Une très légère oscillation de Sylvain Tesson

Une très légère oscillation de Sylvain Tesson

Catégorie(s) : Littérature => Francophone

Critiqué par Anna Rose, le 26 juillet 2017 (Inscrite le 3 octobre 2006, 52 ans)
La note : 10 étoiles
Moyenne des notes : 9 étoiles (basée sur 5 avis)
Cote pondérée : 7 étoiles (3 351ème position).
Discussion(s) : 1 (Voir »)
Visites : 5 301 

Journal d'un infatigable voyageur

Après avoir laissé Sylvain Tesson conquérant sur son side-car à travers les plaines de la Russie, c'est l'occasion de le retrouver plus intime et plus ténébreux. Certes son accident est venu bousculer une vie trépidante dont il lui a fallu faire le deuil. Il évoque peu et avec pudeur cet épisode brutal de sa vie. Rapidement le voyageur reprend le dessus, d'abord à deux pas de son domicile puis dans le sud de la France pour renouer enfin avec les terres d'Europe de l'Est. On devine le courage qu'il lui a fallu pour redevenir cet infatigable (?) marcheur.
A travers ce journal, Sylvain Tesson prend position sur l'actualité, le monde qui l'entoure, sa perception des hommes. Il s'expose, parfois rageusement, mais avec beaucoup de lucidité. On est heureux de retrouver l'écrivain, qui n'a rien perdu de son talent.

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Lire et relire

8 étoiles

Critique de Catinus (Liège, Inscrit le 28 février 2003, 73 ans) - 6 juin 2022

Sylvain Tesson : « Une très légère oscillation »
Une partie du journal intime, du journal de bord de ce géographe-aventurier-poète qu’est Sylvain Tesson. Ses notes couvrent la période de 2014 au printemps 2017. Il nous raconte sa tragédie :
« Ce soir d’août 2014, à Chamonix, j’escaladai la maison de mes amis. Cette fois, les démons attendaient, en embuscade. Un croc en jambe et je tombai. La chute ne fut pas glorieuse, je crus que j’allai rebondir sur un buisson de pétunia. Je m’écrasai sur le dos et me fendis le crâne. »
Il s’en sortira grâce à une volonté peu commune et à des mois de rééducation. Notre homme nous emmène parcourir le vaste monde, par exemple, dans les steppes d’Asie, en Afrique, en Chine ; il maudit Daech et ses hordes fanatiques. Un de ses chapitres s’intitule : « L’Ukraine en larmes ».
A lire et à relire !

Extraits :
- On apprend que, yahoo, en arabe, signifie l’un des derniers degrés de l’esclavage.
- Citation de Mac Mahon : « La fièvre typhoïde est une maladie terrible : ou on en meurt, ou on en reste idiot. J’en sais quelque chose : je l’ai eue »
- Je suis un chasseur-cueilleur de bibliothèque.
- Je suis rentré dans un bar ; un autre que moi en est sorti.
- L’autre jour, je croise un banquier, je lui annonce que je pars en vacance. Le type me lâche : «Profitez bien ! » Ils ne peuvent pas s’en empêcher.
- Le seul inconvénient de la disparition de l’humanité est qu’il n’y aura personne pour se réjouir de l’événement.
- Qui ne sait pas se retirer risque des complications. Parole de père de famille.
- Dire que les femmes qui se maquillent osent nous accuser de mensonge.
- Alain Peyrefitte avait raison, la Chine s’est réveillée. Les Européens ne se sont même pas encore aperçus qu’ils étaient au menu du petit déjeuner.

"Suis-je plusieurs ?"

9 étoiles

Critique de Marvic (Normandie, Inscrite le 23 novembre 2008, 66 ans) - 11 octobre 2018

Sylvain Tesson est un homme aux multiples facettes, écrivain,voyageur, alpiniste, aventurier, et dans ce livre, tour à tour observateur, philosophe, humoriste…
Auteur apprécié, je n’arrivais pourtant pas à m’intéresser aux premières pages de ce livre. Après avoir lu les critiques, j’ai repris quelques jours plus tard ma lecture.
Et j’ai aimé. J’ai aimé les anecdotes, les visions pertinentes d’un observateur attentif, ses réflexions tout aussi pertinentes, son humour parfois grinçant et surtout ses excellents aphorismes.
J’ai résisté à l’envie de tous les citer. "Le mariage est l’intervalle qui sépare une passion élémentaire d’une pension alimentaire."

Cela n’empêche pas de défendre avec véhémence ses convictions sans ambiguïté comme sa haine de l’Islam.
Et puis j’admire son usage de la langue, son exigence des mots. (Mon correcteur orthographique en connaît plus que moi ! )
« Quelques amis à la personnalité hyaline, sous prétexte que je truffe ma conversation de mots rares, m’infligent leurs thrènes. Abrutis de misonéisme, ils ne veulent rien apprendre, ces trilobites. Parce que je m’encaprice de tournures oubliées, ils s’imaginent que je crée la synchyse….. les mots sont des voyageurs merveilleux. Ils naissent, ils se déplacent, certains connaissent le succès, d’autres ont la vie courte. Ils vivent, ils meurent, ils rendent grand service aux hommes ou bien créent la discorde. Nous nous abonnissons de les ressusciter. »

Un livre captivant d’un auteur fascinant.

Un homme debout

8 étoiles

Critique de AmauryWatremez (Evreux, Inscrit le 3 novembre 2011, 55 ans) - 29 janvier 2018

Il y a des hommes qui n'ont plus goût à l'être vraiment. Ils se contentent de ce qu'ils sont, de ce qu'ils font. Tout ce qu'ils désirent, c'est continuer à consommer et vivre chichement sur le plan spirituel et intellectuel. Ils demeurent dans l'allégeance aux conformismes. Ils sont satisfaits, ce qu'ils pensent être de la sagesse. Et puis il existe encore quelques êtres humains comme Sylvain Tesson. Perpétuels insatisfaits devant la médiocrité assumée de cette société, la haine, la sottise, ils ne se résignent pas à leur domination, à leur joug. Pire encore aux yeux de notre monde, ils recherchent continuellement le dépassement personnel de leurs limites.

Quitte pour cela à prendre des risques fous...

Ces êtres d'une autre pâte que les autres se souviennent que Dieu vomit les tièdes ainsi que le rappelle souvent Bernanos, auteur souvent cité par Sylvain Tesson ce qui me le rend d'autant plus sympathique. J'ai cru trouver en lui un « compagnon d'armes » en quelque sorte, de ce que le « Grand d'Espagne » évoqué ci-dessus appelle la « communion des saints ».

Quand je parle de dépassement, il ne s'agit pas seulement de l'exploit sportif qui fera du bruit médiatique quelques temps et puis sera oublié mais de celui poussant à sublimer ses souffrances, ses handicaps pour atteindre un autre palier dans l'humanité. Cela fait longtemps déjà qu'il écrit, s'indigne, se passionne pour ses frères humains mais le 20 août 2014 lui est arrivé un accident qui lui a fait prendre conscience de l'urgence de faire quelque chose de son existence. Comme nous tous, il lui a fallu une catastrophe pour ne plus vivre sur le fil, dans une irresponsabilité d'adolescent légèrement suicidaire.

Il tombe de dix mètres après avoir tenté l'escalade de la façade de la maison de son ami Jean-Christophe Rufin. Et il paie le prix de son inconséquence, durement, subissant diverses séquelles physiques irrémédiables lui qui était un séducteur impénitent. Il raconte ce que les autres appellent sa laideur, s'en amuse, rit de tous ces stéréotypes.

Ce livre est le journal de ses pensées, son bloc-notes jour après jour. Comme beaucoup d'écrivains, il le tient quotidiennement pour peut-être en faire une œuvre littéraire. Ce qui me réjouit beaucoup est que ce n'est pas non plus un livre se voulant exemplaire, moralisant sur un cas particulier. Ce n'est pas non plus un de ces insupportables ouvrages de « coaching de vie » balançant quelques lieux communs très vagues présentées tels autant de conseils raisonnables. Les montagnes qu'il escalade sont dorénavant les monuments parisiens, dont Notre Dame, les toits des immeubles sur lesquels il se promène, observant la vie de ses semblables.

Je m'identifie à cela, ne disposant plus de jambes en état de marche mais ne m'interdisant jamais aucune promenade quitte à prendre pour cela un peu plus de temps que les autres...

Il entrecoupe ses réflexions d'inventaires « à la Prévert » de bêtises qu'il entend autour de lui. Et il est de droite....

Il l'est d'une manière me plaisant énormément. Il ne ressent pas le besoin toutes les deux phrases de justifier ses convictions maladroitement comme beaucoup en se prévalant de comportements privés libertaires, de se qualifier de ceci ou de cela et de s'excuser de ce en quoi qu'il croit. C'est tellement risible, tellement insupportable ces pseudo « réacs » ainsi qu'ils se nomment croyant bon à chaque fois de donner des gages de bonne vie et mœurs aux arbitres des élégances politiques. Lui, non, il adopte encore une fois une attitude réellement virile.

Car c'est encore un homme debout...

Voyages immobiles !

8 étoiles

Critique de Frunny (PARIS, Inscrit le 28 décembre 2009, 59 ans) - 6 novembre 2017

Sylvain Tesson (1972- ) est un écrivain et voyageur français.
Il obtient le prix Goncourt de la nouvelle en 2009, pour "Une vie à coucher dehors" et le prix Médicis essai en 2011 pour "Dans les forêts de Sibérie".
En 2017, il publie "Une très légère oscillation", le journal qu'il a tenu ces trois dernières années.

L'immobilité forcée n'a pas que des inconvénients. Elle permet de se poser et de prendre du recul sur l'actualité, les événements du monde et de voyager immobile (lire, rêver).
Sylvain Tesson nous livre un carnet de bord, son journal intime au fil de ses réflexions sur un monde qui ne tourne pas rond.
Démasquant les hypocrisies, les non-dits et les mensonges. Fleur Pellerin et quelques autres en prennent pour leur grade.

Même si je préfère nettement le "Tesson" voyageur sur le terrain, ce recueil de réflexions est croustillant à souhait et ravira les Oficionados.
Bon rétablissement Mr Tesson et reprenez la route... la vraie !

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  Sujets Messages Utilisateur Dernier message
  Titre / couverture 3 Eric Eliès 29 janvier 2018 @ 11:30

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