Correspondance croisée (1937-1940) de Simone de Beauvoir, Jacques-Laurent Bost
Catégorie(s) : Littérature => Biographies, chroniques et correspondances
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Une histoire d'amour et de peur
Deux êtres qui s'aiment et qui s'écrivent. Simone de Beauvoir et Jacques-Laurent Bost. Simone vit depuis huit ans avec Sartre, la philosophie de leur couple est : les esprits sont fidèles, les corps sont libres, aucun secret. Sartre est connu, Simone de Beauvoir beaucoup moins et les éditeurs rechignent alors (nous sommes en 1938) à publier ses textes.
Jacques-Laurent Bost est étudiant dans la classe de Sartre au Havre. Séduit par le maître, il le suit à Paris et s'installe dans son univers. Jacques-Laurent et Simone ont une passion commune : la marche à pied. Parcourant ensemble d'infatigables kilomètres, ces deux personnes apprennent à se connaître, se découvrent, s'apprécient, la suite est connue. Si Simone de Beauvoir ne cache rien de sa liaison à Jean-Paul Sartre, il n'en sera pas de même pour le jeune Bost qui ne souhaite pas que sa promise, Olga Kosackiewicz, apprenne la chose.
Les deux amants s'écrivent énormément, presque tous les jours, racontant tout ce qui leur arrive et le monde qui les entoure, la vie parisienne pour elle, la caserne pour lui.
La correspondance s'interrompt en 1940, une grande partie des courriers de Simone de Beauvoir ayant été perdue. Quel dommage. Il se dégage une telle passion de ces échanges. Sans parler du regard très différent que portent l'un et l'autre sur la vie fin des années trente, sur la guerre qui arrive, sur la culture, sur l'amour, la vie, la mort et la peur qui les tenaille tout les deux, qui les fait écrire dans l'urgence, avec spontanéité. Qu'il semble révolu ce temps où les êtres s'écrivaient de longues et belles lettres enflammées, passaient des heures à détailler les paysages qu'ils voyaient ou les gens qu'ils croisaient.
Ces courriers intimes sont touchants de sincérité et de tendresse, à un point tel qu'on pourrait presque concevoir un sentiment d'impudeur à la lecture de cette correspondance privée.
A souligner, même si cela peut sembler naturel, que dans le présent recueil figurent les courriers et les réponses à ces derniers. Un fil de soie que l'on peut suivre du bout des doigts, ce qui n'est pas toujours le cas dans l'édition de correspondances, où il arrive trop souvent que seul le courrier d'une personne y figure sans que les réponses du destinataire ne soient disponibles. Cela peut être frustrant, ce n'est pas le cas ici.
Quelques notes de Sylvie Le Bon de Beauvoir complètent l'ouvrage ainsi qu'un cahier d'illustrations.
Les éditions
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Correspondance croisée [Texte imprimé], 1937-1940 Simone de Beauvoir, Jacques-Laurent Bost éd. établie, présentée et annotée par Sylvie Le Bon de Beauvoir
de Beauvoir, Simone de Bost, Jacques-Laurent Le Bon de Beauvoir, Sylvie (Editeur scientifique)
Gallimard / Blanche
ISBN : 9782070738014 ; 35,50 € ; 22/04/2004 ; 992 p. ; Broché
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Critique de PtiteMorgane (, Inscrite le 30 mars 2005, 37 ans) - 30 mars 2005
Lever un coin du voile
Critique de Saint-Germain-des-Prés (Liernu, Inscrite le 1 avril 2001, 56 ans) - 3 septembre 2004
Ces lettres nous éclairent aussi sur la situation des soldats au début de la guerre. Il est effrayant de constater leur manque de préparation. A quelques kilomètres du front, les gradés les soumettent encore à des humiliations tout à fait inutiles, à des tâches dont on cherche vainement le sens. Bost décrit plusieurs scènes cocasses, dont beaucoup de résultats de soûlerie générale. Lorsqu’ils sont envoyés au front, en première ligne, ce n’est pas l’affrontement décisif auquel on aurait pu s’attendre. Bost raconte même que les Allemands ont agité un drapeau blanc, indiquant que les coups de feu qu’ils venaient de tirer étaient un accident et non une attaque ! On hallucine !
Reste à savoir si les deux écrivains auraient voulu voir leurs lettres publiées. Je pense que Simone de Beauvoir était assez futée pour détruire ce courrier si elle avait voulu qu’il tombe dans l’oubli. Rappelons qu’elle a adopté Sylvie Le Bon de Beauvoir non pas parce qu’elle entendait entretenir avec elle des relations filiales au sens traditionnel, mais parce qu’elle estimait que Sylvie gérerait au mieux sa production littéraire, il y avait une connivence intellectuelle entre les deux femmes. Grâce à Sylvie, nous avons accès à l’intimité de Simone. Voyeurisme ? Certainement pas, car l’écriture de Simone de Beauvoir reste pudique. Et c’est bien là le caractère exceptionnel de cette correspondance : assurer l’autre de son amour, mais le faire tout en légèreté… On les sent tous deux terriblement impliqués dans la relation, mais ils font preuve de retenue, comme s’ils étaient capables d’être à la fois dans et en dehors de leur histoire, de l’Histoire...
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