Mourir par curiosité de Christiane Duchesne
Catégorie(s) : Littérature => Francophone
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Une tante sauve son neveu comateux
Sur son skateboard, Emmanuel Audet est projeté à mille lieues par un 4X4, dont le conducteur a fui le lieu de la scène d’accident. C’est une tragédie révoltante pour la famille de la victime, un jeune homme de 17 ans sur le point de devenir danseur dans une troupe professionnelle. Transporté dans un hôpital de la ville de Québec, il souffre d’un traumatisme comateux qui le laissera handicapé pour le reste de ses jours si jamais il s’en sort. Il survit grâce à un respirateur artificiel que l’équipe médicale juge inutile de toute façon. Tous s’attendent à sa mort imminente.
Mais la tante Rose n’a pas dit son dernier mot. Une Audet ne se laisse pas abattre pour si peu. Elle connaît, croit-elle, la thérapie qui sauvera son neveu bien-aimé. C’est en consultant l’arbre généalogique qu’elle a découvert le remède-miracle. Elle a décidé de se rendre quotidiennement à l’hôpital pour visiter Manu, comme elle l’appelle. Elle est sûre qu’il entend même s’il est dans le coma. Ainsi, chaque jour, elle lui sert son viatique, soit le récit de la vie de ses ancêtres à partir du premier Audet arrivé en Nouvelle-France. Pour la tante Rose, il y a matière à guérison en écoutant la vie des siens qui ont su affronter les mille et une misères de l’existence. Voudrait-elle par ce moyen que son neveu soit investi de la résilience de tous les Audet ? C’est le dilemme du roman.
Manu est heureux d’entendre l’histoire de sa famille sans que personne ne sache qu’il est fonctionnel sur le plan cognitif. Il est d’autant plus heureux des visites de sa tante qu’il trouve le temps long. Si long pour qu’il se projette les scénarii du pire. Terminées ses amours avec Juliette. Qui voudra d’une moitié d’homme inapte à la marche ? Que vaut une vie rivée à un fauteuil roulant quand on est un danseur ? C’est sans compter qu’il entend le personnel hospitalier discuter de l’impossibilité de mener une existence viable s’il ne meurt pas. Pas facile de vivre uniquement dans sa tête quand les conjectures s’annoncent si peu favorables.
Ce diptyque est rempli d’une grande tendresse comme tous les romans de l’auteure. L’amour du prochain sauve le monde, veut-elle dire à son lectorat. Il faut y croire contre tout espoir. Elle en fait la démonstration à travers une famille qui a tiré ses marrons du feu grâce à la résilience. On est fort de la force d’autrui. En fait rien ne meurt, tout se transmet. C’est un beau roman pour ceux qui désespèrent de la vie.
C’est rare d’en découvrir un du genre, qui marie le quotidien sans recourir à la verticalité qui transcende le monde. La meilleure ressource salvatrice se love au plus profond du cœur. Pour aboutir à cette conclusion, Christiane Duchesne a surfé longtemps sur une vague intéressante, certes, mais qui s’attarde avant de déferler. Heureusement que l’auteure est une conteuse aguerrie parce que cette œuvre à deux volets étanches peut risquer d’en ennuyer quelques-uns. Tout de même, on peut se laisser emporter par la dynamique familiale qui soutient les personnages, dont chacun sur sa branche généalogique crie sa foi en l’homme. Et comme l’écriture est souple, le plaisir de lire peut s’inviter à ce festin sur l’art d’espérer.
Les éditions
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Mourir par curiosité
de Duchesne, Christiane
Boréal
ISBN : 9782764624388 ; 17,10 € ; 16/02/2016 ; 294 p. ; Broché
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