L'origine de nos amours de Erik Orsenna

L'origine de nos amours de Erik Orsenna

Catégorie(s) : Littérature => Francophone

Critiqué par Hcdahlem, le 6 juin 2016 (Inscrit le 9 novembre 2015, 65 ans)
La note : 8 étoiles
Moyenne des notes : 7 étoiles (basée sur 3 avis)
Cote pondérée : 5 étoiles (41 643ème position).
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L'origine de nos amours… réserve quelques surprises!

Le père et le fils se retrouvent dans leur refuge de l’île de Bréhat pour soigner une «maladie» commune : ils ont divorcé en même temps de leurs épouses respectives, en 1975. L’occasion d’un dialogue père-fils sur l’origine de leurs amours et… de leur malédiction.
Grâce aux digressions qui sont la marque de fabrique d’Erik Orsenna et dont l’érudition et la curiosité régalent ses lecteurs de livre en livre, cette conversation va être l’occasion d’en apprendre davantage sur les ingénieurs qui ont fait la gloire de la France, sur le rôle des amants dans les jouets, sur le vocabulaire de la voile. Sans oublier la méthode de la pêche à pied qui prouve, une fois encore, que le père d’Erik est bien un héros. Cette méthode soigne les bleus à l’âme et consiste à ramasser dans un petit panier tous les petits trésors que l’on peut amasser au fil des jours. Quand au bout d’une semaine ou d’un mois, on renverse son panier, on comprend que «les collections de bonheurs minuscules permettent de traverser les passes difficiles».
«C’est ainsi que me revint, d’abord timide puis déployée, la joie de vivre, ce très étrange sourire intérieur.» Un moteur indispensable à l’écrivain, déjà nourri «de mots, de scènes, d’intrigues et de rebondissements» par toute sa famille.
On comprend certes que «dans cet univers mouvant où toutes les vérités sont possibles et se contredisent» il soit bien difficile de bâtir un amour stable, mais avec un égoïsme non dissimulé, on se réjouit de ces drames familiaux à répétition. Car ils nous offrent ces plaisirs de lecture presque jubilatoires lorsque l’auteur nous entraîne sur les pas d’une famille presque normale : «Double origine : le Bordelais et la Haute-Loire. Rien de particulier. Les mariages durent. Les naissances et les morts s’enchaînent. Rien à signaler. (…) Tout se gâte quand l’un de nos ancêtres de la branche bordelaise, tailleur de son état, décide de partir pour Cuba.»
Voici donc Augustìn Arnoult sur la petite île des Caraïbes au début du XIXe siècle. À la terrasse du café situé sur la place principale, il ne sait plus où donner de la tête – à tel point qu’il sera obligé de consulter pour des problèmes vertébraux – s’il veut détailler tous ces corps somptueux qui s’offrent à lui. Il est pourtant jeune marié et ne peut imaginer dans cette occupation qu’une déformation professionnelle, une sorte de prospection de nouveaux clients.
C’est du moins ce que le père tente, dans un premier temps, d’expliquer à son fils. Mais l’écrivain (et le lecteur !) veulent en savoir plus sur cette généalogie qui a conduit via le grand père cubain né en 1860 à cette malédiction du mariage instable.
Habilement, Erik Orsenna nous fait patienter avant de nous en dire plus. Car son père disparaît. C’est la recette qu’il trouve pour conjurer le sort.
Dans son appartement, Eric (on notera que tout au long du récit, ce sont les vrais noms et prénoms qui sont utilisés) trouvera, outre le dossier généalogique, des dossiers soigneusement annotés et malheureusement peu fournis aux noms de chacune de ses compagnes successives. Catherine, la mère de ses enfants, puis Isabelle dont il fait des vœux pour cette fois, « ce soit la bonne».
On l’aura compris, il ne s’agit pas ici d’un guide matrimonial, bien bien plutôt d’un bel hommage d’un fils à son père, ce héros qui aura tout tenté pour faire le bonheur de sa progéniture. Voilà donc l’origine de l’amour filial.
Et c’est tellement bien qu‘on se réjouit du livre qui sera consacré à sa mère et qui est quasiment annoncé dans les dernières pages.
http://urlz.fr/3Gn7

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Les éditions

  • L'origine de nos amours [Texte imprimé], roman Erik Orsenna,...
    de Orsenna, Erik
    Stock
    ISBN : 9782234078925 ; 18,90 € ; 09/03/2016 ; 288 p. ; Broché
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Hérédité et échec en amour

6 étoiles

Critique de Veneziano (Paris, Inscrit le 4 mai 2005, 47 ans) - 21 septembre 2019

Le narrateur, célèbre écrivain renommé, divorce en même temps que son propre père. Eux deux se mettent ensemble à réfléchir sur les causes de leurs échecs amoureux successifs, de l'aspect sempiternellement éphémère de leurs liaisons. Le père met cela sur le compte de leurs origines cubaines et de Trinidad, où une telle instabilité est d'usage, et opère ainsi des recherches en la matière, notamment généalogiques.
Ce roman désabusé ne manque ni d'humour ni d'amertume. Il relève de la tragicomédie où les dialogues abondent, tout comme les malentendus. Le thème ne s'avère pas inintéressant, mais gêne un peu tout de même, en raison de la présence de personnages réels ; Aussi ce livre reste-t-il assez grinçant et égocentré, mais il a le mérite de faire réfléchir.

Tel père, tel fils ?

7 étoiles

Critique de Marvic (Normandie, Inscrite le 23 novembre 2008, 66 ans) - 27 octobre 2016

En 1975, Eric quitte sa première femme. Deux jours plus tôt, c'est son père qui avait quitté sa mère.
Éric se réfugie dans la propriété familiale de l'île de Bréhat. Rejoint (à son grand regret) par son père, ils vont commencer à échanger quelques mots timides, réservés. Son père persuadé que son fils lui préférait sa mère.
Leurs premiers échanges deviendront réguliers et finiront même par devenir un rituel tout au long de leur vie.
Persuadé qu'ils sont sont victimes d'une malédiction, invoquant le transgénérationnel, le père partira sur les traces de ses ancêtres cubains, pour en obtenir la preuve.

Le nombre de séparations augmentant, l'âge passant, le père ira même jusqu'à s'effacer de la vie de son fils pour que sa dernière (?) union soit réussie, espérant que cela lui permettra enfin de vaincre la malédiction familiale.
"Merci, papa ! Merci d'avoir disparu ! Tu ne me facilitais pas la tâche ! Pourquoi a dit mon frère (psychiatre), serait plus grave ce que tu ne comprends pas ?"

Quant au fils, lui aussi voudra rendre son vieux père heureux, même si pour cela, il doit jouer une comédie véritable. Et cette découverte tardive et si humaine :
"Il faudrait bien que je finisse un jour par accepter cette désagréable évidence : je n'avais pas, je n'avais jamais eu et jamais je n'aurais le monopole de l'amour de mon père. Ma sœur et mon frère avaient eu aussi leur Flotille, leurs rituels de rencontres. Des trésors secrets qui disparaîtraient avec eux. Et si leur secret conservait mieux la vérité que le récit qu'on en fait ? ;.. questions dérangeantes pour l'écrivain de la famille."

Un roman au ton autobiographique surprenant, une autobiographie romancée (?), aux beaux passages attendrissants, jusqu'à la dernière preuve d'amour à son père, ce Don Juan "cavaleur".
J'ai une grande admiration pour le talent de M. Orsenna capable d'émouvoir avec des romans aussi différents que Madame Bâ ou La fabrique des mots. Cependant, parmi les 5 titres lus, ce n'est pas celui-ci qui restera marqué dans ma mémoire.

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