Les gratitudes de Delphine de Vigan

Les gratitudes de Delphine de Vigan

Catégorie(s) : Littérature => Francophone

Critiqué par Veneziano, le 14 avril 2019 (Paris, Inscrit le 4 mai 2005, 46 ans)
La note : 8 étoiles
Moyenne des notes : 8 étoiles (basée sur 7 avis)
Cote pondérée : 6 étoiles (3 543ème position).
Visites : 3 287 

Accompagner les personnes âgées dépendantes

Micha est installée en maison de retraite. Elle reçoit la visite de sa fille Marie, apprécie la compagnie de Jérôme, le jeune orthophoniste qu'elle trouve beau. Elle semble accompagnée au mieux dans sa fin de vie ; toutefois, elle ne vit pas au mieux cette phase d'existence. Elle confond et perd les mots, s'en rend compte, culpabilise de ne plus servir à rien et rêve que la directrice vienne lui reprocher de devenir un fardeau, pleinement à charge. Sa survie à la traque de la Seconde guerre mondiale la ronge, n'ayant pas revu des proches ni n'ayant pu remercier le couple qui l'a hébergée et sauvée.
Ce roman doux-amer est truffé tant de dialogues que de tendresse triste. Emouvant et touchant, il illustre le phénomène de la dépendance, de la déchéance perçue. Non moralisateur, plus centré sur la description et l'échange, ce roman reste avant tout rude mais beau, l'auteure appréciant revenir au traitement fictif de l'action sociale. Je le recommande.

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Merdi

9 étoiles

Critique de Marvic (Normandie, Inscrite le 23 novembre 2008, 65 ans) - 3 mai 2022

Michka Seld perd ses mots. Doucement . Mais c’est la perte de l’équilibre qui rend inévitable son départ pour l’Ehpad.
" Vieillir, c’est apprendre à perdre. ...et plus rien ne figure dans la colonne des profits"
Perdre la mémoire, ses repères, l’équilibre, ses mots, la vue, le sommeil, la notion du temps, l’ouïe, la boule.

Sa vie est racontée par Jérôme, l’orthophoniste et par Marie, jeune femme très proche, que Michka, sa voisine accueillait quand la mère de l’enfant n’était pas capable d’en prendre soin. Des liens se sont tissés, se renforçant au fil des années.
On suit Micka dans sa détresse de voir les mots s’échapper, les mots remplacés, puis de moins en moins de mots.
Malgré les efforts et la patience de Jérôme.
"Je suis orthophoniste. Je travaille avec les mots et avec le silence. Les non-dits. Je travaille avec la honte, le secret, les regrets. Je travaille avec l’absence, les souvenirs disparus, et ceux qui ressurgissent, au détour d’un prénom, d’une image, d’un parfum. Je travaille avec les douleurs d’hier et celles d’aujourd’hui. Les confidences.
Et la peur de mourir."

J’ai beaucoup aimé le personnage de Jérôme dont je me suis sentie proche ; dans sa manière de voir derrière chaque personne âgée, le jeune qu’il a été, l’enfant, l’adolescent. Comme lui, j’imagine quand je vois une personne précédée de son déambulateur, les premiers pas de l’enfant qui a réjoui peut-être ses parents, les premiers pas de danses dans les bals de village…
L’autrice avec toujours autant de sensibilité écrit un livre très touchant, arrivant même à nous faire sourire dans ce passage appréhendé de notre vie.
Beaucoup d’émotion dans ce très joli et délicat roman.

Une écriture qui se fait oublier pour un sujet difficile

8 étoiles

Critique de Mimi62 (Plaisance-du-Touch (31), Inscrit le 20 décembre 2013, 71 ans) - 2 janvier 2021

Un pur hasard fait que j'ai lu à deux semaines d'intervalle des ouvrages traitant de ce thème.
Dans les deux cas, j'ai été touché par la simplicité de l'écriture (et du dessin car l'autre ouvrage est une BD "Le plongeon"), l'observation, l'absence de misérabilisme, le respect des personnes.
L'écriture très simple, sans effets, apporte toute la simplicité, toute la pudeur nécessaire, elle se fait oublier pour ne laisser place qu'à cette descente inéluctable.
Cela n'est pas un témoignage-reportage de la situation des EHPAD. C'est un contexte, un prétexte à aborder cette disparition progressive de la mémoire, des mots et des peines que cela entraîne pour la personne comme pour ceux qui l'entourent.
Tout cela entraîne beaucoup d'empathie pour ces trois acteurs de l'histoire.

Se noue à cela son questionnement sur ce qui s'est passé durant son enfance pendant la guerre. Elle souhaite retrouver ceux qui l'ont accueillie à cette période difficile.
Cela pourrait apparaître anecdotique mais je ne trouve pas, c'est la nécessité de savoir où était le début, pour pouvoir finir. Je pense que ceux qui vivent l'inconnu de leurs origines doivent mieux appréhender cet aspect de l'histoire.
Un joli roman, presque réconfortant, sur un sujet difficile et douloureux.

Quand tout se perd

8 étoiles

Critique de Elko (Niort, Inscrit le 23 mars 2010, 47 ans) - 30 juin 2020

Michka vieillit. Elle intègre une maison de retraite où commence son dernier combat, celui contre l'inéluctable déliquescence de ses capacités. Quand même nos mots nous abandonnent que reste-t-il de nous?
Marie, qu'elle a recueillie lors de son enfance difficile et Jérôme, son orthophoniste, la soutiennent, gardent le lien, entretiennent un dernier espoir, un dernier horizon : celui de remercier ceux qui ont compté.

Delphine de Vigan nous offre un moment délicat, émouvant et effrayant. Qui fatalement résonne pour tous.

Schtroumpf triste

5 étoiles

Critique de Pacmann (Tamise, Inscrit le 2 février 2012, 59 ans) - 3 mars 2020

Un court roman de l’autrice du formidable “Rien ne s’oppose à la nuit” qui évoque la fin de vie et la déchéance de Michka, une femme qui souffre d’aphasie, qui perd sa dignité et, malgré son handicap tentera de retrouver ceux qui l’ont aidée à se cacher pendant la guerre.

Cela demande un effort à l’instar de Marie et Jérôme, les deux personnages qui l’accompagnent au cours de ces derniers mois dans sa maison de retraite.

Le style adopté, soit le discours d’un personnage qui utilise un mot pour l’autre constitue un petit défi pour le lecteur sans que cela ne fasse vraiment rire vu le contexte.

On reste aussi dans certains clichés, en particulier celui de l’enfant juif caché qui tente de renouer avec son passé. Si l’intention est excellente, il est difficile de suivre le discours et les dialogues.

En conclusion, une lecture agréable, qui peut émouvoir, mais certainement pas inoubliable.

Mercitude

8 étoiles

Critique de Pascale Ew. (, Inscrite le 8 septembre 2006, 56 ans) - 10 juin 2019

Michka est une vieille dame. Elle vient de tomber chez elle et ne peut plus vivre seule. Elle n’a pas d’enfants, mais Marie qui lui en tient lieu car elle l’a gardée dans son enfance alors qu’elles vivaient dans le même immeuble. Mais Michka ne veut pas être une charge et donc habiter chez Marie. Alors elle entre en maison de repos… où elle rencontre Jérôme, un orthophoniste au grand cœur, qui l’apprivoise. Car Michka perd les mots. Petit-à-petit. Le combat est inégal. Malgré l’aide de Jérôme et toute la bonne volonté du monde, ils s’échappent et s’enfuient.
L’auteure n’élude pas les affres de la vieillesse, de la déperdition ; au contraire, c’est le thème de son roman. Mais elle insiste sur ce que nous devons aux « vieux » (« Vous dites bien « les jeunes », non ? Vous ne dites pas les « personnes jeunes » ? ») et sur l’urgence des mercis à dire. Elle en profite pour dénoncer certains mauvais traitements ou comportements de soignants, par exemple dans la personne d’une directrice qui « recrute » ses patients en leur faisant passer une interview pour évaluer leur possibilités d’évolution et de rendement et qui revient régulièrement hanter Michka.
Ce roman est une lecture agréable, se lit très vite, passe un peu trop vite. Les personnages sont touchants de vérité.
Les confusions verbales de Michka donnent lieu à des mots cocasses et permettent une grande liberté à l’auteure qui en joue (ex. : « résistant » pour « résident », « fauteuil croulant »…).

Merci !

10 étoiles

Critique de Faby de Caparica (, Inscrite le 30 décembre 2017, 62 ans) - 10 juin 2019

"Gratitudes" de Delphine de Vigan (173p)
Ed. JC Lattès

Bonjour les lecteurs ….
Quel plaisir de retrouver Delphine de Vigan.
Dans son précédent roman " Les loyautés", l'auteure abordait le problème de l'alcoolisme chez les ados
Cette fois, elle nous plonge dans les méandres de la vieillesse.
Michka est une petite vieille qui commence à perdre ses mots et son autonomie.
Pour sa sécurité, elle se retrouve en Ehpad.
Très vite, la descente dans l'oubli des mots s'accélère, la vie commence à s'échapper, l'effroi s'installe puis la résignation.
Nous suivons Marie, jeune femme proche de Michka, et Jérôme son orthophoniste
Tous deux assistent à la chute de Michka de façon impuissante.
Il reste cependant un dernier geste que la vieille dame veut accomplir.
Un merci à transmettre, une gratitude, une reconnaissance.
Delphine de Vigan nous met en face du problème de la vieillesse, de leur accueil en EHPAD qui n'est pas toujours très rose, mais surtout, elle nous met face à notre passé.
Prenons le temps d'analyser nos douleurs, de les accepter.
Apprenons à pardonner si il le faut , et surtout à dire merci.
"Merci", ce joli nom employé de façon machinale, plusieurs fois par jour.
" Merci" ce petit mot automatique.
Réapprenons à dire un "Vrai merci", aux personnes aimées, celles qui ont compté.
Ce petit mot de 5 lettres qui peut nous éviter les regrets avant qu'il ne soit trop tard.
Ce roman est à la fois triste et drôle.
Nous sourions des mots emmêles de Michka et notre cœur se serre face à cette vieillesse désemparée.
Prenons le temps de dire MERCI et d'exprimer notre gratitude à ceux que nous aimons. Le temps est inflexible et passe bien trop vite.
Loin de sombrer dans le pathos, ce court récit nous emmène au fond de nous-même
MERCI Madame de Vigan !

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