Le nom des morts de Stewart O'Nan
( The names of the dead)
Catégorie(s) : Littérature => Anglophone
Visites : 4 456 (depuis Novembre 2007)
"Les noms gravés sur le mur"
Larry Markham effectue, à longueur de journée, des livraisons pour le compte d'une boulangerie-pâtisserie industrielle. Si Larry a eu un jour des ambitions, elles sont loin derrière lui. Son mariage avec Vicki bat de l'aile depuis quelque temps. Elle ne supporte plus toutes ces nuits où elle l'entend crier. Une nuit elle a même tenté de le réveiller, inconsciemment il l'a frappé violemment et fût obligé de l'emmener à l'hôpital. Depuis elle fuit sur le canapé, dès qu'il commence à délirer. Quand tout cela devient trop difficile, elle se réfugie quelques jours chez sa mère emmenant leurs fils Scott. Scott a un retard mental qui ne lui permettra jamais d'être comme les autres enfants de son âge. Larry chérit son fils passionnément, il représente tellement pour lui.
Pourtant treize années se sont écoulées depuis son retour du Vietnam, mais il n'a jamais réussi à oublier les onze mois passés là bas. Comment oublier tous ces morts ? Tous ceux qui ne sont jamais revenus de ce cauchemar. Engagé comme infirmier, il était chargé de prodiguer les premiers soins aux hommes de sa section, lors des missions dans la jungle Vietnamienne. Tous sont morts, les uns après les autres, sans qu'il puisse faire quoi que ce soit pour les sauver, ce souvenir est resté comme une plaie béante que rien ne peut cicatriser. Chaque nuit les visages de ses anciens compagnons reviennent le hanter. Et toujours ce sang qui s'écoule d'entre ses doigts et les pansements inutiles qu'il applique fébrilement, parce qu'il ne peut pas se résoudre à rester là, à les regarder mourir sans rien faire. A deux reprises il a été contraint d'utiliser le revolver qu'il détenait dans sa trousse de premier secours qui, quand il savait qu'il n'y avait plus rien à espérer, lui permettait d'abréger les souffrances inutiles. Ce n'est que vingt-cinq jours avant la fin de son service, synonyme de retour au bercail, qu'il marche sur une mine anti-personnelle, lui arrachant un pied.
C'était pourtant contre l'avis de ses parents et de sa fiancée Vicki qu'il s’était engagé en 1968, abandonnant ses études de médecine. Son père, médecin également, avait bien tenté de l'en dissuader, lui il savait bien ce que la guerre signifiait pour en avoir fait l'expérience durant la deuxième guerre mondiale. Ancien prisonnier de guerre, il n'avait jamais évoqué, malgré les interrogations de son fils, la tragédie qu'il avait vécue pendant plusieurs mois.
Une fois par semaine il encadre un groupe de vétérans, à l'hôpital où exerce son père. Le groupe se compose d'handicapés physiques et d'individus souffrant de troubles psychologiques. Discuter avec eux l'aide à partager les expériences douloureuses vécues au Vietnam. Car contrairement à ce que croit sa femme, pour lui tout cela n'a pas pris fin le jour où il a été rapatrié. Il ne cesse de revivre les scènes horribles de combats dans une jungle opaque, à la recherche d'un ennemi invisible - "Il ne s'agissait pas d'un choix. La guerre vivait en eux tel un organe supplémentaire, secrétant de l'amour, de la terreur et de la pitié envers le monde, une sagesse nécessaire et parfois encombrante".
Les évènements se précipitent en l'espace de quelques jours, lorsqu'il comprend que cette fois-ci le départ de sa femme risque d'être définitif. Malgré tout, il entame une liaison avec la meilleure amie de sa femme, par avance vouée à l'échec, ce qui ne les empêche pas de la vivre passionnément.
Lors d'une réunion avec le groupe de vétérans il fait la connaissance d'un nouveau venu, Ronald Creeley, personnage mystérieux et souffrant de troubles comportementaux graves. Larry ne parvient pas à communiquer avec lui malgré tous ses efforts. Deux jours plus tard il s'enfuit de l'hôpital et entreprend de traquer Larry, laissant à chaque fois une carte à jouer en guise d'avertissement. Larry tente de se renseigner sur son passé militaire, en vain. Celui ci semble avoir tout simplement disparu du monde des vivants (le rapport officiel déclare Creeley disparu en mission). Dès lors Larry va devoir sans cesse être sur ses gardes et veiller à ce qu'il n'arrive rien à sa famille.
Un roman très bien construit, qui s'articule autour de l'alternance des chapitres retraçant son périple Vietnamien, avec une description très réaliste du quotidien d'un groupe d'hommes en mission de reconnaissance et de nettoyage, où les périodes d'attentes ennuyeuses succèdent à l'horreur sanglante des attaques éclairs, largués en pleine jungle au milieu des lignes ennemies. Et les chapitres se situant au présent, qui évoquent les difficultés existentielles d'un vétéran qui aspire à vivre, malgré l'indicible souvenir de l'absurdité et de la banalisation de la mort poussée à son paroxysme lors du conflit Vietnamien. Un récit sur l'impossible retour à une vie normale, d'un homme qui sait que l'amour ne peut pas ressurgir de dessous les stèles des illusions sacrifiées au nom d'idéaux meurtriers, nourris du sang des innocents.
Les éditions
-
Le nom des morts [Texte imprimé] Stewart O'Nan trad. de l'américain par Suzanne V. Mayoux
de O'Nan, Stewart Mayoux, Suzanne V. (Traducteur)
Seuil / Points (Paris).
ISBN : 9782020481366 ; 8,70 € ; 30/12/2000 ; 592 p. ; Poche
Les livres liés
Pas de série ou de livres liés. Enregistrez-vous pour créer ou modifier une série
Forums: Le nom des morts
Il n'y a pas encore de discussion autour de "Le nom des morts".