Mémoires d'une jeune fille rangée de Simone de Beauvoir
Catégorie(s) : Littérature => Biographies, chroniques et correspondances
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Rangée ? Subversive, oui !
La première impression qui frappe le lecteur, c’est la netteté des souvenirs de Simone de Beauvoir : elle remonte jusqu’à ses trois ans et analyse avec une précision méticuleuse ses actes et pensées, et va ainsi jusqu’à ses vingt ans et quelques (ce qui correspond à la rencontre avec Sartre).
Simone, loin d’avoir un regard indulgent sur elle-même, se dépeint parfois assez durement. On apprend que vers trois ans et demi, elle piquait des colères bruyantes, des crises violentes. Rangée, elle l’était cependant, en tout cas pendant un certain temps. Elle adhère sans broncher au catholicisme exigeant de ses parents. Plus tard, les trop nombreuses incohérences qu’elle relève entre ce que la religion prescrit et ce que font réellement les croyants, la feront douter et puis tout bonnement rejeter la foi. Elle n’échappe pas au complexe d’Œdipe : petite fille, elle voue une admiration immodérée à son père. Là encore, en grandissant, elle s’apercevra que tous les côtés de son père ne sont pas glorieux.
C’est renversant de voir l’évolution rapide de ses pensées, et la construction de sa personnalité. Elle a toujours lu énormément (d’abord des lectures qui ont reçu l’imprimatur de ses parents, puis les auteurs interdits) et très jeune, elle écrit déjà des petites histoires. « Je ne savais trop si je souhaitais plus tard écrire des livres ou en vendre mais à mes yeux le monde ne contenait rien de plus précieux. » Ses lectures jouent un rôle dans son évolution, suscitant toujours de nouvelles questions, de nouvelles remises en question. On sent très tôt la volonté de se construire elle-même (existentialiste, déjà ?) : « Tel était le sens de ma vocation : adulte, je reprendrais en main mon enfance et j’en ferais un chef-d’œuvre sans faille. Je me rêvais l’absolu fondement de moi-même et ma propre apothéose » ; « Pour de vrai, je ne me soumettais à personne : j’étais, et je demeurerais toujours mon propre maître ». Lorsqu’elle découvre qu’elle ne croit plus en Dieu, elle déclare : « la littérature m’assurerait une immortalité qui compenserait l’éternité perdue ». Adolescente, le sentiment qui domine chez Simone, c’est la solitude. Elle passe constamment d’un sentiment de vanité du monde, de son existence et de tout ce qu’elle pourrait y inscrire comme actions, à un grand enthousiasme. Vers l’âge de vingt ans, ne supportant plus ces états d’âme qui l’emmenaient très haut et très bas, elle arrive à une certaine stabilité.
Elle consacre quelques belles pages à son amitié avec Zaza. Zaza qui a elle-même une destinée lourde à porter. Le livre se clôture sur sa mort, qui dans le souvenir de Simone est liée à une forme de culpabilité : « Ensemble nous avions lutté contre le destin fangeux qui nous guettait et j’ai pensé longtemps que j’avais payé ma liberté de sa mort. »
Intellectuellement, son parcours n’a rien à envier aux plus grands. Elle est par exemple reçue deuxième en philosophie générale, derrière Simone Weil… Elle cumulera deux années en une, histoire de hâter son indépendance. Pendant ces années d’étude, elle est admise dans le cercle très fermé composé de Sartre, Nizan et Herbaud pour préparer l’oral de philosophie. Pour connaître l’évolution de sa relation avec Sartre, il faut lire le deuxième volet de ses mémoires : « La Force de l’âge »…
Les éditions
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Mémoires d'une jeune fille rangée [Texte imprimé] Simone de Beauvoir
de Beauvoir, Simone de
Gallimard / Collection Folio
ISBN : 9782070367863 ; 4,92 € ; 08/02/1972 ; 502 p. ; Poche
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Les critiques éclairs (12)
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Sortir d'un milieu conservateur pour s'ouvrir et s'élever
Critique de Veneziano (Paris, Inscrit le 4 mai 2005, 47 ans) - 27 décembre 2018
Ces mémoires de jeunesse lui permettent de retracer, avec moult détails, probablement excessifs, une enfance cossue, mais sans excès de luxe, un entourage certes aimant mails réduisant souvent à un carcan. Le conservatisme de son père l'a encouragée à évoluer et chercher une voie plus juste. De ce monde à part, daté et désuet, il est donc possible d'en comprendre beaucoup de choses.
Lourd !
Critique de Obriansp2 (, Inscrit le 28 mars 2010, 54 ans) - 3 janvier 2016
Les Mémoires d'une jeune fille rangée
Critique de Jingyan.zhang (, Inscrite le 11 février 2015, 31 ans) - 11 février 2015
La construction d'une intellectuelle
Critique de Millepages (Bruxelles, Inscrit le 26 mai 2010, 65 ans) - 29 octobre 2010
On a l'impression que dès le plus jeune âge Simone disséquait, analysait ce qui lui arrivait pour y trouver un sens.
Je me suis d'ailleurs franchement demandé si elle avait vraiment eu une enfance, tant on a l'impression qu'elle n'a jamais été insouciante.
On sent en tout cas que ce personnage hors norme a souvent douté, parfois jusqu'au désespoir.
Bien avant de commencer à écrire, elle a eu la conviction qu'elle avait des choses à dire qui pourrait servir l'Humanité et donc qu'elle devait le faire. Une sorte de mission.
Intemporelle
Critique de Marvic (Normandie, Inscrite le 23 novembre 2008, 66 ans) - 14 juillet 2009
D'abord une enfance choyée, heureuse (Cela m'a rappelé le Val de grâce de Colombe Schneck avec presque un siècle d'intervalle!), puis l'adolescence et les grands changements qui l'accompagnent , la rébellion contre l'ordre imposé, contre les décisions arbitraires des parents.
Puis l'envie de vivre autre chose, cette soif de savoir , de comprendre, magnifique.
Quand on replace ses succès dans le contexte de l'époque -aucune émancipation de la femme, une société figée- on n'en est que plus admiratif pour la démarche intellectuelle de Simone de Beauvoir.
Ajoutons à cela une écriture magnifique, de belles phrases , un vocabulaire choisi, c'est un vrai bonheur de lecture que Simone de Beauvoir nous fait partager.
Le roman de l’intranquillité
Critique de Béatrice (Paris, Inscrite le 7 décembre 2002, - ans) - 5 octobre 2008
J’ai tenté de lire ensuite la Force des choses, mais j’ai abandonné au bout de cent pages. Quelques pépites se noient dans la profusion de détails insignifiants.
Une écriture minutieuse
Critique de Klimt (, Inscrite le 13 janvier 2006, 53 ans) - 11 juin 2006
Tout au long de ces années, elle nous décrit son évolution, ses relations avec ses amis, son goût fervent pour la lecture, ses études et aussi les premières rencontres avec Sartre.
J'ai beaucoup aimé ce livre si bien écrit. Elle a réussi à nous faire comprendre le pourquoi de ses évolutions à travers les livres et aussi grâce à certaines rencontres.
LE livre...
Critique de Simone (, Inscrite le 31 janvier 2006, 61 ans) - 31 janvier 2006
J'ai lu.
Chaque parole était juste, chaque mot... la bonne élève dans son carcan.. la peur ... la douleur.. les envies interdites... la religion ... la mort..
livre-psychanalyse....
J'ai lu tout Beauvoir pour retrouver cette intimité de perceptions.
La solitude est toujours là...
Une révolution de velours : bouleversant
Critique de Ulrich (avignon, Inscrit le 29 septembre 2004, 50 ans) - 10 décembre 2004
Quand cette éducation se confond avec une société bien pensante, moraliste, misogyne, catholique comme l’était cette France d’entre deux guerres, la révolte menée par cette jeune fille rangée est encore plus remarquable.
Elle se sépare de la religion après l’avoir éprouvée. Elle scie chaque pilier pour arriver à la certitude que dieu n’existe pas.
Et puis il y a son miroir, Zaza, dramatique Zaza. Elle qui veut mais peut moins. Elle qui se révolte mais les inconscients inculqués par sa mère sont plus forts.
Simone s’émancipe, Zaza doute.
Simone est libre, Zaza meurt.
La dernière phrase, rien que celle-là !
Et puis bien sûr, il y a l’amour ! Libre arbitre, choix imposé, choix auto persuadé, les pires. Simone et Zaza doutent. Elles éprouvent, elles veulent le vivre cet amour.
Simone rencontrera JP Sartre.
Zaza, elle ne pourra vivre son amour.
Enfin, il y a SAINT GERMAIN, la cité u ; Juste imaginer Nizan, JP Sartre et Simone de Beauvoir dans une chambre U préparant l’agreg. C’est magique, frissonnant d’envie. L’envie d’y être, ne serait-ce qu’un instant pour les écouter tous les 3, ces trois monstres de la littérature.
Que de magie dans ce livre, encore si moderne, bouleversant…
Réponse à la question de Senni
Critique de Jules (Bruxelles, Inscrit le 1 décembre 2000, 80 ans) - 14 octobre 2004
C'est vrai que ce livre est superbe et de Beauvoir un écrivain d'une autre envergure que Sagan et notre Amélie...
Impressionnant!
Critique de Fee carabine (, Inscrite le 5 juin 2004, 50 ans) - 14 octobre 2004
Impressionnant, oui, c'est le mot, par la lucidité et la volonté d'indépendance dont la toute jeune Simone de Beauvoir fait preuve tout au long de ces pages. Emouvant aussi lorsqu'on mesure le prix à payer pour se forger une identité propre dans un milieu qui ne tolère pas ceux - et surtout celles - qui cherchent à se singulariser: une grande solitude dont la jeune Simone a manifestement souffert à la fin de son adolescence et pendant ses premières années d'étudiante.
Merci à Saint-Germain-des-Prés - et aux autres - pour cette découverte. C'était ma première rencontre avec le "Castor", ce ne sera sans doute pas la dernière!
et après?
Critique de Senni (, Inscrit le 6 août 2004, 45 ans) - 6 août 2004
Et ce livre qui se termine sur la mort de l'unique amie... Je n'y ai vu que le traumatisme profond de Simone concernant la mort... elle qui criait et s'arrachait les cheveux quand elle pensait à la mort... Il me semble que cette frayeur, elle ne l'a pas surmontée, même avec Sartre, même avec l'existentialisme.
Au fait, s'est-elle mariée avec lui? juste par curiosité...
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Simone de Beauvoir | 17 | Saint-Germain-des-Prés | 20 février 2013 @ 20:34 |
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