Le pouce crochu de Fortuné Du Boisgobey
Catégorie(s) : Littérature => Francophone
Un classique du roman populaire de du Boisgobey
Camille Monistrol est fille d'inventeur. Son père a mis au point un système de génération d'énergie qui va assurer leur richesse. Mais voilà, elle apprend cette aubaine le jour même où son père est victime d'un vol et d'un lâche assassinat, sous les yeux de sa fille. De l'assassin, Camille n'a aperçu que la main démesurée au pouce crochu. Courageuse, elle se lance aux trousses du meurtrier, le poursuit jusqu'à la foire, le perd dans une baraque où des saltimbanques exécutent les plus habiles des numéros.
Elle y rencontre Julien Gémozac et Alfred De Fresnay, deux amis dont les conditions privilégiées assurent l'oisiveté. Gémozac lui offre son aide, car il est charmé par cette jeune femme dont il apprend qu'elle est la fille de l'associé de son père, un riche industriel. Mais il lui faudra faire bien des efforts pour séduire la belle dont l'unique objectif est de venger son père.
Du Boisgobey reprend ici des ingrédients qu'il affectionne pour composer son roman : deux amis, un mystère à résoudre, pas de problème d'argent (ou résolus par un deus ex machina quelconque) pour ne pas mettre d'obstacle à l'évolution des personnages et de leur histoire. Cette fois encore, c'est le roturier (riche cependant) qui s'éprend de la belle (pour une fois roturière également, mais riche), tandis que le noble, noceur invétéré, participera à l'intrigue de façon indirecte (encore) avec nonchalance et succès.
On retrouve le Paris du dix-neuvième siècle, les rues, les omnibus, les cabarets (Le père Lunette), l'argot, mais aussi quelques beaux salons. Le mélange beau monde et populace, peut-être l’ingrédient principal du roman populaire.
La traque du meurtrier est crédible, haletante, dépassant les limites de la ville pour s'enfoncer hors les murs, dans les coupe-gorges des plaines entourant la cité.
Franchement je me délecte avec les livres de Du Boisgobey. C'est un voyage dans le temps que ces romans populaires qui mêlent misère et salons de jeux, noblesse déclinante et gens de rien. Comme chez Dickens, on apprend chez Du Boisgobey beaucoup de choses : que le manche à gigot était déjà ringard en 1880 (!), que les omnibus tirés par les chevaux étaient dotés de lumières dans la voiture fonctionnant au gaz, que les cadavres non identifiés étaient exposés dans une morgue près de Notre-Dame et que tout le monde pouvait entrer et reluquer les pauvres corps même s'il n'avait aucun disparu à y venir identifier. Sans compter les grands bals de l'époque (Bullier, par exemple) où se mêlaient les riches et les moins riches, les endroits tranquilles où organiser un duel (car c'était interdit)... Mais j'évoque ici des détails que l'on ne trouve pas dans le Pouce Crochu. Dans ce roman, c'est le monde des saltimbanques, la banlieue nord de Paris, et beaucoup d'argot, que l'on découvre.
Avec cette petite curiosité pour moi qui m'a beaucoup attendrie: le nom de Gémozac, c'est celui d'un petit village où j'ai vécu. Je ne pense pas qu'il existe d'autre Gémozac dans le monde et Du Boisgobey n'avait, a priori, aucun lien familial dans ce village. Alors pourquoi choisir ce nom pour nommer son personnage ? Et comment même en avait-il entendu parler ? Mon idée est que, en grand admirateur de Gaboriau (il le cite d'ailleurs deux fois dans Le Pouce Crochu), il aura entendu parler de Jonzac, ville où Gaboriau est enterré, et aura même, j'aime à le croire, été se recueillir sur sa tombe. Chemin faisant, il aurait pu passer à Gémozac, qui se trouve à une trentaine de kilomètres, ou en voir le panneau. Mais c'est mon interprétation toute personnelle de ce tout petit mystère !
Les éditions
-
Le pouce crochu
de Du Boisgobey, Fortuné
CreateSpace
ISBN : 9781515357704 ; EUR 21,19 ; 05/08/2015 ; 324 p. ; Broché
Les livres liés
Pas de série ou de livres liés. Enregistrez-vous pour créer ou modifier une série