Berlinoise de Wilfried N'Sonde

Berlinoise de Wilfried N'Sonde

Catégorie(s) : Littérature => Francophone

Critiqué par MatthiasT, le 24 mars 2016 (Inscrit le 2 mars 2016, 32 ans)
La note : 10 étoiles
Moyenne des notes : 8 étoiles (basée sur 2 avis)
Cote pondérée : 5 étoiles (40 437ème position).
Visites : 3 344 

N'importe, nous nous serons bien aimés

Pour son quatrième roman, l'écrivain, chanteur et compositeur français né au Congo Wilfried N'Sondé nous invite à Berlin peu après la chute du mur et nous fait partager une histoire d'amour passionnelle entre le narrateur - leader d'un groupe de musique après avoir donné des cours d'allemand ; manifestement un double de l'auteur -, et une certaine Maya, peintre d'origine cubaine mue par une forte conscience politique et révoltée par toutes les inégalités.

Berlinoise a beau être labellisé "roman", c'est bien en poète que Wilfried N'Sondé écrit, déployant tout au long des cent soixante-et-onze pages qui filent comme une lettre à la poste une écriture flamboyante et ample, non avare en épithètes antéposés ou postposés ou en passés simples héroïques et solennels. On brûlerait à vrai dire de lire tout le texte à haute voix - idéalement, sous la couette, à l'être que l'on aime -, voire de l'apprendre par coeur tant son écriture qui se frotte au sublime  tout en restant d'une déconcertante simplicité nous enchante de bout en bout.    

Exemples parmi tant d'autres, "J'avais faim de sa bouche", "Elle nous rappelait qu'il fallait profiter de chaque instant et du miracle d'être deux", "Nous irons nous perdre au milieu de la musique assourdissante des clubs enfumés de Berlin l'inconstante". On pense à Charles Baudelaire ou Albert Cohen, rien que ça, devant tant de lyrisme et de faste de la langue. Cela n'étonne pas non plus de savoir que Sondé est également, et comme son personnage, chanteur, tant sa plume est chantante et mélodique. 

Et au service de quoi cette écriture si ciselée, et si riche ? Au service donc du sujet sans doute le plus éculé mais aussi peut-être le plus beau, la flamme de la passion, précaire, instable, vouée à disparaître inéluctablement, mais qui en valait clairement la chandelle, tout de même. En toile de fond l'énergique et surprenante ville de Berlin, définitivement un personnage à part entière avec ses noms de quartiers ou d'endroits eux aussi pleins de poésie -  Kreuzberg, Charlottenburg ou Tiergarten -, de la musique,  et des relents d'antisémitisme - avec notamment des assassinats de Mozambicains - qui viennent assombrir l'amour si solaire et si beau entre le narrateur et Maya. On ne vous livrera pas le scoop du siècle en vous disant que cet amour ne sera pas éternel, mais qu'importe, comme aurait dit Flaubert, ils se seront bien aimés.
(Critique parue sur le site A-lire.Info)

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Berlin, 1989, entre réconciliations et divergences

5 étoiles

Critique de Pucksimberg (Toulon, Inscrit le 14 août 2011, 44 ans) - 26 juillet 2023

Le 30 décembre 1989, Pascal et Stan partent pour Berlin pour y passer le réveillon, dans une période libératrice et d'enthousiasme. Sur les lieux, Stan rencontre Maya dont il tombera follement amoureux, une femme engagée, idéaliste et écorchée vive à certains égards. Stan et Pascal sont les membres d'un groupe musical et ils vont rester quelque temps dans la capitale allemande afin de vibrer au rythme de cette atmosphère de réconciliation. Le narrateur narre cette histoire passionnelle faite de sensualité et de disputes, miroir de ce qui se passe dans cette ville en pleine effervescence.

J'ai un avis très partagé sur ce roman. La période historique abordée m'intéresse énormément. L'auteur a évoqué les lendemains de la chute du mur et les multiples agressions par des néo-nazis à l'encontre de personnes de couleur. Cette angoisse est bien décrite dans ce roman par le biais de personnages à la peau mate. L'événement de la chute a sans doute quelque peu éclipsé ces réactions de violence qui ont entraîné la mort d'individus innocents. La ville de Berlin occupe aussi une grande place dans ce roman. L'auteur parvient à nous immerger dans cette atmosphère et ses descriptions vivantes ont un certain pouvoir évocateur.

J'ai été freiné par l'écriture de l'écrivain qui est pourtant travaillée. J'ai buté sur les mots, sur les signes de ponctuation comme s'il manquait une certaine fluidité. Cela reste tout à fait subjectif car d'autres lecteurs ont apprécié l'écriture. L'histoire n'a pas été d'une grande surprise. Dès le début du roman, on envisage aisément la suite. La passion amoureuse, plutôt le désir, sont bien rendus, mais il est vrai qu'aujourd'hui cette thématique est abordée régulièrement, donc rien d'exceptionnel ici. Et je dois dire que Maya, ce personnage principal, m'a agacé. Elle a des réactions quelque peu radicales et parfois épuisent le lecteur par son côté impulsif qui pourrait presque la rendre déraisonnable.. Il est tout de même intéressant de voir que leur histoire sensuelle peut refléter la ville de Berlin dans ce contexte ambivalent. C'est sans doute le point que j'ai trouvé le plus intéressant.

Ce roman ne me laissera pas un roman impérissable malgré mon horizon d'attente initial. J'attendais peut-être trop de ce texte ...

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