Un merveilleux livre qui nous fait sentir ce que cela fait de perdre des êtres chers, des amis, mais aussi qui nous interroge sur ce qu'est ce lien d'amitié et ce que sont les responsabilités vis-à-vis de leurs enfants orphelins que les amis décédés nous confieraient. Des difficultés et des bonheurs, des vies de couples, de l'adoption et du rôle de la famille naturelle; en bref de la mort et de la vie... Une lecture très recommandable pour son humanité et ses errances.

Lorsqu’un couple d’amis décède dans la force de l’âge, il y a de quoi être traumatisé. Quand en plus ceux-ci vous nomment dans leur testament pour prendre en charge leurs enfants âgés de 4 et 8 ans, là, c’est carrément le tremblement de terre. Acceptera, acceptera pas ? Car la demande s’adresse à quatre couples : le premier dispose d’un mois pour se prononcer. S’il refuse, le deuxième couple sur la liste aura un mois également pour se décider, et ainsi de suite. Bon sujet pour un livre qui se penche tour à tour sur les familles concernées.

En dehors du thème, assez fort il faut bien le reconnaître, « Les candidats » développe d’autres qualités. Une écriture agréable, une grande disponibilité à l’égard des personnages, un discours non moralisateur, une mise en scène intéressante des différentes voix qui s’expriment. Il y a certes quelques maladresses, dont une qui m’a particulièrement agacée : Yun Sun Limet en rajoute parfois une couche, alors que le sujet est déjà assez dramatique comme ça. On voit ainsi la petite fille cueillir des fleurs et les déposer sur la tombe de ses parents. Et ce n’est qu’un exemple. L’histoire pouvait franchement se passer de cet aspect « tire-larmes » (même si, je l’avoue, ça a marché, j’en ai versé, des larmes, au début, même que je savais plus lire à travers mon brouillard !).

Pour un premier roman, on peut dire que c’est une belle entrée dans le monde de la littérature pour Yun Sun Limet. Un texte qui s’écoule comme un long fleuve presque tranquille, bien structuré, clair, réussissant à séduire et capter l’attention du lecteur… tous les ingrédients sont réunis pour en faire un succès. J’ai pourtant failli passer à côté. Le scénario du livre, quand j’ai lu le résumé en librairie, me semblait davantage coller à un téléfilm qu’à une œuvre romanesque. J’avoue l’avoir entamé avec quelques réticences, d’autant plus qu’il touchait à un sujet qui m’est particulièrement cher, la disparition d’êtres aimés et la prise en charge de leur enfant. Le côté trop personnel devait-il prendre dessus sur l’envie de découvrir une jeune auteur ? Non et heureusement.
Un médecin et son épouse décèdent dans un accident de voiture. La lecture de leur testament nous apprend qu’ils y avaient songé et avaient voulu préparer la suite, l’éducation de leurs deux enfants, Marie et Jean. Une liste d’amis est dressée, des gens susceptibles d’élever ces enfants comme si il s’agissait des leurs. Nous nous trouvons face à plusieurs couples, potentiels candidats d’une vie à passer en compagnie de Marie et Jean, deux mômes dont le ciel vient de tomber sur leur tête, dont la détresse fait mal au ventre. Il y a ces amis, proches et fidèles, mais la théorie, lorsqu’elle se voit rejointe par la pratique, prend tout de suite une autre tournure. Qui d’entre nous n’a pas dit un jour "Si il m’arrive quelque chose, j’aimerais que… ". Il arrive, parfois, malheureusement, que cela arrive, alors il faut se décider, agir, mais là, on réalise qu’on n’a peut-être pas la force, que la peur des responsabilités à venir est étouffante, que les emplois du temps ne permettent rien et ceci et cela.
C’est un bouleversement à plus d’un titre que livre magnifiquement Yun Sun Limet. La souffrance liée à la mort, le deuil qui n’a pas vraiment le temps de se faire car il faut prendre en charge les enfants, découvrir et apprivoiser ceux-ci, modifier radicalement son mode de vie, s’apercevoir qu’on est bien plus fragile qu’on ne pensait, se trouver dépourvu face à l’imprévu… Que j’ai trouvé ces lignes belles et conformes à la réalité des choses, que d’émotions très justement décrites par l’auteur. Le tourment des adultes qui doivent affronter la réalité et aussi celui des enfants qui changent de vie et s’habituent sans pour autant jamais oublier leurs parents et ce chagrin qui sommeille à moitié au fond d’eux.
Un beau récit, pas mélo, pas sirupeux, très humain (quel talent pour décrire ce qui peut se produire en nous dans ces cas-là…).