L'Habitudes des bêtes de Lise Tremblay

L'Habitudes des bêtes de Lise Tremblay

Catégorie(s) : Littérature => Francophone

Critiqué par Libris québécis, le 24 avril 2018 (Montréal, Inscrit(e) le 22 novembre 2002, 82 ans)
La note : 8 étoiles
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La Chasse à l'orignal

Quand une meute de loups se pointent aux abords d’un village, la population ne se sent pas particulièrement menacée. Depuis fort longtemps, elle a appris à composer avec l’espèce. Mais les chasseurs sont fort contrariés par leur présence en raison des ravages qu’ils causent au sein du cheptel des orignaux (élans). Le partage du butin est exempt des mœurs des amateurs de la cynégétique. On s’organise donc pour les piéger ou les faire fuir.

Le clan Boileau se réserve cette tâche aux dépens du reste des villageois. Il frappe d’interdiction la venue des intrus sur son soi-disant territoire qui appartient tout de même à la couronne (État). C’est donc une terre publique à laquelle il refuse l’accès. Comme des mafieux arrogants, on défie ceux qui auraient même l’intention de s’y rendre pour chasser. Ces derniers verront leur bâtiment de ferme incendié s’ils ne manifestent pas le désir d’obtempérer à l’ordre qu’on leur intime sans même le formuler. C’est une loi tacite.

Fuyant sa femme et sa fille, le dentiste Benoît Lévesque vient s’installer dans ce village du Saguenay au moment même où l’on se prépare à l’ouverture de la chasse. Il constate rapidement que la campagne se confine en deçà des grands axes de l’anonymat des grandes villes. Chacun doit s’inscrire dans le créneau prévu. En fait, c’est la solitude qui prime sur la convivialité espérée. Chacun des personnages se mure dans sa cabane au Canada. Les relations se limitent à quelques-uns qui vivent sous le même spectre, en l’occurrence celui de la mort. La vieille Mina, une octogénaire, prépare la sienne en refusant toute médicamentation; le dentiste attend celle de son chien auquel il est fort attaché. Heureusement qu’une amitié très virile le lie à Rémi qui a repris la ferme de ses parents pour y finir ses jours. Comme des oiseaux qui se cachent pour mourir, ils filent des jours sombres à l’abri des indiscrétions. Mais, dans un bled perdu, tout se sait. On vit en somme avec une épée de Damoclès sur la tête.

N’empêche que la vie continue. The show must go on, disent les Anglais. On naît, on rame à contre-courant et on meurt. Le cycle est parsemé tout de même de certaines joies. La fille caractérielle du dentiste trouve enfin sa voie, le médecin et le vétérinaire de l’endroit font preuve de générosité, quelques amitiés se tissent avec force.

L’auteure a tracé la ligne de nos humbles vies. Le noir et le blanc se recoupent selon le rythme des fins dernières. Belle méditation sur l’existence. Une méditation qui repose sur la simplicité de l’écriture à la manière de Jacques Poulin. Le glamour est loin de mettre en relief les lois qui régissent l’humanité. Comme Edward Hopper en peinture, Lise Tremblay sait concocter le modeste quotidien avec éloquence.

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