La Vagabonde de Colette
Catégorie(s) : Littérature => Francophone
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La liberté a un prix…
Après m’être envoyé quelques livres bien denses, Colette et son héroïne m’offrent la pause d’une lecture plus facile. Renée Néré, la trentaine, se remet assez mal de son divorce, pourtant vieux de quelques années. Son premier mari présente à peu près tous les attributs que nous, les femmes, détestons. Par exemple, non content de tromper sa femme publiquement, il l’utilise comme « rabatteuse ». Charmant spécimen (rare, espérons-le !) de son sexe… Il y a donc divorce. Renée se lance alors dans une carrière de comédienne-danseuse et écume les cabarets de Paris, quand elle ne part pas en tournée. Elle vit seule, bien sûr : sa liberté chèrement acquise, elle n’est prête à l’abandonner pour qui que ce soit, et certainement pas pour un homme, désormais synonyme de souffrance.
Maxime Dufferein-Chautel ne sait pas ce qui l’attend, pauvre homme, lorsqu’il tombe amoureux de Renée. Il lui fait sa cour, mêlant tout ce dont nous, les femmes, rêvons : respect, tact, tendresse, fougue à certains moments. Et devinez quoi, il est riche en plus ! La perle (rare, ici, il faut bien l’avouer…) ! Que fera Renée ? S’accrocher à sa liberté, ou accepter une vie d’épouse ? La solitude où elle reste inatteignable, ou le risque de souffrir à nouveau ?
Mouais… Bon… Et bien je n’ai qu’à m’en prendre à moi-même : j’avais besoin d’un petit livre reposant, c’est exactement ce que j’ai eu : un petit livre reposant. Et pourtant, c’est bien là ce que je lui reproche. Gentillet, parfois un tantinet au ras des pâquerettes. Ca manque d’ampleur, de noirceur, de grandeur…
Les éditions
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La vagabonde [Texte imprimé] Colette préf. de Nicole Ferrier-Caverivière,...
de Colette, Ferrier-Caverivière, Nicole (Préfacier)
le Livre de poche / Le Livre de poche.
ISBN : 9782253011095 ; 3,00 € ; 01/10/1975 ; 251 p. ; Poche
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Les critiques éclairs (5)
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Un très beau livre
Critique de Zeugma (, Inscrite le 13 mars 2019, 47 ans) - 13 mars 2019
Au contraire, Renée Néré évoque avec beaucoup de pudeur et de délicatesse ses questionnements face à ses choix de vie de femme libre, courageux et en dehors des normes pour l'époque (1910), sans faire de déballage de grands sentiments. Le texte est tout en retenue et en subtilité. A mots couverts, Colette sait à sa manière subtile nous faire entrer dans le monde paradoxal de Renée. Celle-ci fait du Café Concert mais mène une vie retirée, presque austère avec des habitudes de 'Petite Bourgeoise' tout en gardant un esprit libre et finalement aventureux. Renée n'hésite pas à sortir de sa zone de confort pour rester en accord avec elle-même.
Sa description des premiers instants de l'apparition de l'amour, de la passion qui se transforme lorsque la vie à deux commence ainsi que de l'enfer qu'elle a vécu lors de son premier mariage pourraient encore être d'actualité de nos jours. (Willy, pervers narcissique ?)
De plus, ce livre permet d'avoir un aperçu édifiant de la vie des artistes de Music-hall, des femmes seules de l'époque, un peu comme un documentaire.
Le ton est délicat, les mots sont justes, comme à chaque fois chez Colette.
une merveille
Critique de Cyclo (Bordeaux, Inscrit le 18 avril 2008, 78 ans) - 15 août 2011
Renée a décidé de devenir la «vagabonde», libre saltimbanque, dans une sorte de retrait sentimental (lire le roman précédent intitulé "La retraite sentimentale") : « Rien. Non, rien ne me retient ici, - ni ailleurs. Aucun cher visage ne surgira du brouillard, comme une fleur claire émerge de l‘eau obscure, pour prier tendrement : - Ne t‘en vas pas ! »
Pourtant, elle a la nostalgie de la sécurité d'un foyer et de l'amour, et se laisse prendre par la cour admirative de Maxime Dufferein-Chautel, le « grand serin », un riche bourgeois oisif, qui l'a vu à l'Empire-Clichy à Paris, et est fort amoureux d'elle. Mais, déçue par sa précédente expérience conjugale, qui fut un enfer (un mari volage, « l'homme que jamais aucune femme n'a plaqué », disait-il de lui-même, et qui ne pensait qu'à l'argent), Renée connaît trop les aveuglements de l'amour et ne se laisse pas prendre si facilement : « Que sais-je de l‘homme que j‘aime et qui me veut ? Lorsque nous nous serons relevés d‘une courte étreinte, ou même d‘une longue nuit, il faudra commencer à vivre l‘un près de l‘autre l‘un par l‘autre. Il cachera courageusement les premières déconvenues qui lui viendront de moi, et je tairai les miennes, par orgueil, par pudeur, par pitié, et surtout parce que je les aurai attendues, redoutées, parce que je les reconnaîtrai… » Ayant déjà vécu, Renée sait combien la volupté n'est qu'une faible partie de l'amour : « La volupté tient, dans le désert illimité de l‘amour, une ardente et très petite place, si embrasée qu‘on ne voit d‘abord qu‘elle… » Oui, mais après ?
Et surtout, elle craint de perdre sa liberté, en particulier avec un homme si amoureux : « Et qu‘attend-il présentement ? Que je tombe dans ses bras ? Rien n‘étonne un homme épris. » D'ailleurs, ne pense-t-elle pas de lui : « Il ne me veut aucun bien, cet homme-là, - mais il me veut. » Pas mal vu, n'est-ce pas, messieurs ? Et puis, elle a déjà trente-trois ans, elle insiste beaucoup là-dessus : « Peur de vieillir, d'être trahie, de souffrir... »
Et, la tournée terminée, loin de décider de rentrer à Paris pour vivre cet amour, elle rompt avec Maxime : « Cher intrus, que j‘ai voulu aimer, je t‘épargne. Je te laisse ta seule chance de grandir à mes yeux : je m‘éloigne. […] Je t‘abandonne, et, grâce à moi, tu vas peut-être t‘augmenter de ce qui te manque. » Et elle choisit, au moins momentanément la solitude, qu'elle connaît tellement bien : « il y a des jours où la solitude, pour un être de mon âge, est un vin grisant qui vous saoule de liberté, et d‘autres jours où c‘est un tonique amer, et d‘autres jours où c‘est un poison qui vous jette la tête aux murs. » Bien sûr, elle sait ce qu'elle risque, et se laisse parfois aller à un soupçon de regret : « Je ne suis ni meilleure, ni pire que tout le monde, et il y a des heures où j‘aimerais défendre aux autres de s‘amuser quand je m‘embête… » Comme tout cela sonne juste !
J'ai été une nouvelle fois enthousiasmé par Colette, qui relate ici, mais sous forme de roman (il y a une vraie transposition, et ça n'a rien à voir avec nos autofictions d'aujourd'hui), son expérience du music-hall qui a succédé à son divorce d'avec Willy en 1906 : il fallait bien qu'elle gagne sa vie ! Elle crée des personnages ressemblants probablement à ceux qu'elle a connus, mais qui sont réinventés.
La narratrice, débarrassée de l'échec du mariage, ne succombe pas aux conseils insidieux : « Ou bien vous me conseillez un amant, par hygiène, comme un dépuratif ? Pourquoi faire ? Je me porte bien, et Dieu merci ! Je n‘aime pas, je n‘aime pas, je n‘aimerai plus personne, personne, personne ! » Et, ainsi, elle ne ressasse plus ce qui fut un échec, et se contente avec son « grand serin » d'un amour de transition : elle sait que ce dernier la force à se « rappeler, trop souvent, que le désir existe, demi-dieu impérieux, faune lâché qui gambade autour de l‘amour, et n‘obéit point à l‘amour… » Et, en fin de compte, voici ce qu'elle dit : « À force d‘hésiter, je choisis le silence. » Et ce n'est pas si difficile, au fond, c'est la simple continuation de la vie : «L‘isolement, oui. Je m‘en effrayai, comme d‘un remède qui peut tuer. Et puis je découvris que... je ne faisais que continuer à vivre seule. » Comme elle était seule dans le mariage ! Et puis, ça ne l'empêche pas de rêver : « Rien ne mène - je le sais - à l’amour. C‘est lui qui se jette en travers de votre route. »
C'est curieux. Parce que je me suis mis à lire ce roman de Colette, découvert dans la bibliothèque de ma sœur, sitôt après avoir vu le film de Mathieu Amalric, "Tournée", très proche par le fond et même par la forme, vagabond récit d'une tournée. Il s'agit en effet d'une tournée d'artistes assez kitsch, des stripteaseuses “new burlesque”, qui ressemblent assez aux collègues de Renée Néré, et mènent une vie décousue, à la fois belle, sale et laide, mais toujours sincère et solidaire. Et ces pauvres stripteaseuses sont bien comme la vagabonde de Colette, et peuvent dire comme elle : « Me voilà donc, telle que je suis ! Seule, seule, et pour la nuit entière sans doute. »
D'accord...
Critique de Jules (Bruxelles, Inscrit le 1 décembre 2000, 80 ans) - 24 octobre 2004
Par trop légère?
Critique de Tistou (, Inscrit le 10 mai 2004, 68 ans) - 23 octobre 2004
La Vagabonde est un grand coup de mise à nu du désarroi sentimental dans lequel se trouve la COLETTE de l'époque. Largement autobiographique, elle en profite pour décortiquer la situation, peut être pour la dédramatiser? Les hommes n'y ont pas une belle part. Mais il faut aussi replacer ce roman dans le contexte de l'époque. Une femme qui se voulait libérée, qui paye très cher pour se donner les moyens de l'être, ... Passablement novateur non? Plus en tous cas que les coups médiatiques d'une Amélie NOTHOMB, par exemple.
Non, je ne comprends pas trop ce légère, ainsi que le mouais de SGDP. Ca tient largement la route et elle nous fait bien passer cet écartèlement entre sa volonté, (et le prix à payer) et ce à quoi elle pourrait s'abandonner. On sent beaucoup de souffrances dans tout ça, et je ne le qualifierais pas de léger.
Un livre agréable
Critique de Jules 2 (, Inscrit le 11 mai 2004, 80 ans) - 8 juillet 2004
Le prix de cette facilité de lecture ? Il ne me semble pas qu'elle puisse, malgré son grand talent d'écriture, figurer parmi "les grands" de son temps... Par trop légère...
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