est celui de notre élite intellectuelle, politique, économique et sociale. Celle qui dirige notre pays. Dans ce cas il se situe politiquement plutôt à gauche, mais je suppose qu'on pourrait en rencontrer l'analogue plutôt à droite. Dans nombre de discours médiatiques concernant les phénomènes décrits est utilisé le terme "exemplaire" comme si l'appartenance à l'élite comportait ipso facto l'obligation de l'être en toutes circonstances. Mais qu'est ce que cela veut dire "être exemplaire"?
Le dictionnaire Robert pour un premier sens écrit: 1° Qui peut servir d'exemple. 2° Dont l'exemple doit servir d'avertissement, de leçon. Ces définitions renvoient à celles du vocable "exemple": 1° Action, manière d'être, considérée comme pouvant être imitée. 2° Personne dont les actes sont dignes d'être imités. Voilà qui me semble plus compréhensible. Notre mémoire ne manque pas de cas coïncidant avec ces définitions. J'ai lu quelque part que le Général de Gaulle, à l'Élysée, payait de sa poche les repas qu'il offrait à ses proches. Mais lequel de ses successeurs a suivi son comportement? D'autre part si montrer l'exemple consiste à suivre le règle admise par tous, où va-t-on? Comment libérer le comportement sexuel d'une morale étriquée, même si elle est largement partagée et prônée par des autorités religieuses, sans pratiquer une transgression par rapport à cette morale? Mais comment ne pas aller au delà de ce qui est admissible moralement ou légalement? Toutes questions que ce livre effleure et qui sont très difficiles à analyser. C'est sans doute pour cela qu'existe un "Comité National d'Éthique" rassemblant diverses autorités sur un sujet donné (euthanasie, par exemple). Il a, entre autres tâches, pour mission de cadrer le comportement public de tout un chacun. Ce que l'élite ne fait pas spontanément, à en croire ce livre. Encore que d'autres affaires (Strauss-Kahn et d'autres) vont dans le même sens, montrant que "le groupe" a plutôt tendance à masquer publiquement la réalité des faits, pratiquant ainsi une sorte d'omerta et à s'enfuir comme une volée de moineaux quand elle est révélée (on ne savait rien, on ne s'est rendu compte de rien, etc.). La défense (supposée) du groupe et de ses membres prend le pas sur toute autre considération. Tous les exemples publics récents ont montré que ce réflexe jouait en premier et durait jusqu'à ce que les médias et la justice s'en occupent, souvent à la suite d'actions de lanceurs ou lanceuses d'alerte dont le rôle commence à être reconnu, malgré des dérives encore mal contrôlées.

Fallait-il écrire ce livre ?

6 étoiles

Critique de Pacmann (Tamise, Inscrit le 2 février 2012, 59 ans) - 16 janvier 2022

Il est sans doute légitime d’écrire un récit expiatoire évoquant de telles souffrances, moyen de soulager le poids du silence et de la culpabilité.

Fallait-il l’écrire de cette manière ? C’est moins évident de répondre à cette question car il me semble dérangeant d’évoquer ouvertement des personnalités célèbres qui en prennent tous plus ou moins pour leur grade ; le père, la mère, la tante, la grand-mère et même la seconde épouse du père. Seul le coupable principal est identifié sans être nommé, et débaptisé pour l’occasion en « l’Hydre », monstre pernicieux et abject.

Par ailleurs, ce récit soufre aussi de la comparaison avec « Le consentement » de Vanessa Springora, qui évoque un phénomène semblable, soit l’emprise d’un adulte pervers sur des adolescents fragiles et sans repères. L’ouvrage de Vanessa Springora est d’un niveau littéraire largement supérieur et aborde les choses de manière plus subtile que ce récit aux phrases courtes et teintée d’une forme de colère mal maîtrisée.

« La familia grande » doit donc probablement en grande partie son succès aux personnalités évoquées dans le bouquin et moins au schéma du beau-père pédophile qui, je n’en disconviens pas, reste un drame familial extrêmement complexe à gérer tant pour les victimes directes que pour l’entourage.

L'inceste reste un crime

8 étoiles

Critique de CC.RIDER (, Inscrit le 31 octobre 2005, 66 ans) - 5 janvier 2022

Leur mère, Evelyne Pisier, sœur de l’actrice Marie-France, étant décédée seule à l’hôpital de Toulon, Camille, accompagnée de son jumeau Victor, de son aîné Colin et des adoptés Luz et Pablo, arrive pour les formalités d’enterrement. Sa mère était une intellectuelle, agrégée de sciences politique, féministe, gauchiste, prototype de la soixante-huitarde libérée et mariée un temps avec le célébrissime Bernard Kouchner, plus souvent au quatre coins du monde qu’auprès de sa famille. Elle pratique l’amour libre de manière systématique. Elle a même eu une liaison avec Fidel Castro alors que son mari en avait une avec sa propre sœur. Elle incite sa fille à suivre son exemple. Elle divorce de Kouchner alors que Camille n’a que 6 ans et prend un nouveau compagnon qui fera office de beau-père, dont le nom n’est pas mentionné dans le livre. Mais chacun sait qu’il s’agit d’Olivier Duhamel. Il abuse sexuellement de Victor âgé de 14 ans. Camille l’apprend, mais n’ose rien dire à sa mère. Les deux jeunes vont très longtemps garder le secret et la culpabilité…
« La familia grande » est un témoignage aussi bouleversant qu’écœurant sur les mœurs dissolues d’une élite bobo-gaucho toujours prête à faire des leçons de morale au bon peuple alors qu’elle-même est loin d’être un exemple. C’est aussi un terrible réquisitoire contre une forme d'éducation libertaire qui fit de grands dégâts chez des enfants innocents qu’on poussait à découvrir l’amour physique le plus tôt possible. De l’amour libre, du rejet de tous les tabous sexuels au laisser-aller complet, à l’échangisme et au crime de l’inceste, la frontière est ténue et malheureusement aisément franchie. Si Duhamel ne pourra pas être inquiété, car il y a prescription des faits, cette « grande famille » bien dépravée en paiera autrement les conséquences. Le grand-père se suicidera en se tirant une balle dans la tête. La grand-mère en fera autant en avalant des barbituriques. La mère sombrera dans l’alcoolisme avant de rejeter ses propres enfants quand ceux-ci voudront témoigner. L’actrice si libre et si jolie sera retrouvée noyée dans sa piscine. Ouvrage court et très aisé à lire qui donne à réfléchir sur les excès de liberté, le rejet des tabous qui amène aux pires excès et l’absence de moralité et de principes éthiques d’une certaine élite. Le poisson pourrit par la tête, dit-on.

Des bobos pas si beaux...

6 étoiles

Critique de Blue Cat (, Inscrite le 4 septembre 2018, 60 ans) - 9 août 2021

Bien difficile de savoir quoi penser au juste de ce livre témoignage. En le refermant, c'est du dégoût que j'ai ressenti, et pas seulement pour Olivier Duhamel, le beau-père incestueux.

Quelle est la motivation de Camille Kouchner exactement ? Soulager sa (mauvaise) conscience ? Exister médiatiquement à son tour ? Ce n'est pas très clair à mes yeux.

Ce qui se passait dans cette famille élargie aux nombreux amis est immoral. On apprend aux enfants de 10 ans à rouler des pelles et on s'insurge qu'une fille puisse être encore vierge à 12 ans. On se montre à poil devant des enfants très jeunes et on tripote ouvertement les épouses et époux des autres. On échange les partenaires sans problème. On prend des photos des poitrines et des fesses (nues) de pré-adolescentes mais aussi de femmes vieillissantes (la mère d'Oliver Duhamel). On fume, et pas que du tabac, on boit, beaucoup. On initie les pré-adolescents à tous ces produits.

Mais attention, on a des diplômes ! On est l'élite du pays. La gauche caviar phare de l'humanité. On fréquente les gens au pouvoir, on en est. Bref, ce qu'il se fait de mieux dans le genre humain.
La morale, l'interdit de l'inceste, la pudeur, l'intimité respectée, la tristesse, tout ceci est réservé aux imbéciles de 'la France d'en bas'.

Et c'est là que le bât blesse. Car l'auteure Camille Kouchner sort bien de ce moule et elle en est fière. Un peu comme si elle crachait dans une soupe dont elle s'est longtemps délecté.

Elle n'a cessé d'admirer sa mère au comportement totalement dépravé.
Cette mère qui n'a jamais protégé ses enfants mais les a incités à se rouler dans ce 'Tout est permis' qui n'est autre qu'un 'Faites comme moi, sans quoi je ne vous aime plus'. Sa maxime 'La baise, c'est la liberté'. Pour elle, son fils adolescent lui a volé son mari, l'adulte incestueux.

Ce beau-père obsédé sexuel qui 'initie' son beau-fils et roule des pelles à des filles de ses amis âgées de 12 ans, gamines qui restent dans un état de sidération nauséeuse. Qui demande à Camille enfant si elle porte une culotte (ce qu'il interdit).

Ce père, Bernard Kouchner, colérique et éternel absent. Qui n'a ni temps, ni attention, ni affection à offrir à ses 3 premiers enfants. Trop occupé à investir son couple avec la star Christine Ockrent, qui lui ouvre d'autres portes. Un statut de héros humanitaire derrière, une carrière politique devant. Alors les enfants, hein…

Jusqu'à Marie-France Pisier, la tante aimante, qui ne soit elle aussi décevante. Ne s'offusquait-elle pas que Camille soit encore vierge à 12 ans ? Et puis, elle n'était pas choquée de ce qui se passait depuis tant d'années dans cette propriété des Duhamel, pas choquée du tout. Elle en était partie prenante et s'amusait comme une petite folle. En dévergondant les pré-ados au passage.

Et puis, il y a les suicides, ceux des deux grands-parents maternels de l'auteure, dont les causes restent confuses. Refus de vieillir ? Sans doute. Car il y a bien confusion des générations dans cette famille. La jeunesse et la baise, sinon rien. Quelle pauvreté d'âme.

Ma conclusion est que la liberté sans conscience n'est que ruine de l'âme. Mai 68 est mort. Malheureusement des enfants ont trinqué pour ces adultes jamais tout à fait adultes. Dont acte.

Quand on lave son linge (très) sale au lavoir public

7 étoiles

Critique de Bernard2 (DAX, Inscrit le 13 mai 2004, 75 ans) - 25 janvier 2021

C’est l’histoire d’une famille bien sous tous rapports : des études de haut niveau, des postes prestigieux, un réseau de relations ouvrant toutes les portes. Bien sûr on est de gauche, c’est mieux pour le paraître. Bref, une fort belle famille.
Mais il ne faut pas soulever un coin du voile, car alors on découvre la réalité. Au nom d’une prétendue liberté, on s’autorise tous les excès. Le sexe d’abord :
« penser que la liberté implique de vivre comme les grands. Pour un enfant intelligent, rien ne doit être surprenant. Colin est un jeune adolescent quand ma mère lui envoie une de ses copines, une Sanaryenne dévouée, pour le déniaiser ».
Des liens familiaux uniquement de façade :
« Ma fille, quelle liberté ? La liberté, c’est de pouvoir choisir de ne pas s’en occuper. Qu’elle est mignonne ! Pourvu qu’elle ne soit pas conne ! », dira la mère à sa fille qui choisira d’allaiter. Ou encore lorsque le grand-père – ministre, donc très occupé et constamment absent - ignorera le prénom de sa petite-fille.
Liberté source de bonheur ? On peut en douter quand on constate que dans cette famille il y aura trois suicides et un décès dû à cancer provoqué par un grand abus d’alcool et le tabac.
Quant aux idées de gauche :
« Dès 1990, la gauche révolutionnaire le cède à la gauche caviar. Le pouvoir rapporte. Il n’est plus question d’école publique pour les petits. Luz, Pablo et tous les cousins sont inscrits dans le privé, à l’École alsacienne, qu’on m’a pourtant appris à détester. Les enfants travaillent aussi le réseau des parents ».
Dès lors, où est la limite puisqu’on ne veut pas en avoir ? Et pourquoi pas l’inceste, à la condition bien sûr que ça ne se sache pas ? Mais si la parole se libère, alors tout s’écroule. D’abord on accuse la victime elle-même, un comble ! Puis celle qui a parlé : trop tard donc complice !
Le principal coupable démissionnera de toutes ses fonctions dès que la réalité sera rendue publique. Mais qu’il se rassure, il y a prescription.
Le livre ne parle pas des démissions qui ont suivi, de personnes qui ont affirmé n’avoir été au courant de rien. Donc totalement innocentes. À moins que...

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