Le Seigneur de Jéricho de Edmond Nicolas
(Der Heer van Jericho)
Catégorie(s) : Littérature => Européenne non-francophone
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superbe roman
Nous sommes au Limbourg, dans le sud des Pays-Bas de la fin du XIXème et du début du XXème siècle. Louis de Hautetaille, le seigneur actuel du lieu, entreprend de redonner une vie sociale, spirituelle, sur son domaine. En ne séparant pas ses devoirs de ses droits, même si le monde a changé : le passé est condamné, certes, mais ce n'est pas une raison pour ne pas faire un baroud d'honneur.. Chef religieux, défenseur de la foi, Louis va imposer à l'évêque la construction d'une église. Le curé Smeets, qui y est nommé, va devenir son ami. Il réussira à convertir le peuple de bûcherons, mi-voleurs, mi-paillards, qui vivent très librement sur le territoire : "si les fidèles ne comprirent pas tout à fait ce qu'il disait, cela n'avait au fond pas grande importance car, pour les simples d'esprit, un sermon est d'autant plus beau qu'il dépasse leur compréhension".. Épicurien, Louis choisit son cuisinier en la personne d'un français, Mathurin, qui devient également son ami, et lui compose des mets avec art, car l'art, même culinaire "est un ange du Ciel qui nous apporte une heureuse nouvelle : que ce monde n'est pas seulement une vallée de larmes".
Mais la grande affaire de sa vie, c'est sa longue histoire d'amour avec la fantasque anglaise Cécily Hunter, à qui il reste fidèle, arrivant à l'arracher d'un couvent, puis d'une institution psychiatrique discutables, et qu'il finit par épouser, alors qu'ils sont tous deux quinquagénaires... Au moment où il déprimait, sentant son amour perdu, le curé lui met du baume au cœur : "Mais rassurez-vous, vous avez trouvé le bonheur dans un amour passionné et absolu. C'est très beau, mon cher, ce n'est pas le destin de tous". D'ailleurs, Louis a une haute idée de l'amour, de son amour : "Mais qu'a l'amour de commun avec la raison ou avec l'instinct ? L'amour est un mystère, non pas dans le sens commun du mot, mais dans le sens antique, religieux, du mot", avoue-t-il au digne curé.
Un peu comme "Le guépard", ce roman nous montre une société en train de se défaire (littéralement, puisque les mines de charbon continuent leur progression et vont bientôt saper les fondations du château). C'est un roman qui caracole, avec des ingrédients d'aventures (les deux enlèvements de Cecily), voire de roman policier. Cependant, c'est la peinture de mœurs révolues qui prédomine : le domaine, avec ses serviteurs, ses métayers, est observé avec étonnamment d'acuité. Quant à l'histoire d'amour, qui reste chaste sans être le moins du monde pudibonde, elle se noue parfaitement avec le reste des aventures et des descriptions. On lit ce roman avec bien du plaisir (c'est une relecture, en fait) : l'auteur a le don de faire vivre les personnages, il fait montre d'un humour savoureux.
Un vrai plaisir de lecture, en ces temps troublés.
Evidemment, c'est un livre difficile à trouver, rare en bibliothèque, mais achetable sur internet.
Très curieusement, l'auteur ne figure pas sur wikipedia (sauf sur le wikipedia néerlandais), et semble un inconnu dans la littérature néerlandaise : non signalé dans le Dictionnaire des littératures en 3 volumes (PUF). !
Les éditions
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Le Seigneur de Jéricho
de Nicolas, Edmond Mengarduque, Alida (Traducteur) Mengarduque, Jean-Raoul (Traducteur)
Club Bibliophile de France / La comédie universelle, 21
ISBN : SANS000048645 ; 01/01/1955 ; 323 p. ; relié
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