Un sourire de la fortune de Joseph Conrad

Un sourire de la fortune de Joseph Conrad
(A smile of fortune)

Catégorie(s) : Littérature => Anglophone

Critiqué par Tistou, le 18 septembre 2017 (Inscrit le 10 mai 2004, 68 ans)
La note : 8 étoiles
Visites : 3 714 

Vraisemblablement du vécu …

C’est ce que pense Sylvère Monod, professeur émérite à la Sorbonne, spécialiste du roman anglais des XIX et XXème siècles, dans une postface éclairante. Il s’appuie sur le fait que le Capitaine Jozef Konrad Korzeniowski (alias Joseph Conrad) avait séjourné plus de deux mois à Maurice pendant l’automne de 1888. Venu à Port-Louis commandant le trois-mâts Otago pour chercher du sucre, il y était resté durant Octobre – Novembre 1888 sans qu’on sache précisément ce qui s’y était déroulé.
Or, dans « Un sourire de la fortune », il est question d’un jeune capitaine de trois-mâts, qui arrive d’Asie du Sud-Est dans « une belle île fertile des tropiques », uniquement nommé par Joseph Conrad « Perle de l’Océan ». Qui produit du sucre et sur laquelle ont vécu par le passé les « dodos » (ou drontes), ces oiseaux endémiques de l’île Maurice, décimés et disparus déjà depuis la fin du XVIIème siècle. En déduire que la « Perle de l’Océan » est Maurice ne parait pas trop aventureux …
Et ce jeune capitaine reste lui aussi, dans des conditions particulières, trop longtemps dans l’île, pour une histoire d’amour ? Non, plutôt une histoire d’attirance.
Notre capitaine, arrivant sur la « Perle de l’Océan » se fait mettre le grappin dessus par un négociant entreprenant, Jacobus, qui peu à peu prend comme un ascendant sur lui. Obligé de rester au mouillage sur l’île pour une sombre histoire de sacs, pour emballer les marchandises qu’il doit convoyer, pas disponibles, il fréquente toujours davantage les entrepôts du sieur Jacobus et finit par céder à ses invitations d’aller chez lui, pour son jardin, entre autres. Mais dans son jardin, semble-t-il exceptionnel (mais Maurice est exceptionnel), il y a aussi Alice, la fille de Jacobus. Et l’histoire de Jacobus comme d’Alice est une histoire très compliquée puisque Jacobus s’est un moment mis carrément au ban de la bonne société de l’île en partant avec une artiste de cirque et en revenant avec une petite fille, Alice, et une réputation en guenilles. Du coup, Alice est proscrite, ne sort pas de la maison, du jardin et le capitaine est quasiment l’un des seuls hommes qu’elle peut rencontrer. Au demeurant son comportement est méprisant, insensé et excite donc la fierté et la curiosité du capitaine. Qui va s’enticher d’Alice. Qui va croire l’aimer. Et qui au moment où il pourrait toucher au but ; rentrer réellement en relation avec Alice après un baiser tout ce qu’il y a de plus furtif, se rend compte qu’il n’a aucun avenir avec elle, qu’il ne l’aime pas et va fuir, littéralement.
C’est cela la réelle histoire d’un « sourire de la fortune » et ça sonne diablement autobiographique. Et puis la prose et les détours empruntés par Joseph Conrad sont réellement un bonheur toujours renouvelé. Tiens, ça me donne l’envie de m’y remettre …
L’art de Joseph Conrad pour évoquer des lieux par lui fréquentés (particulièrement Océan indien, mer de Chine, Océanie, Afrique) et les personnages exceptionnels qu’on peut y rencontrer est fascinant. Les seuls que je comparerais dans cet exercice sont Pierre Loti d’une part et Nicolas Bouvier, plus près de nous. Des voyageurs qui n’ont pas hésité à payer de leurs personnes et qui racontaient ces voyages de manière incomparable …

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