L'angoisse du gardien de but au moment du penalty de Peter Handke

L'angoisse du gardien de but au moment du penalty de Peter Handke
( Die Angst des Tormanns beim Elfmeter)

Catégorie(s) : Littérature => Européenne non-francophone

Critiqué par FightingIntellectual, le 30 juillet 2004 (Montréal, Inscrit le 12 mars 2004, 41 ans)
La note : 6 étoiles
Moyenne des notes : 7 étoiles (basée sur 4 avis)
Cote pondérée : 5 étoiles (40 827ème position).
Visites : 9 440  (depuis Novembre 2007)

Sentiments perplexes

Mon admiration pour l'adaptation cinématographique de Wm Wenders m'a poussé à lire le livre. En fait maintenant je crois que l'adaptation cinématographique est une meilleure oeuvre d'art que l'originale.

Joseph Bloch est un monteur et ancien gardien de but au soccer qui se croit congédié et qui, pour ces raisons décide de partir sur une errance (tiens tiens Wenders...) qui le mènera à la débauche et même au meurtre . Chose surprenante, le meurtre occupe une place infime dans l'histoire, bâtie autour des errances de Bloch.

Bloch fait peu, parle peu... un peu comme le Meursault de Camus, mais à sa décharge Meursault envoyait des lignes philosophiques pas piquées des vers. La fin par exemple, je dois l'avouer, dans sa forme littéraire est à en couper le souffle. Les dernières lignes, bourrées de sens, nous donnent la raison de la lecture de son livre.

Son style d'écriture frise le nouveau roman, laissant l’intériorité loin, se contenant du fait & geste.

Errance, ambiguïté, minimalisme, questionnement (pas beaucoup). C'est pas mon bail. Ca manque de direction pour moi.

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Les éditions

  • L'Angoisse du gardien de but au moment du penalty [Texte imprimé] Peter Handke traduit de l'allemand par Anne Gaudu
    de Handke, Peter Gaudu, Anne (Autre)
    Gallimard / Collection Folio
    ISBN : 9782070374076 ; 3,47 € ; 01/10/1982 ; 152 p. ; Poche
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Un personnage qui perd le sens de la réalité ... à moins qu'il ne l'ait trouvé ...

10 étoiles

Critique de Pucksimberg (Toulon, Inscrit le 14 août 2011, 44 ans) - 30 mai 2020

Bloch est un personnage que je ne risque pas d'oublier vite. Il a exercé quelque chose de fascinant sur moi, comme Meursault. Comme Feint, dont je partage complètement le ressenti, j'ai pensé dès la première page du roman à "L'Etranger" de Camus. Le personnage de Handke, ancien gardien de but, désormais monteur se croit licencié de l'usine alors que rien ne lui a été signifié clairement. Il part, erre jusqu'à commettre le crime d'une caissière de cinéma, épisode évoqué très brièvement comme s'il s'agissait d'un menu détail et il part encore.

Dans ce roman, le personnage semble fuir sur un plan géographique, mais cette fuite est aussi intellectuelle. Il semble perdre pied, ne plus avoir d'emprise sur le monde, voire même ne plus comprendre la réalité comme si tout d'un coup un élément faisait exploser le prisme par lequel on regarde le monde. Il répète mécaniquement certains mots qui perdent de leur sens à force de les entendre. Il en vient aussi à remettre en question certains connecteurs logiques. Sa perception du réel semble aussi altérée. Au lieu de voir des feuilles de thé ce sont des fourmis qu'il voit. Ce que le commun des mortels a intégré comme acquis est remis en question dans le ressenti quasi schizophrénique du personnage principal. Il y a même une page dans le roman où des signes et des dessins apparaissent. Bloch a ses sens comme décuplés à certains moments. Les bruits sont amplifiés et le moindre infime son devient un bruit plus violent. Il y a quelque chose de fascinant et d'impressionnant dans ce personnage qui semble lâcher prise comme s'il mourait à cette réalité que l'on accepte tous pour renaître en regardant le monde différemment.

Le style de l'auteur est singulier aussi. J'ai eu des difficultés avec les dix premières pages en trouvant le l'écriture sèche, scolaire et avec des notations factuelles sans véritable lien, puis le sens de la démarche point et la lecture est lancée. Ce n'est pas l'histoire en elle-même qui est captivante, mais surtout le rapport du personnage au réel. Peut-être est-il schizophrène, peut-être souffre-t-il d'un autre mal ... Il est peut-être le reflet de l'homme moderne qui regarde au-delà des apparences et qui se questionne sur les éléments qui constituent notre perception du réel. La métaphore du titre est exploitée à la fin du roman qui conserve malgré tout son caractère mystérieux comme s'il ne souhaitait pas tout livrer aisément. Sans doute est-il possible d'avoir plusieurs niveaux de lecture.

Ce roman a quelque chose de fascinant. Il ne se livre pas facilement et possède la force de ses romans quasiment classiques qui apportent une définition de l'homme moderne et de son rapport au réel. L'écriture possède une force personnelle qui invite à poursuivre la lecture. Elle est en total accord avec ce personnage qui se détache progressivement du monde.

Handke ou le refus de l'interprétation

9 étoiles

Critique de Feint (, Inscrit le 21 mars 2006, 60 ans) - 7 mai 2006

« Le monteur Joseph Bloch, qui avait été un célèbre gardien de but, fut informé, quand il se présenta le matin à son travail, qu'il était congédié. Du moins Bloch interpréta-t-il ainsi le fait que seul le contremaître leva les yeux de son casse-croûte lorsqu'il ouvrit la porte de l'abri où les ouvriers faisaient la pause, et Bloch quitta le chantier. Dans la rue, il tendit le bras, mais jamais la voiture qui le dépassa – qu'il ait ou non tendu le bras pour appeler un taxi – n'avait été taxi. »
Ainsi commence L’Angoisse du gardien de but au moment du penalty, roman d’un jeune auteur autrichien (nous sommes en 1970) déjà connu par ses succès au théâtre, Peter Handke. Marqué par l’œuvre de Samuel Beckett et des auteurs proches de ce que l’on appelé l’absurde, Handke s’inscrit d’emblée dans une réflexion sur le rapport du langage au monde, et sur la déficience de l’un à rendre compte de l’autre. Joseph Bloch, étranger plus étranger encore que l’avait été Meursault près de trente ans avant lui, agit devant nous pour des raisons claires pour lui, voire évidentes, dont le sens, dès la deuxième phrase, nous échappe. Comme dans l’Etranger, cette crise du sens culmine au moment d’un meurtre plus absurde encore que chez Camus. Les objets perdent le peu qui leur restait de signification au point que, dans le texte même, ils finissent, lors d’une dizaine de lignes exemplaires vers la fin du roman, par n’être désignés non plus par des mots mais par des idéogrammes. Ce refus délibéré de toute interprétation peut agacer ceux qui, dans un livre, recherchent l’explication définitive. Pour ma part, il me semble que Handke évite l’écueil auquel se heurte maladroitement Camus dans les toutes dernières pages d’un roman qui, par ailleurs, reste un de nos chefs d’œuvre. Mais ceci est affaire de subjectivité, et dépend du rôle (ou peut-être de l’absence de rôle) que l’on entend faire jouer par la littérature.
Je n’ai pas personnellement suffisamment d’éléments pour mettre en relation la démarche littéraire de Handke (qui, comme le montre l’ancienneté de ce texte, remonte à loin), avec son « Je sais que je ne sais pas » qui, prononcé dans le contexte récent que l’on sait, a profondément et naturellement choqué ceux qui ont suivi de près ce qui s’est passé en Ex-Yougoslavie. J’aurais souhaité l’entendre s’expliquer d’une manière moins sibylline. Ç’aurait peut-être été lui demander de ne plus être Peter Handke.

Sans queue ni tête

2 étoiles

Critique de Nothingman (Marche-en- Famenne, Inscrit le 21 août 2002, 44 ans) - 19 février 2006

Comment se faire piéger par un titre génial? C'est un peu l'histoire de ce livre. Bloch est un ancien gardien de but. Il se croit licencié de l'entreprise dans laquelle il travaille et va mener une vie d'errance. Il va alors commettre les actions les plus incongrues et va même étrangler une caissière de cinéma. Fuite, errance, extravagance. Il finira son parcours lors d'un match de foot lors duquel il observera un gardien stoppera un penalty très mal botté… Voici le résumé de ces 150 pages de vide. L'intrigue y est pour le moins minimaliste voire inexistante. Des pensées bizarres, des descriptions interminables dont on se demande continuellement le sens qu'elles peuvent bien apporter à cet indigeste "gloubiboulga". Quant au style, c'est bien simple, il n'y en a pas! Pendant 150 pages, on a droit à du sujet – verbe – complément en série. Le héros marche, rentre dans un bar, s'assied, se dirige vers le juke-box, choisit un morceau, retourne à la table, mange et part. Très pénible évidemment sur la longueur. On ne ressent que de l'ennui à lire les pérégrinations vides de sens de ce triste sire. Que dire aussi de la quatrième de couverture qui annonce un roman policier alors que la seule référence au genre reste un meurtre gratuit sur lequel on n'insiste même pas. Un quatrième qui nous dit aussi que l'auteur révèle toute sa maîtrise avec ce livre. Ah bon… du non-sens certainement.

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