Cinq photos de ma femme de Agnès Desarthe
Catégorie(s) : Littérature => Francophone
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Peur de mourir
Voici une histoire qui m'interpelle profondément. Non par sa qualité littéraire (Agnès Desarthe écrit bien mais je l'ai connue en meilleure forme), mais par sa fin.
Max Opass (tiens, Opass, comme le nom de famille de Violette Opass dans "Un secret sans importance" de la même Agnès Desarthe. Oubli, volonté, coïncidence ?) a perdu sa femme il y a un peu plus d'un an. Son fils vit à La Paz et sa fille à Tokyo, ils ne se voient presque jamais mais s'écrivent souvent. Max a 80 ans, toujours en verve, il ne s'ennuie pas vraiment mais sent la présence de sa femme Telma autour de lui en permanence, ça finit par le déranger. Alors Max se dit que ça serait pas mal de fixer cette ombre, ce fantôme, en commandant un portrait de son épouse défunte réalisé à partir de cinq photos d'elle prises à des époques différentes. Max parcourt les pages jaunes, sélectionne quelques artistes dont le nom lui plaît, se rend chez eux, leur parle, passe commande et s'interroge de plus en plus sur le sens de la vie et de l'existence.
A la fin, Max récupère les portraits, aucun ne correspond à ses volontés, il sait que jamais il ne pourra emprisonner sa femme sur une toile, c'est dans sa tête et dans son coeur qu'elle réside désormais.
Ce texte est beau, les trois quart du récit s'écoulent comme un long fleuve tranquille sur lequel nous assistons aux petites péripéties de la vie de Max (sa montre cassée, sa voiture en panne, son club de bridge, son charme toujours agissant, etc.). A travers le portrait de Telma qu'il souhaite, c'est lui qui se raconte en ressassant ses souvenirs et en les livrant aux artistes dans l'espoir qu'ils comprennent quel amour particulier unissait Max et Telma. Ces conversations avec les artistes donnent lieu à de très belles rencontres, notamment avec Diane, une superbe jeune femme au visage défiguré.
En réalisant peu à peu que la vie passe, même pour lui, Max commence à s'interroger de manière plus profonde et existentielle sur la vie, la mort, la vieillesse, l'après-mort. C'est là que ce roman prend chez moi une tournure très particulière. Ces questions, je me les suis posées les unes après les autres, sans chaque fois trouver de réponses ou faisant évoluer celles-ci au gré du vent et de mes humeurs. En suivant le parcours de Max et en soulevant des interrogations identiques aux siennes, j'ai réveillé des craintes enfouies, voire des terreurs. J'ai ressenti la même oppression que Max Opass, j'ai refermé le livre avec un profond malaise oubliant complètement la forme et l'apparence de l'histoire pour n'en retenir que la fin.
Un règlement de compte cruel entre Max et Telma, entre leurs deux âmes réunifiées le temps d'un rêve, lui fait prendre conscience du fossé le séparant de la mort et qu'un pas suffirait à combler. La lettre envoyée par Max à son fils et clôturant le livre est bouleversante de tendresse et de sincérité. C'est l'acte de contrition, la minute de vérité d'un vieillard qui réalise qu'il n'a pas compris grand-chose à la vie et qu'il est peut-être passé à côté de points essentiels. Il sait que le temps imparti ne lui permettra pas de le rattraper, alors il va se préparer, du mieux qu'il pourra, à faire le grand saut. C'est beau et ça me fait mal au ventre... c'est de la peur, rien d'autre.
Les éditions
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Cinq photos de ma femme [Texte imprimé], roman Agnès Desarthe
de Desarthe, Agnès
Seuil / Points (Paris).
ISBN : 9782020395649 ; 5,60 € ; 14/01/2000 ; 188 p. ; Broché
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Décu !
Critique de Alcofribas nasier (, Inscrit le 27 février 2004, 53 ans) - 30 juin 2004
Je suis déçu.
J'aurais aimé un traitement plus profond du sujet. Il n'y a pas assez de réflexion sur le Temps qui passe, la Mort, l'Amour par delà la disparition de l'être aimé...
Le personnage est un viel homme de 80 ans, je m'attendais à une vaste réflexion sur le sens de la vie.
Il y a bien, ici et là des retours sur sa vie mais rien de bien exceptionnel.
La guerre, la déportation (le héros est juif et il avait 30 ans en 1944), tout cela est "oublié" par l'auteur. C'est dommage.
Je me demande dans quelle mesure l'auteur n'aurait pas eu intérêt à commencer son roman là où il finit, c'est-à-dire par les portraits. La face du roman en aurait été changé. D'une quête nous serions passé à une rétrospective...
Sébastien
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5 photos de ma femme | 1 | Alcofribas nasier | 21 mai 2004 @ 19:44 |