Etre poète de Jaroslav Seifert
(Býti básníkem)
Catégorie(s) : Théâtre et Poésie => Poésie
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"Et comme en rêve, de temps à autre, j’entends encore une pluie de violettes".
Paru en 1983, «Être poète » est le dernier des vingt-cinq recueils de poésie de Jaroslav SEIFERT (1901-1986). L’auteur y retourne à son adolescence, à ses premiers vers et premiers amours, aux années noires de la guerre. Le recueil fut tiré à un petit nombre d’exemplaires, la police politique de l’époque veillait en effet à ce que les livres du poète passent inaperçus dans son propre pays ! Il fallut que le poète obtînt le Prix Nobel de Littérature en 1984 pour que la réédition d’Être poète fût autorisée et parvint enfin en Europe de l’Ouest.
Le poète fait preuve ici d’une maîtrise splendide de la langue et de la poésie tchèque, dans une écriture ciselée et un style délibérément classique, il développe comme toujours ses thèmes favoris, citons entre autres :
Les femmes,
Combien de fois ai-je ouvert mes bras
pour enlacer ne serait-ce que l’air
qu’elle venait de traverser,
emportant son doux sourire
dans la pièce voisine.
L’amour :
Souvent, je cherchais l’amour à tâtons
comme celui qui a perdu la vue
et qui, sur les branches des pommiers,
cherche la rondeur des fruits dont rêve
sa paume.
Le temps qui passe :
Je relisais les poètes disparus
et de temps à autre
leurs vers éclairaient mon chemin
comme une flamme dans le noir.
Les aïeux :
Chaque fois que ma mère astiquait le chandelier
Avec un chiffon de velours,
j’avais l’impression qu’elle poussait un léger soupir. (…)
Prague :
Le lendemain, je flânais dans Prague.
Mais toutes les vieilles villes d’Europe
deviennent au printemps trois fois plus belles. (…)
La Tchécoslovaquie :
Tout d’abord, je penserais à mon pays,
beau comme un arbre fruitier en mai.
Les amis :
En hiver, mon ami l’acteur Spal
comptait les cygnes sur la rivière
du haut du pont Palacký (…)
La nature…
(…) Les roses n’avaient pas encore éclos,
et le rossignol n’avait personne pour qui chanter.
Une écriture et des poèmes intimes et intimistes, mais où je dois dire chacun se retrouvera, mais surtout des vers qui impressionnent par leur beauté. Avec la poésie de SEIFERT il n’y a pas de demi-mesure, je dois le reconnaître chaque vers, même le plus insignifiant est immensément… Beau !
Comme toujours avec Jaroslav SEIFERT une poésie belle, forte, directe, épurée, émouvante, accessible et qui semble s’adresser directement à vous…
Rappelons que Jaroslav SEIFERT a été le lauréat du prix Nobel de Littérature en 1984.
LE CONCERTO DE BACH
Je n’ai jamais fait la grasse matinée,
à cause des premiers tramways qui me réveillaient,
et souvent aussi à cause de mes rimes.
Elles me tiraient du lit par les cheveux,
me traînaient jusqu’à la chaise,
et, à peine avais-je ouvert les yeux,
elles m’obligeaient d’écrire.
Attaché par la douce salive
aux lèvres de l’instant exquis,
je ne pensais pas au salut de mon âme misérable,
mais, à la place de la béatitude éternelle,
je désirais le moment fulgurant
de l’éphémère plaisir.
En vain les cloches me soulevaient-elles,
je restais fermement agrippé à la terre.
Elle était pleine de parfums
et de secrets excitants.
Lorsque la nuit, je regardais au-dessus de ma tête,
je ne cherchais pas le ciel.
Je m’effrayais plutôt des trous noirs,
quelque part à l’autre bout de l’univers,
plus épouvantables encore
que l’enfer.
Puis, j’entends le son d’un clavecin.
C’était un concerto
de Jean-Sébastien Bach
pour hautbois, clavecin et cordes.
D’où venait la musique ? Je l’ignore.
Mais pas de la terre.
Bien que je n’eus pas goûté au vin,
je chancelai un peu
et je dus m’accrocher
à mon ombre.
Les éditions
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Býti básníkem [Texte imprimé] Jaroslav Seifert do francouzštiny přeložila Jana Boxbergerová
de Seifert, Jaroslav Boxberger, Jana (Traducteur)
le Temps des cerises / édition bilingue
ISBN : 9782841091478 ; EUR 13,00 ; 01/01/2000 ; 198 p. p. ; Broché
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