La Différence invisible de Julie Dachez, Mademoiselle Caroline (Dessin)

La Différence invisible de Julie Dachez, Mademoiselle Caroline (Dessin)

Catégorie(s) : Bande dessinée => Divers

Critiqué par Blue Boy, le 2 décembre 2016 (Saint-Denis, Inscrit le 28 janvier 2008, - ans)
La note : 8 étoiles
Moyenne des notes : 9 étoiles (basée sur 4 avis)
Cote pondérée : 6 étoiles (12 445ème position).
Visites : 8 363 

Le conformisme est un cancer

Marguerite est une jeune fille comme les autres, en apparence du moins. Elle-même se sent différente et connaît quelques difficultés au contact des autres. Outre son besoin de planifier sa vie quotidienne, le bruit et le brouhaha des conversations au bureau la gênent, et elle ne parvient pas à saisir l’humour et le second degré pratiqué par ses interlocuteurs. Une situation source de souffrances morales la conduisant à entamer une introspection qui va lui changer la vie.

L’idée répandue selon laquelle un autiste est « quelqu’un qui bave et se tape la tête contre les murs » est une grave déformation de la réalité. Car l’autisme recouvre quantité de formes, et le syndrome d’Asperger n’en est qu’une parmi d’autres, beaucoup moins visible et peu connue en France, autant du public que des professionnels de santé. Pour battre en brèche ces clichés, Julie Dachez, elle-même atteinte de ce « mal » qu’elle a réussi à dompter, est devenue en quelque sorte devenue une militante de la « neurodiversité », et fait aujourd’hui référence à travers son blog et les conférences qu’elle donne régulièrement.

A ce titre, le récit quasi-autobiographique qu’elle en a fait est très instructif. Et qui de mieux pour l’adapter en BD que Mademoiselle Caroline, qui elle-même a relaté sa dépression (autre affection « neurologique ») dans « Chute libre, carnets du gouffre » (Delcourt, 2013) ? Avec son trait simple, élancé et rond et ses couleurs fraîches, la jeune auteure sait insuffler ce qu’il faut de légèreté et d’humour, évitant tout larmoiement. Celle-ci sait avec finesse rendre touchante le personnage de Marguerite, par sa maladresse et cette « tour d’ivoire » dans laquelle la confine « Asperger ».

Les « Aspies » ressemblent à tout le monde en apparence, si ce n’est qu’ils sortent des codes sociaux dans leur façon d’agir et de s’exprimer. Le contact des autres et le bruit sont pour eux une source de fatigue, et sans être forcément ermites, ils se ressourcent plutôt dans la solitude et le silence. Hypersensibles, directs, maladroits, mal à l’aise avec les exigences de la vie quotidienne : autant d’autres caractéristiques qui les placent en marge d’une société obsédée par la norme, mais ce sont également des êtres passionnés, sans préjugés, et capables d’une concentration exceptionnelle (une qualité appréciée par les entreprises en informatique).

Ainsi, « La Différence invisible » interroge chacun d’entre nous, de manière plus générale, sur son propre degré d’acceptation de l’autre et de sa différence. Une lecture recommandée, contre les préjugés et l’intolérance, avec cette phrase affichée par Marguerite sur la porte de son frigo et résumant assez bien le propos du livre : « Tout le monde est un génie. Mais si vous jugez un poisson sur sa capacité à grimper à un arbre, il passera sa vie à croire qu’il est stupide. »

Message de la modération : Prix CL 2019 catégorie Bande Dessinée

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Les éditions

  • Différence invisible [Texte imprimé] scénario, Julie Dachez adaptation du scénario, dessin et couleur, Mademoiselle Caroline sur une idée et avec la participation de Fabienne Vaslet
    de Dachez, Julie Vaslet, Fabienne (Antécédent bibliographique) Mademoiselle Caroline, (Illustrateur)
    Delcourt
    ISBN : 9782756072678 ; 23,95 € ; 01/01/2016 ; 96 p. ; Album
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Un album stylé, sensible et délicat

6 étoiles

Critique de Fanou03 (*, Inscrit le 13 mars 2011, 49 ans) - 6 février 2019

Dans le genre « bande dessinée documentaire », La différence invisible est plutôt réussie, didactique, certes, mais juste ce qu’il faut. On y apprend beaucoup sur le syndrome d’Asperger, qui est l’objectif initial avoué de l’album, mais je dirais que le récit à la limite se suffit largement à lui-même. Au-delà du scénario, assez classique, le trait, à la fois stylé, sensible et délicat de Mademoiselle Caroline, n’est pas pour rien à la qualité de l’album. D’une grande lisibilité, le dessin donne en effet chair de belle façon à Marguerite, la protagoniste principale, faisant ressortir son caractère, ses émotions, sa fragilité aussi bien que son énergie, qui lui permettra enfin de donner un nom à son mal-être.

Le graphisme en effet, quoique plutôt épuré, voir « simpliste » en première lecture, se révèle étonnamment capable, par la composition, où le noir et blanc, le gris et le rouge prédominent, d’évoquer toute l’intériorité de Marguerite. Que l’on observe par exemple quelques vignettes pleines pages, comme celle où, en proie à une crise d’angoisse elle contraint son compagnon à rebrousser chemin, ou cette autre où la voilà devant une embrasure noire, accompagnée de ses deux chats, sur le point de quitter son compagnon : l’économie de moyen, cumulé à un expressionnisme puissant, rend la jeune femme extrêmement touchante et peut même nous renvoyer au poids des convenance qu'impose la société ainsi qu'à notre propre peur du Monde.

Excellent et salutaire !!!

10 étoiles

Critique de Shelton (Chalon-sur-Saône, Inscrit le 15 février 2005, 68 ans) - 24 mai 2017

Il m’arrive parfois de mettre du temps à venir vous parler d’une bande dessinée mais – ce n’est pas une justification, juste une explication – il y a tellement de nouveautés chaque année, il y a tant d’albums de qualité qui sortent en librairie, tant d’artistes qui ont du talent, que les jours de l’année ne suffisent pas à tout lire, puis écrire tout ce que l’on voudrait dire de ces belles bandes dessinées… Je connais et apprécie Mademoiselle Caroline depuis déjà quelques temps et son dernier livre, La différence invisible, n’apparaissait toujours pas dans mes critiques, dans mes chroniques… Cela n’était pas lié au sujet ou au talent de l’artiste, non juste aux circonstances… Hier, dans le TGV, en rentrant de Paris, je l’ai lu et dès aujourd’hui je vous en parle car c’est un excellent ouvrage !

C’est tout d’abord un livre grave, important, capital… On va tout savoir ou presque sur le syndrome d’Asperger. Oui, je vois vos têtes ! Asperger = autisme = folie ! Justement, cette bande dessinée va permettre de sortir de ces clichés et mettre en ordre nos pensées… En ordre humain surtout !

On va suivre une femme, Marguerite, 27 ans, une femme qui nous semble un peu bizarre, inadaptée à la vie en société… On ne sait pas grand-chose d’elle mais on la voit au travail, dans sa vie de couple, dans son quartier… Petit à petit, on se dit que son fonctionnement n’est pas toujours rationnel…

Enfin, on se dit cela parce que l’on part du principe que notre fonctionnement est celui qui est rationnel, normal, évident… quant à ceux qui sont différents, ils n’ont qu’à faire des efforts ! Ce n’est quand même pas compliqué ! Non ?

Tout au long du cursus qui va permettre à Marguerite de comprendre qu’elle a le syndrome d’Asperger, nous allons comprendre, nous aussi, de quoi il s’agit, comment les choses sont appréhendées par les êtres humains qui ont ce syndrome et comment ils peuvent vivre malgré cela en société du moins si chacun fait preuve d’un peu de compréhension, de respect, d’acceptation… Ce n’est pas une maladie, c’est une différence… mais que l’on ne voit pas de l’extérieur…

On retrouve le dessin caractéristique de Mademoiselle Caroline même si ce n’est pas toujours aussi drôle que son blog et certains de ses autres ouvrages… par contre, sa narration graphique permet d’aborder des sujets somme toute assez lourds et sérieux sans prise de tête, en toute simplicité… Une sorte de vulgarisation très efficace ! Le dossier final – après l’histoire de cette chère Marguerite – donne une bonne approche de l’autisme en général et du syndrome d’Asperger en particulier…

Ce type d’ouvrage devrait être offert par la Sécurité sociale à chaque dépistage du syndrome d’Asperger, mais aussi, comme il faut sensibiliser toute la population à ce type de syndrome pour que l’on puisse tous vivre ensemble, à tous les citoyens. Il faudrait au moins que l’ouvrage soit dans les CDI, les bibliothèques municipales et d’entreprises, bref que l’on arrête de fermer les yeux à certaines réalités… Non ?

La différence invisible, un ouvrage de Mademoiselle Caroline sur un scénario de Julie Dachez en partant d’une idée de Fabienne Vaslet… Au départ, il y avait le blog de Julie Dachez, le témoignage d’une personne qui a le syndrome d’Asperger et à la fin une bande dessinée accessible à tous et salutaire pour notre société… Donc très bonne lecture !!!

Fabuleux

10 étoiles

Critique de AmaranthMimo (, Inscrite le 25 mai 2013, 33 ans) - 19 avril 2017

Voici une véritable découverte, une bande dessinée dont on se souvient et qu'on a plaisir à consulter voire reconsulter... Travaillant dans le monde de l'autisme, j'en ai apprécié la forme, une forme ludique qui détaille relativement bien les difficultés ainsi que les compétences des autistes, notamment Asperger.
Le récit est instructif, bien construit, les dessins sont également fabuleux.
Un véritable coup de cœur, une BD à mettre entre toutes les mains, pour sensibiliser, informer et apprendre !

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