Civilizations de Laurent Binet

Civilizations de Laurent Binet

Catégorie(s) : Littérature => Francophone

Critiqué par Veneziano, le 15 septembre 2019 (Paris, Inscrit le 4 mai 2005, 46 ans)
La note : 9 étoiles
Moyenne des notes : 7 étoiles (basée sur 5 avis)
Cote pondérée : 5 étoiles (24 923ème position).
Visites : 3 020 

La conquête de l'Espagne par les Incas

Christophe Colomb ne va pas jusqu'en Amérique et s'arrête à Cuba, la Reine du Groenland se rend, elle, sur ce continent nouveau, et ce sont les Incas qui débarquent en Espagne pour conquérir le pays. Atahualpa, leur Empereur, fils du Soleil ou présumé tel, devient Roi de ce pays et détrône Charles Quint, avec l'appui du roi de France, François Ier, tout en tentant de jouer sur ses rivalités avec Henry VIII d'Angleterre ; puis il intrigue pour être élu Empereur germanique. L'épouse de l'Empereur est mandatée d'une mission diplomatique avec François Ier, qui tourne en attachement sentimental.
La situation se complexifie avec la conquête de la France par le Mexique, ce qui revient à considérer que deux Etats d'Europe occidentale passent sous la coupe d'Empires américains. Cervantès et un Grec s'enfuient à Venise, pour rallier la République, tandis que Michel de Montaigne soutient le nouveau Roi de France, désormais mexicain.

Laurent Binet se complaît dans l'uchronie, après son roman relatif aux motifs de la mort de Roland Barthes, linguiste ayant trouvé une méthode de manipulation politique par le langage, au service de François Mitterrand, candidat à l'élection présidentielle de l'année suivante. Ses hypothèses offrent la possibilité de débattre et discourir à l'envi sur leur probabilité, la manière de les traiter et de refaire l'histoire, donc le monde. L'exercice détient un charme évident et offre un plaisir grisant, presque jouissif. Le style reste simple sans être sec, tout en passant par moment à un lyrisme quasi-emphatique, afin de mieux souligner le mouvement des moult péripéties et rebondissements de l'intrigue, ce qui n'est pas pour me déplaire, je l'avoue. J'ai passé un bon moment avec ce livre qui peut se lire d'une traite.

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Quelle drôle d'histoire !

6 étoiles

Critique de Pascale Ew. (, Inscrite le 8 septembre 2006, 56 ans) - 4 juillet 2022

Laurent Binet retourne l’histoire à l’envers : Et si Christophe Colomb et ses compagnons étaient morts dans les combats en tentant de conquérir l’Amérique ? Et si les Incas avaient récupéré leurs bateaux pour se rendre en Europe ? Atahualpa, pourchassé par son frère Huascar, s’enfuit pour accoster au Portugal. S’alliant avec les mécontents, les bannis et les opprimés et se faisant des alliés grâce à son or, il se rend en Espagne et la conquiert. Fin stratège, il conclut des alliances politiques et étend son empire de plus en plus loin. Au passage, il promulgue la liberté religieuse, encourage la religion du soleil, instaure une plus grande justice sociale et favorise la prospérité et le commerce avec sa patrie natale.
Le jeu des alliances politiques ne cesse de fluctuer tout au long de ce roman rocambolesque et il faut s’accrocher pour se rappeler de tous les personnages en jeu. Cela en devient saoulant ! J’ai eu du mal à entrer dans l’histoire… et à y rester, tant cela semble tiré par les cheveux et invraisemblable. Il faut bien reconnaître que la vraie histoire l’est sans doute aussi, mais tout de même... Je ne peux pas envisager que des sociétés aussi moralisatrices et sévères aient tout-à-coup adhéré à des croyances si différentes des leurs, etc., etc. J’ai eu l’impression que l’auteur introduisait le regard actuel sur la situation du passé pour y insérer notre humanisme et nos évolutions par de trop rapides raccourcis.
Laurent Binet partait d’une idée intéressante, mais je n’ai pas aimé cette succession incessante d’événements, sans description de caractères ni de personnages, sans développement de sentiments quels qu’ils soient. C’est lassant à la longue !
Et je n’ai pas compris ce que venait rajouter la dernière partie.

Sunset invasion

5 étoiles

Critique de Waitforspring (, Inscrit le 28 janvier 2015, 29 ans) - 25 septembre 2020

Une idée de base très intéressante (même si pas forcément originale: cette uchronie a déjà été exploitée dans la BD Huxley, dans le jeu vidéo Crusader Kings 2 au travers de Sunset Invasion, par exemple.) et exploitée avec un parti pris plutôt original; celui d'une personnalité seule qui, au travers de concours de circonstances plutôt incroyables, devient le conquérant de l'ancien monde.

La plume de l'auteur est quelconque. Le sujet a tout pour faire voyager et rêver, pourtant je n'ai pas eu l'impression que la sauce prenait. C'est pourtant vertigineux: la rencontre entre deux mondes, deux humanités, revisitée et réinventée.

Les deux premières parties sont plutôt agréables et mystérieuses cependant (les vikings, puis Colomb.) Le journal d'Atahualpa laisse dubitatif. On a du mal à croire que l'Europe de la Renaissance abandonne si facilement ses codes culturels, sa religion, que ses élites se laissent à ce point dominer et écraser. N'est pas Hernan Cortes qui veut, et la possession de chevaux et d'armes plus sophistiquées chez les indigènes parait un maigre argument dans la balance.
On a du mal à comprendre pourquoi la dernière partie est là.

Même en étant très ouvert à l'idée, le tout parait un peu fragile; le sujet effleuré.

La revanche des Incas

8 étoiles

Critique de Pucksimberg (Toulon, Inscrit le 14 août 2011, 44 ans) - 28 août 2020

Et si les vikings avaient apporté le fer en Amérique du sud ? Et des anticorps ? Et voilà que Laurent Binet modifie un élément historique et imagine ce qui s'en serait suivi. Cette uchronie est jouissive à plusieurs égards et permet de revenir sur une époque fascinante en en modifiant de nombreux paramètres.

Le roman se compose de quatre parties : la première est conçue comme un récit fondateur islandais avec une saga nordique qui explique les voyages vikings. Ensuite, le lecteur découvre un partie du journal de bord de Christophe Colomb qui n'a pas découvert l'Amérique. La troisième partie, la plus ample, concerne les chroniques d'Atahualpa et la venue des Incas dans le Nouveau Monde, l'Europe. La quatrième se focalise sur un célèbre écrivain espagnol qui a engendré une figure littéraire célébrissime.

Cette construction fait sens et permet d'expliquer comment Atahualpa et ses hommes ont pu conquérir de nombreuses contrées. Le roman est conçu avec intelligence et s'appuie sur des faits réels. De nombreuses figures historiques sont évoquées et deviennent des personnages du roman en prise avec cette empereur de la religion du Soleil. Certains artistes de Renaissance italienne sont aussi acteurs dans ce roman qui bouleverse nos repères avec parfois une certaine ironie. On croise aussi des écrivains célèbres que je ne souhaite pas nommer afin que les futurs lecteurs puissent avoir la surprise et le plaisir de les découvrir.

Laurent Binet joue avec notre culture aussi bien sur le plan historique, que religieux ou littéraire. Lorsqu'il parle du tremblement de terre à Lisbonne ou de l'inquisition, comment ne pas penser à Voltaire et à "Candide" ? Il y a quelque chose d'excitant dans cette façon de détourner l'Histoire et d'en proposer une autre version qui saura nous interroger sur notre monde. Les Incas ne seront peut-être pas bien différents de nous au sujet de l'esprit de conquête ...

Ce roman est agréable à lire, documenté tout en ne négligeant pas le plaisir du lecteur.

Le Soleil se lève à l'ouest

8 étoiles

Critique de Elko (Niort, Inscrit le 23 mars 2010, 47 ans) - 16 janvier 2020

S’il y a bien un épisode saisissant de l’histoire de l’humanité c’est bien cette poignée de conquistadors qui renversa un puissant empire sud-américain. Dans cette uchronie, Laurent Binet fait basculer l’histoire : quelques amérindiens traversent l’océan et bouleversent l’échiquier européen. Et pas n’importe lequel, celui de Charles Quint, de François 1er et de la Réforme.

L’auteur revisite les genres du récit historique en enchaînant saga nordique, journal de bord, chroniques et roman d’aventure pour retracer les événements qui rendent possible l’inconcevable.

C’est malin, savoureux, bien tenu et Binet ne tombe pas dans la facilité. Un très bon moment de lecture.

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