Trois chemins d'écolier : Tardive vengeance de Ernst Jünger
(drei Schulwege)
Catégorie(s) : Littérature => Européenne non-francophone
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Vengeance tardive
Wolfram, double transparent de Jünger, est un écolier un peu dissipé dont la plus grande joie consiste dans les haltes qu’il peut s’octroyer sur le chemin de l’école pour observer les galets du lac et la nature. Le garçon , lecteur passionné de livres d’aventures, perd tous ses moyens quand il doit expliquer ses retards en arrivant à l’école. Son nouveau professeur de mathématiques, qui transfère sur ses élèves son mal de vivre et qui a pris Wolfram parmi ses bêtes noires, intensifie la période de troubles et d’absences du jeune écolier…
La famille fait intervenir un médecin, qui a la sagesse de rassurer les parents et de ne rien faire. Les terreurs disparaissent bientôt avec les sujets qui les avaient suscitées.
Dans ses trois chemins d’écolier, Jünger nous offre une promenade dans ce que fut l’atmosphère de l’Allemagne au début du vingtième siècle par des détails et des dialogues qui en disent davantage que de longs discours, mais aborde surtout les troubles et les appréhensions de l’enfance, thème largement universel.
Comme toujours chez Jünger la description poétique est plus riche que toute théorie. Le ton éminemment personnel tombe en accord avec le souvenir des insatisfactions, ressentiments ou frustrations qui nous agitaient lors de nos années d’école et pour lesquels nous n’avons souvent trouvé que bien des années après, - tout enjeu ayant disparu!- la répartie à l’esprit d’escalier qui nous tourmentait alors.
Les éditions
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Trois chemins d'écolier : Tardive vengeance
de Jünger, Ernst Hervier, Julien (Traducteur)
C. Bourgois
ISBN : 9782267017519 ; EUR 13,00 ; 11/02/2005 ; 92 p. ; Broché
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Les angoisses de l'enfance
Critique de Eric Eliès (, Inscrit le 22 décembre 2011, 50 ans) - 25 avril 2023
Les trois chemins d’écolier, qui donnent son titre au recueil, décrivent l’itinéraire de la petite école au lycée. L’enfance, et plus encore l’adolescence, fut une période de souffrances suscitées par l’intransigeance de professeurs reportant sur leurs jeunes élèves la rancœur des frustrations accumulées. Wolfram fréquente en effet des établissements dont les professeurs, malgré leurs compétences, n’ont pu accéder à des postes prestigieux en université ou ont été sanctionnés (comme Hilpert, professeur de mathématiques brillant mais devenu alcoolique après le départ de sa femme). Enfant intelligent et doté d’une excellente mémoire, Wolfram est néanmoins pris en grippe par ses professeurs et ses camarades, en raison de son caractère solitaire et presque mutique. Wolfram semble n’avoir aucun ami et ne pouvoir discuter qu’avec ses parents et ses grands-parents ; le reste du temps, il vit perdu dans ses pensées, contemple la nature (insectes, plantes, pierres) ou dévore un livre, essai ou roman (la couverture du livre, surprenante au premier abord, représente l'imaginaire d'un enfant rêvant d'aventures, d'indiens et de cowboys - néanmoins, la première lecture qui marque le jeune Wolfram est Robinson Crusoé). L’école le terrorise, au point qu’il commence à connaître des crises d’anxiété qui se traduisent par des retards fréquents, des bégaiements, de l’insomnie (qu'il peuple de conversations imaginaires avec les personnages de ses lectures), des moments d’égarement (au risque de se faire renverser en pleine rue par une carriole) et même de l’incontinence (y compris diurne), provoquant la vive inquiétude de sa famille... Ses parents vont alors consulter un médecin, le Pr Edelstein, qui va les rassurer et suivre l’enfant pendant plusieurs années ; un peu fasciné par la personnalité de l'enfant, il sera le premier à comprendre sa fragilité psychologique, qu’il attribue à un excès d’imagination et de sensibilité attisé par un excès de lecture. Peu à peu, Wolfram va surmonter ses angoisses et devenir un adolescent toujours solitaire mais capable de s’affirmer, fût-ce à coups de poing avec ses camarades de classe qui ne l’apprécient toujours pas. Le récit s’achève avec un étonnant discours de Wolfram, qui monte sur l’estrade pour régler ses comptes avec son professeur et l’ensemble de la classe…
Ce livre, qui se lit rapidement, brosse un beau portrait psychologique d’enfant et d’adolescent, où chaque lecteur retrouvera, comme le souligne avec justesse la critique principale de Kostog, un reflet de ses angoisses de jeunesse. Ce portrait est aussi instructif pour les lecteurs familiers de Junger, qui n’imaginaient probablement pas Ernst Jünger, auteur de « Orage d’acier » et officier impétueux ayant combattu en première ligne tout au long de la première guerre mondiale, en petit garçon solitaire, fragile et terrorisé par ses professeurs au point de déféquer dans son pantalon... Il décrit également, à petites touches subtiles, l’ambiance de l’Allemagne au début du vingtième siècle, dénonçant par exemple en quelques mots l’antisémitisme auquel est confronté le Pr Edelstein.
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