La Grande Arche de Laurence Cossé
Catégorie(s) : Littérature => Francophone
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Passionnant !
Bien que la couverture indique « roman », c’est plutôt une enquête sur la grande arche de La Défense, son histoire depuis 1983.
1983 : l’architecte danois Johan Otto von Spreckelsen remporte le concours international avec son « Cube ». Jusque là, il n’a construit que sa maison et 4 églises.
Luttes politiques, incompréhensions culturelles et sociales entre danois et français, gaspillages de fonds publics,…
La construction de la grande arche a été un projet monumental (c’est le cas de le dire)
Et ce n’est pas fini… On n’imagine plus La Défense sans la grande arche et ses escaliers (« le plus grand banc public » ), mais… la grande arche est-elle un monument ou un immeuble de bureaux ? Que faire du socle et du toit, espaces pour la moins difficiles à utiliser ?
Souvenirs, souvenirs… J’ai travaillé à La Défense à l’époque de sa construction, je me souviens d’avoir vu la construction des côtés puis du toit. J’ai visité l’éphémère musée de l’informatique à l’époque où le toit était accessible au public, ce qui n’est actuellement plus le cas.
J’ai lu ce livre presque d’une traite, ayant autant de mal à m’en arracher que d’un thriller.
« Il n’est pas facile d’admettre que l’aléa règne sur un chantier moderne hyper-sophistiqué et qu’au fond celui-ci n’est qu’un succession de tâtonnements[..] »
« La littérature fait courir des risques dont l’auteur n’avait pas idée avant de s’y lancer, sans quoi il aurait préféré l’ethnographie ou le saut à la perche. Les efforts de documentation auxquels j’ai dû m’astreindre pour écrire sans trop d’inepties les paragraphes précédents ont réduit en poussière un des piliers de mon équilibre psychique. Je savais que l’approximation et la précarité gouvernent les amours humaines, les relations sociales, les pouvoirs quels qu’ils soient, les entreprises artistiques, la préparation des entremets, les illuminations religieuses, mais je croyais qu’il existait dans l’univers un ordre de réalité ferme, immuable, en un mot sûr, qui précisément était la technique. Tout ce qui est béton, marbre ou acier me semblait être du solide. Et je découvre en travaillant la différence entre précontrainte et post modernité que l’incertain règne là comme ailleurs. »
« Si l'Arche est ce qu'elle est, cette porte de Paris, si puissante et si singulière, c'est que Spreckelsen était inexpérimenté, déraisonnable, non conforme et d'une folle présomption. Les concours ouverts créaient des appels d'air, des appels de neuf, de risque. Ils donnaient sa chance à Icare. »
Les éditions
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La Grande arche [Texte imprimé], roman Laurence Cossé
de Cossé, Laurence
Gallimard
ISBN : 9782070142040 ; 22,00 € ; 07/01/2016 ; 368 p. ; Broché -
La Grande arche [Texte imprimé] Laurence Cossé
de Cossé, Laurence
Gallimard / Collection Folio
ISBN : 9782072720192 ; EUR 7,70 ; 24/08/2017 ; 400 p. ; Poche
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Fermer la perspective
Critique de Vince92 (Zürich, Inscrit le 20 octobre 2008, 47 ans) - 23 février 2023
Né d'un concourt ouvert à tous, le choix de l'architecte Johannes Otto von Spreckelsen, inconnu jusqu'alors, a surpris dans le milieu assez endogène des stars internationales de l'architecture (Nouvel, de Portzemparc, Pei,..). Un inconnu allait construire un bâtiment majeur pour achever la perspective allant du Louvre au quartier d'affaire de la Défense. Ce projet n'était en réalité pas neuf et était devenu le serpent de mer de la Cinquième République: Pompidou, Giscard d'Estaing avaient tenté de faire naître à Tête Défense un bâtiment emblématique. Las...
La volonté de François Mitterrand et sa décision de nommer aux postes clés de la maîtrise d'ouvrage de grands serviteurs de l'Etat (Robert Lion, Jean-Louis Subileau à la tête de la SEM Tête-Défense, Paul Andreu comme "assistant de von Spreckelsen) vont permettre l'aboutissement du projet dans les temps (juillet 1989)... mais cela se fera au détriment de l'idée originale: beaucoup des détails imaginés par Spreck comme on appelait l'architecte, vont en effet être sacrifiés sur l'autel de la faisabilité ou des coûts: plus de jardins sur le toit, plus d'espaces dégagés autour de l'arche, le nuage en verre occupant le milieu de l'arche remplacé par une structure d'une toute autre nature, plus de verre collé à la façade mais enchâssé, un marbre de moindre qualité (qu'il faudra remplacer avec le temps par du granit),... autant d'éléments qui conduiront von Spreckelsen à se désengager du projet, car se sentant trahi.
Cela, ajouté au fait que la destination même du bâtiment va changer à de multiples occasions entraînant des problèmes de financement et l'arrivée de promoteurs plus ou moins véreux dans les négociations concernant la commercialisation des espaces immenses mais peu pratiques du bâtiment font que cette enquête se lit comme un roman. C'est d'ailleurs comme cela que Gallimard et Laurence Cossé nomment cet ouvrage.
Dans un entretien, j'ai entendu l'auteur dire que le sujet importait finalement peu, qu'elle avait avant tout voulut créer une oeuvre littéraire...je ne suis malheureusement pas d'accord avec ces déclarations car si son écriture est plutôt agréable, elle ne se démarque pas spécialement. En revanche, j'ai trouvé le sujet passionnant et essentiel à la réussite de ce livre: le personnage de Spreckelsen, les rouages de l'administration, l'époque si particulière des "années Mitterrand" et sa cohorte de malversations mais aussi d'élans créatifs et de transformations en profondeur du pays sont au coeur de ce beau livre et font de sa lecture un très agréable moment.
LA GRANDE ARCHE OU LE GRAND ENNUI?
Critique de Septularisen (, Inscrit le 7 août 2004, - ans) - 4 août 2022
Rappelons en quelques mots l’argument principal du livre : en 1983 le président François MITTERRAND (1916 – 1996), lance un grand concours international «ouvert» pour compléter la perspective des «Champs-Élysées» au lieu dit «Tête-Défense». A la surprise générale, celui-ci est remporté par un mystérieux architecte danois, Johan Otto Von SPRECKELSEN (1929 – 1987), professeur à l’école des Beaux-Arts de Copenhague. Plus théoricien que bâtisseur, plus poète qu’architecte, plus dessinateur que technicien, il se révèle bien vite, incapable de réaliser un projet de cette ampleur. Il faut bientôt lui adjoindre l’aide d’un architecte français, Paul ANDREU (1938 – 2018), pour finaliser les plans de ce qui deviendra des années plus tard «La Grande Arche»…
Déjà dissipons un malentendu: Ce n’est pas un roman, mais simplement l’histoire d’un bâtiment de la ville de Paris. Et, plus que du bâtiment en lui-même, c’est sur la vie et l’œuvre de SPRECKELSEN, que porte ce livre. Puisque l’auteur nous «gratifie» de centaines de pages pour nous raconter sa destinée, qui va d’obscur architecte danois, n’ayant planifié que sa maison et quatre petites églises dans son pays natal, à «superstar» de l’architecture moderne, puis sa lente descente aux enfers, pavée de toute la bureaucratie et l’idéologie politico-économique française, et enfin sa triste mort…
Le tout en gagnant un seul concours d’architecture sur la base de simples esquisses, sans même avoir étudié la faisabilité du projet…
Ensuite que dire de ce livre? Des personnages à foison dont, pour certains, on ne comprend absolument pas ce qu’ils font là? P. ex. : Les péripéties d’un magnat de l’immobilier parisien qui voulait s’en mettre plein les poches, et qui a fini en prison... Ou bien (Chap. 5), la statue d'un ange, sur l'immeuble d'une agence d'urbanisme à Paris? Mme COSSÉ je m’en fous! Parlez-moi de l’Arche!
Des digressions à n’en plus finir sur des histoires et des thèmes dont on se demande vraiment ce qu’ils viennent faire là? Un chapitre (Chap. 16/18/20 et 22), pour chacune des quatre églises construites par l’architecte au Danemark? Un chapitre entier (Chap. 47), sur Mme. Karen BLIXEN (1885 - 1962), sa tombe et le lieu où elle est enterrée? Un chapitre (Chap. 30), pour nous expliquer les différents types d’arc?
Mais qu’est-ce que tout cela vient faire avec le sujet de ce livre? Mme. COSSÉ je m’en fous! Parlez-moi de l’Arche!
Quelquefois cela frise même le ridicule! Un chapitre (Chap. 14), juste pour expliquer pourquoi l’auteur écrit parfois : Johan Otto Von SPRECKELSEN, parfois simplement SPRECKELSEN ou tout simplement «Spreck»? Un chapitre (Chap. 45), pour nous décrire la tombe de SPRECKELSEN? Mme. COSSÉ je m’en fous! Parlez-moi de l’Arche!
Encore? Des pages entières sur une grève des profs au Danemark (Chap. 28), Trois pages pour nous détailler (mais alors vraiment en détail, eihn! Carrément une lettre à la fois!..), les signatures des protagonistes de l’affaire au bas d’un contrat? Un chapitre (Chap. 11), pour nous décrire la ville où habite SPRECKELSEN? Mme. COSSÉ je m’en fous! Parlez-moi de l’Arche!
Stop, n'en jetons plus... Je suis las!... Le livre aurait aisément compté 100 pages de moins sans tous ces histoires qui n’apportent rien à l’Histoire!
Mais encore? Et bien même quand justement cela parle de l’Arche, c’est pour nous donner… Quoi déjà? Ah oui!... Quatre pages pour nous expliquer qu’une erreur technique avait été commise dans les plans et que personne ne l’avait détectée? Des pages pour nous expliquer pourquoi finalement les fenêtres choisies par l'architecte danois ne furent pas retenues? Des descriptions techniques (volumes, orientation, proportions, grandeurs, couleurs, métrage…) à n’en plus finir, - des pages entières d’explications entre les différents types de béton et les différentes couleurs de marbre, quand celui-ci n'est pas du granit, d'ailleurs -, que même un féru d’architecture moderne comme moi a du mal à comprendre… D’ailleurs à certains moments je me suis même demandé si l’auteure elle-même comprenait de quoi elle parlait…
Je finis sur les rotules, rincé, harassé, exténué, désossé, perclus par la fatigue de la lecture et l’ennui qui va avec… J'ai l'impression de m'être fait complètement avoir sur ce que l'on m'a vendu et d'avoir subi une «Coloscopie littéraire»... Je me demande bien ce qu’il me restera de cette lecture dans quelques temps? Sans doute pas grand chose, à part peut-être le fait que je ne dirai plus jamais l’Arche de SPRECKELSEN, mais l’Arche de SPRECKELSEN et ANDREU!
Et finalement, à part les amateurs inconditionnels d’architecture, franchement, je ne vois pas bien à qui je pourrais conseiller ce livre? Peut-être a de futurs écrivains en herbe, comme exemple parfait de livre qui passe complètement à côté de son sujet?..
le Grand Cube
Critique de Badzu (versailles, Inscrite le 6 novembre 2005, 49 ans) - 19 novembre 2019
1982. François Mitterrand, élu Président, a à cœur de marquer son mandat en édifiant un monument entre Paris et Nanterre, en lieu et place des bidonvilles disparus au milieu des années 70.
Ses conseillers lancent un grand concours international d’architecture, rassemblant au travers de centaines de projets les cabinets le plus prestigieux et les architectes stars les plus en vue.
Concours anonyme sur la base de dessins, c’est Johan Otto von Spreckelsen, professeur de l’Ecole des Beaux-Arts de Copenhague, qui le remporte. A son actif : sa propre maison et quatre petites églises au Danemark, et aucun cabinet d’étude derrière lui. Son cube épuré et sa voûte cristalline ont séduit Mitterrand.
Au-delà des détails esthétiques du bâtiment, Laurence Cossé lève le voile sur les décisions qui ont mené à la construction de l’Arche : une vision historique de Paris le long d’un axe, qui court depuis le Palais du Louvre pour remonter le Jardin de Tuileries, la Concorde et l’Arc de triomphe.
Les anecdotes qui émaillent le roman sont passionnantes et parfois cocasses. Ainsi, un projet écarté dans la première vague de sélection du concours car jugé trop américain et qui s’avèrera être le projet du seul cabinet français en compétition.
Et surtout, l’auteur nous révèle l’incroyable bataille qui opposa cet architecte secret, direct, sans concession pour voir naître l’œuvre de sa vie, et les impératifs techniques et financiers portés implacablement par les fonctionnaires et constructeurs français, avec force revirements et une désinvolture qui conduiront le pauvre von Spreckelsen à la démission.
C’est une histoire vraie, une aventure d’abord humaine avant d’être celle d’un énorme cube de béton que son créateur voulait être une ode à la sérénité.
Après la lecture de ce roman, vous ne regarderez plus jamais la Grande Arche de la même façon.
Rétrospective d'une grande construction
Critique de Veneziano (Paris, Inscrit le 4 mai 2005, 46 ans) - 17 novembre 2019
Les complications sont multipliées, les palabres reprennent, l'architecte, aussi raide que vaniteux, s'en agace, pour finir par quitter le chantier, les soucis s'accumulent, tant techniques que financiers, alors que le président de la République a fixé le délai de juillet 1989 pour l'inauguration, comme pour l'opéra Bastille, ce qui doit coller avec les festivités du bicentenaire. Tant bien que mal, avec une frénésie jamais démentie, le projet avance et arrive à terme, après moult péripéties.
Ce livre relève de l'histoire contemporaine, d'une enquête passionnante, la galerie de portraits dressée à cette fin faisant bien toucher du doigt les enjeux en latence et les querelles croisées sur ce chantier. Le ton reste clinique, les faits parlant suffisamment d'eux-mêmes. Cet ouvrage permet de comprendre la signification de ce lieu déconcertant. Il est utile également pour comprendre les arcanes des processus décisionnels, voir comment le politique, l'administratif, le financier et le technique échangent et travaillent ensemble. C'est très intéressant.
L'Arche, cette épopée!
Critique de Killing79 (Chamalieres, Inscrit le 28 octobre 2010, 45 ans) - 13 novembre 2017
En effet, l’élaboration de ce monument a été une épopée à plusieurs niveaux. Tous les éléments se sont regroupés pour contrarier la bonne réalisation du projet. Chaque secteur engagé dans ce projet a voulu mettre son grain de sable. Le monde des architectes où chacun recherche la reconnaissance, le monde des investisseurs où la rentabilité est une priorité, le monde des politiques où tous les coups bas sont permis, rien n’a été épargné à cette grande Arche. Le déroulement des travaux a donc été un concentré de manipulations et de rebondissements qui en a fait une aventure à part entière.
A la faveur de cet illustre épisode, Cosse met en évidence l’ensemble des us, coutumes et modes de fonctionnement qui rendent depuis longtemps notre pays unique mais aussi ingérable. Pour étayer son propos, l’auteure entrecoupe son récit de chapitres parenthèses. On y découvre par exemple les origines de l’architecte Spreckelsen et de son art, les témoignages d’acteurs de l’époque, les spécificités de la société Danoise par rapport à la nôtre ou les caractéristiques techniques du monument. On comprend alors le résultat plutôt tumultueux qu’a pu engendrer l’association de tous ces composants.
Grâce à Laurence Cossé, la construction de l’Arche nous apparaît sous un angle différent. Dorénavant je regarderai cet édifice avec un autre œil. Le travail de recherche de l’écrivaine a été prodigieux. Le sujet, qui semblait pourtant fade, devient sous sa plume exigeante, un roman captivant qui a en plus le mérite de nous apprendre des choses. Belle surprise !
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