Révolutions de J.M.G. Le Clézio

Révolutions de J.M.G. Le Clézio

Catégorie(s) : Littérature => Francophone

Critiqué par Vigno, le 6 août 2004 (Inscrit le 30 mai 2001, - ans)
La note : 8 étoiles
Moyenne des notes : 7 étoiles (basée sur 3 avis)
Cote pondérée : 5 étoiles (41 643ème position).
Visites : 5 630  (depuis Novembre 2007)

Vent, vents, tout est vent

« Ce n’est pas le paradis qui est perdu, c’est le temps avec ses révolutions. » Maurice, Nice, Londres, Mexico, Paris. Cinq lieux éparpillés sur les continents. Une vie d’errances. On s’imagine à tort que le monde fut un jour cloisonné. En fait, les continents n’ont jamais cessé de bouger, quitte à s’entrechoquer. De même, le temps. Comment éviter d’être aspiré dans cette spirale impitoyable? « À chaque seconde, les anciens mystères sont scellés. »

Dans ce long roman, en grande partie autobiographique, Le Clézio mène de front deux (ou même trois) intrigues, celle de Jean Marro étant la principale. Le roman commence avec la guerre d’Autriche qui suit la Révolution. L’ancêtre breton de Jean Marro quitte famille et amoureuse pour participer à cette guerre. Au retour, à la recherche d’un idéal humain qui semble échapper à son pays, il décide de quitter la France avec son amoureuse devenue sa femme. Ils décident de s’établir sur l’île Maurice. Les débuts sont difficiles, mais la famille finit par trouver sa Thébaïde : ce sera Rozilis, un domaine forestier que les Marro exploiteront jusqu’en 1910. Ils en seront expulsés de façon plus ou moins honnête. Révolutions est en partie roman historique, du moins une quête des origines.

Ce récit, celui des ancêtres, c’est la vieille tante Catherine, qui a passé son enfance à Rozilis, qui le révèlera à Jean dans les années soixante. Ici, commence l’histoire principale, celle de Jean, d’origine bretonne par son père et anglaise par sa mère, une histoire qui s’étale sur une dizaine d’années, entre la guerre d’Algérie et Mai 68. Pour éviter le service militaire, Jean prolonge ses études et se rend finalement à Londres pour étudier la médecine pendant quatre ans. De retour à Nice, il rencontre Mariam mais, toujours pour fuir l’Algérie, s’exile à Mexico. Il y passe un an, autre période d’errance, sentimentale et intellectuelle, revient à Paris, retrouve Maria. Bref, Révolutions est aussi un roman de formation.

D’autres vies (intrigues) viennent se greffer à celles résumées ici, dont celles des esclaves noirs à Maurice.

Contrairement à certains critiques, je ne trouve pas que c’est le meilleur roman de Le Clézio, même si je reconnais l’exemplarité du projet. Bien entendu, il faut arracher au temps quelques morceaux d’existence. « Il m’a toujours semblé, comme l’a dit Flannery O’Connor, qu’un romancier doit être porté à écrire sur les premières années de sa vie, où le principal lui a été donné. » Que reste-t-il de cette quête des origines? Peut-on rattraper l’Histoire et son histoire personnelle? Travail inutile, illusion de romancier? « Vent, vents, tout est vent » cite-t-il en exergue

Roman foisonnant, baroque, d’écriture inégale, qui embrasse trop. Son errance, de Londres à Mexico, m’a lassé par moments. Était-il vraiment nécessaire de mêler histoire personnelle et Histoire? Ne suffit-il pas de raconter la première, l’autre surgissant d’elle-même? Ceci étant dit, Le Clézio étant Le Clézio, certains passages sont sublimes, comme celui-ci, à la toute fin, après l’amour avec Mariam : « Et dans la pensée : tout ce qui se défait, se délie, se délite, les obstacles, les habitudes, les souvenirs. Non pas le vide, mais le dénouement. Un air, une eau, lavant, circulant. Les rêves envahissants. La marée. Alors Jean se sentait plus libre. Les fausses peaux, oripeaux, chiffons qu’on agite, tout cela est tombé, il était nu, il n’avait plus de fils attachés aux cheveux, aux membres. C’était donc ça. C’était si simple, après tout. Un moment, juste un moment dans la vie pour être libre. Pour être vivant, sentir chaque nerf, être rapide comme un animal qui court. Savoir voler. Faire l’amour. Être dans le présent, dans le réel. »

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Bien long...

6 étoiles

Critique de Bernard2 (DAX, Inscrit le 13 mai 2004, 75 ans) - 13 décembre 2008

Un avis qui rejoint les commentaires précédents, de Vigno et de Fée carabine. Le livre est très long, mélange de manière confuse deux époques. Et l’Histoire (avec un grand H) est souvent lassante. J’aurais sans doute mieux apprécié avec 150 ou 200 pages de moins, avec deux parties bien distinctes, voire deux tomes. J’ai eu du mal à aller au bout. Bien sûr, il a des très belles pages, Le Clézio oblige. Mais on pouvait espérer mieux.

Une (petite) déception

7 étoiles

Critique de Fee carabine (, Inscrite le 5 juin 2004, 50 ans) - 7 août 2004

J'aime d'habitude beaucoup les livres de Jean-Marie Gustave Le Clézio. Mais, comme Vigno, j'ai été un peu déçue par ce gros roman trop touffu et un peu inégal. On se perd dans le va-et-vient entre histoire et Histoire, et c'est lassant en effet. Je n'ai pas retrouvé dans "Révolutions" la magie de "Désert", de "La Quarantaine" ou de "Poisson d'or". Comme le souligne très justement Vigno, il y a dans "Révolutions" des moments d'une grâce toute Le Clézienne, et les admirateurs inconditionnels de Le Clézio les liront avec grand plaisir. Mais à ceux qui ne le connaîtraient pas encore, je conseille plutôt les livres que j'ai cités plus haut (voir http://www.critiqueslibres.com/i.php/vcrit/?l=3748 pour une critique de "La Quarantaine")

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