L'Héritage d'Esther de Sándor Márai

L'Héritage d'Esther de Sándor Márai
( Eszter hagyatéka)

Catégorie(s) : Littérature => Européenne non-francophone

Critiqué par Saint-Germain-des-Prés, le 8 mars 2004 (Liernu, Inscrite le 1 avril 2001, 56 ans)
La note : 8 étoiles
Moyenne des notes : 8 étoiles (basée sur 7 avis)
Cote pondérée : 7 étoiles (2 833ème position).
Visites : 5 829  (depuis Novembre 2007)

Arnaque ou intégrité?

Certains n’hésitent pas à affirmer que cet auteur hongrois est fait du même bois que Zweig ou d’autres. Sans aller jusque là, j’ai trouvé son écriture intéressante, ses flash-back à propos et la psychologie de ses personnages convaincante. Tout cela étant fort agréable à lire, de surcroît.

Esther dit n’être plus toute jeune. En fait, elle a dans la cinquantaine. Elle vit dans la maison familiale avec Nounou, amie de la famille depuis tellement longtemps que c’en est devenu un membre à part entière. Au bord de la pauvreté, elles survivent grâce aux légumes du jardin. Un télégramme les surprend dans une vie routinière : Lajos annonce son retour. Nous apprendrons petit à petit ce qui unissait Esther à Lajos, son beau-frère. Veuf depuis des années, il avait disparu dans la nature. Pourquoi revient-il ? La première réaction de Nounou est révélatrice : « Eh bien, je vais mettre l’argenterie sous clé » ! Lajos fait partie de ces personnes qui empruntent régulièrement de l’argent sans croire nécessaire de le rembourser ; il escroque, soit, mais avec la meilleure volonté du monde ! Son caractère tient un peu de l’insouciance à première vue, mais l’on se rend vite compte qu’il s’agit en fait d’autre chose : Lajos possède une autre échelle de valeurs que le commun des mortels.

Le voilà donc qui débarque, accompagné de sa fille et de deux autres personnes. Le moment venu, il dévoile à Esther la raison de sa présence. Il a quelque chose à lui demander, bien évidemment. Cette chose, que je tairai, est énorme ! Son discours est persuasif, bien mené et, il faut tout de même le reconnaître, un rien manipulateur… Esther va-t-elle accepter ? Ce dialogue tout en argumentions diverses est prodigieux ! On ne sait plus si Lajos mérite une paire de gifles ou si sa conception du monde, idéaliste, ne serait pas plus belle que la nôtre, plus radicale et plus exigeante aussi… La morale qui s’en dégage est complexe et parfois … révoltante !

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Haut niveau littéraire

9 étoiles

Critique de Pacmann (Tamise, Inscrit le 2 février 2012, 59 ans) - 16 août 2013

Sandor Maraï est un grand, un très grand auteur. Cette oeuvre en est encore une fois une démonstration évidente même si le fond de l'histoire risque peut-être de ne pas intéresser un lecteur occidental et contemporain. L'analyse des sentiments, la tenue des dialogues et la substance de l'intringue, quoique limitée, sont la base du fondement de ma critique. Ce court roman est une voie idéale pour découvrir ce romancier, trop peu connu en francophonie.

20 ans... pas d'oubli

6 étoiles

Critique de Monito (, Inscrit le 22 juin 2004, 51 ans) - 31 mars 2009

Fidèle aux Braises, Sándor MÁRAI livre encore les suites, les conséquences et les conclusions d’événements qui se sont produits longtemps en arrière, 20 ans en l’espèce.

Esther, Nounou, Endré et les autres attendent le retour inopiné de Lajos parti il y a 20 ans après avoir trahi et trompé à peu près tout le monde, chacun jurant de ne s’y plus laisser prendre. S. Márai rappelle et pose le contexte mais aussi les liens de tous avec ce beau parleur.

Rien ne se passe vraiment comme attendu et même annoncé et finalement avec Márai, Lajos vient terminer une histoire interrompue. Il achève sa mission et atteint le paroxysme de sa philosophie d’action. Rien ne compte vraiment dans les actes, que l’existence ou non d’intention pour les fonder.

C’est l’héritage que Lajos laissera à Esther qui lui en laissera, elle, un autre.

Amour et trahison

8 étoiles

Critique de Aliénor (, Inscrite le 14 avril 2005, 56 ans) - 25 février 2009

Esther, la cinquantaine approchant, vit à la campagne dans la maison familiale qu’elle n’a jamais quittée. Elle y partage l’existence de Nounou, qui est entrée un jour - il y a bien longtemps déjà – au sein de cette famille et n’est jamais repartie. Esther ne s’est pas mariée, n’a donc pas eu d’enfant, et pourtant elle a jadis aimé un homme de toutes ses forces et se croyait aimée en retour. Mais cet homme, Lajos, l’a trahie en épousant sa sœur. Puis il a disparu de sa vie après le décès de son épouse, il y a vingt ans déjà.
Mais aujourd’hui Lajos est de retour. Il a annoncé son arrivée par télégramme, et Esther sait que cette visite n’a rien d’amical, puisqu’un grand ami de la famille, notaire de son état, est également convié à ces retrouvailles.
L’attente de son arrivée est l’occasion pour l’héroïne de retracer son histoire, cette rencontre avec cet homme beau parleur, séducteur et escroc. Un homme qui l’a trompée et volée. Et pourtant elle est décidée à l’accueillir comme il se doit et à accepter le sort qui l’attend.

Ce roman reprend les mêmes ressorts et la même dynamique que « les braises », puisqu’il s’agit cette fois encore de confiance abusée, de trahison, et de retrouvailles après de longues années de séparation. Des retrouvailles pour solde de tout compte, au cours d’un huis-clos. Bien sûr on pourrait regretter cette similitude, mais le talent de Sandor Marai rend impossible ce reproche, tant l’intrigue est cette fois encore remarquablement narrée. Peut-être conseillerais-je simplement de ne pas lire ces deux romans à la suite.

Une écriture aristocratique

8 étoiles

Critique de Saule (Bruxelles, Inscrit le 13 avril 2001, 58 ans) - 13 janvier 2008

Après "Les Braises", le formidable face à face de deux amis qui se retrouvent après de longues années dans un vieux château hongrois et qui vont se remémorer le passé, un livre que j'avais dévoré, je me suis jeté sur celui-ci dont la trame est, il faut le dire, fort semblable.

J'ai retrouvé avec délice l'écriture aristocratique et « racée » de Sandor Marai, et j'ai dévoré ce roman aussi. La même trame, le même thème de l'amitié, de l'amour et des réminiscences du passé. Mais si il faut comparer, j'ai moins aimé celui-ci, le personnage de Laslos, un dilettante de classe mais arnaqueur, ne se compare pas au vieux général qui mijote sa rancune dans son vieux château.

Quelle élégance !

9 étoiles

Critique de Clarabel (, Inscrite le 25 février 2004, 48 ans) - 19 juin 2005

Je suis fatalement sous le charme ! L'écriture de Sandor Marai est d'une classe folle, d'un grand classicisme très soigné, légèrement sobre et guindée, et pourtant si délicatement intimiste, envoûtante et voluptueuse ! Pour le premier livre que je lis de cet écrivain, je suis convaincue ! Je n'en resterai pas là !

"L'héritage d'Esther" est une histoire troublante, dans une grande maison proche de la ruine, où coule des jours tranquilles l'héroïne, Esther, la cinquantaine sonnante, et qui se déclare déjà à la fin de sa vie (gloups!). Une lettre arrive d'un ancien amant, Lajos. Il annonce son arrivée, avec les enfants, et deux autres individus. Cela fait plus de vingt ans qu'il s'est évaporé ! Ancien courtisan d'Esther, il avait finalement épousé sa soeur, Vilma, et avait disparu de la circulation à la mort de celle-ci. Deux décennies plus tard, le retour de Lajos le Terrible fait frémir Esther, son frère Laci, la domestique Nounou et les loyaux amis Tibor et Endre. Chacun espère bêtement que Lajos revient régler quelques vieilles traites, éponger ses dettes et effacer les rancunes du passé mais Esther, vaguement troublée, discernera vite que l'ancien escroc n'a pas changé d'un poil !

Ce roman a été publié en 1939, l'auteur est hongrois, souvent comparé à Stefan Zweig. Mais tous ces détails m'apparaissent vains. Sandor Marai pourrait être un contemporain, un portraitiste au génie incalculable, un roman à la fois actuel et délicieusement suranné, un incontournable quoi ! Dans "L'héritage d'Esther", l'ambiance est feutrée, les nuages du passé passent et repassent, tels des volutes de fumée. Les fantômes hantent les pièces de la maison, se baladent dans le jardin fleuri, effleurent l'épaule d'Esther, laquelle se révèle une héroïne touchante et forte, mais dont la décision finale me semble totalement aberrante ! Cependant mon impression de lecture reste, dans son ensemble, un véritable enchantement !


Quand le passé réclame des comptes.

10 étoiles

Critique de THYSBE (, Inscrite le 10 avril 2004, 66 ans) - 1 février 2005

Comme dans les Braises, Sandor Marai dépeint un face à face après une longue séparation.
Esther se prépare à recevoir Lajos le mari de sa sœur défunte qui lui a déjà tout pris et qui revient après 20 ans d’absence.
A la mort de sa sœur, Esther s’est occupée de son neveu et sa nièce quelque temps, jusqu’au moment où elle décide que Lajos, leur père, assume sa vie avec eux. Ils partiront donc avec cet homme, menteur, dépensier, escroc et irresponsable. Deux décennies après Lajos annonce sa venue. Ils seront cinq. Qui sont-ils ? Que veulent-ils ? Déjà Nounou la dame de compagnie fidèle à Esther depuis de longues années, cache l’argenterie, seule rescapée d’une époque révolue. L’apparence est trompeuse, Lajos sortira vainqueur de cette rencontre car Esther sait que le peu qui lui reste, elle lui donnera sans trop de résistance, c’est le prix à payer...
Sandor Marai, exploite comme à son accoutumée les sentiments humains avec le verbe fort et le mot juste. Il parviendra à nous faire pénétrer dans le psychisme ambigu des personnages d’une façon précise et claire, tout en pudeur. C’est avec un grand talent, en peu de pages qu’il nous restitue ce passé qui doit achever ce qui a été entrepris 20 ans plus tôt.

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