Clara et la Pénombre de José Carlos Somoza
( Clara y la penumbra)
Catégorie(s) : Littérature => Européenne non-francophone
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Pourvu que l'on n'en arrive pas là...
Un roman d'anticipation assez époustouflant sur les déviances de l'art, qui réussit à tenir en haleine jusqu'au bout, agencé comme un roman policier.
Un enquête qui met en scène une société mercantile, d'où toute éthique est bannie, où la valeur d'une oeuvre d'art vaut bien plus que celle d'un homme.
Dans un futur qui n'est qu'après-demain, les oeuvres d'art ne sont plus peintes sur toile, mais sur des êtres humains, de préférence jeunes, si pas mineurs, traités et apprêtés comme de simples supports artistiques. Mais les iconoclastes guettent...
Les éditions
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Clara et la pénombre [Texte imprimé], roman José Carlos Somoza trad. de l'espagnol par Marianne Millon
de Somoza, José Carlos Millon, Marianne (Traducteur)
Actes Sud / Lettres hispaniques (Arles).
ISBN : 9782742744527 ; 2,98 € ; 11/09/2003 ; 549 p. ; Broché
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Les critiques éclairs (13)
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Art , argent , manipulation , exploitation, soumission
Critique de Nav33 (, Inscrit le 17 octobre 2009, 76 ans) - 2 juillet 2018
Bien qu'outrée la perspective d'utilisation d'êtres humains et en priorité de jeunes filles consentantes et grassement rétribuées comme toiles , dans des conditions extrêmes de contraintes physiques , devient plausible . A contrario , la généralisation en sous-produit d'un artisanat utilisant des êtres humains comme mobiliers est un peu moins crédibles et à mon avis plus dans le registre du simple symbole.
Point d'orgue de ces pratiques ,la destruction des toiles (humaines) au nom d'une forme suprême de l'art résonne comme les folies de massacres et de décapitation au nom de formes de religion dévoyées . Cette dernière extrémité restera caché dans un cercle sectaire , qui considère son accomplissement comme encore trop en avance sur son temps et fait l'objet de l'intrigue policière qui sert de trame au roman.
Pour le reste , comme dans le Meilleur des Mondes , les sujets sont consentants , le public accepte majoritairement , et la minorité d'opposants est considérée comme déviante. Les acteurs jusqu'au-boutiste comme l'artiste Van Tysch ou sa directrice de la sécurité , sont des fanatiques , mais il y a aussi une grande fraction de cyniques qui ne sont pas dupes et tirent les ficelles de ce business.
Pas convaincu par cet art là
Critique de Pacmann (Tamise, Inscrit le 2 février 2012, 59 ans) - 27 janvier 2015
Devenir une œuvre d’art est devenu un métier qui paie plus ou moins bien.
Sans être rétif à la science-fiction, j’ai réellement été mal à l’aise face à ce qui n’est pour moi que la description d’une autre forme d’esclavage, d’humiliation ou de torture devenue légale.
Pire encore, certaines « œuvres » ne peuvent prétendre qu’à devenir des meubles vivants (tables basses, sièges,…) s’ils sont moins présentables. Par ailleurs, les enfants ou adolescents sont particulièrement prisés pour servir de support à cet art qu’on pourrait appeler de dégénérés si en d’autres temps, on n’avait pas déjà utilisé ce vocable pour identifier un art véritable.
Malheureusement donc je n’ai pas cru un instant à cette histoire qui m’a semblé chercher sans arrêt à justifier sa crédibilité. L’option choisie était bien de faire croire à la possibilité d’un tel art et la justification de l’auteur à la fin du livre n’enlève rien à cela.
Certains y verront une critique du marché de l’art et de ses dérives mercantiles, d’autres un roman aux multiples facettes : policier, science-fiction, thriller,… moi je n’y ai vu que des élucubrations sans grand intérêt.
Quand l'art devient cauchemar !
Critique de DE GOUGE (Nantes, Inscrite le 30 septembre 2011, 68 ans) - 2 novembre 2011
Des grands, qui au prix d'une vie personnelle sacrifiée, vivent une vie sans écarts et d'une rigidité -au propre comme au figuré- effrayante, aux petits, exploités et déshumanisés au point de servir de lampes, de tables ou de chaises, sans yeux et sans oreilles ....
Un cauchemar !
Se greffe à ce thème, une intrigue policière : OK, on adhère, mais le fond de ce livre est surtout : comment une société peut-elle se constituer, aujourd'hui, à partir d'une idéologie si ignoble dans un consensus général ?
Pour moi, ce livre n'est pas un polar, mais une vraie question :
Jusqu’où peut-on aller pour sacraliser ou exploiter -officiellement- l'être humain ? Quelle place doit-on laisser au snobisme d'une société prête à tout pour exister dans la MODE ?
C'est triste, douloureux physiquement (quelle horreur, pour ces hommes et femmes qui se plient aux diktats) et moralement ...
C'est un livre à lire parce qu'il représente, si nous ne sommes pas vigilants, la réalité de demain !
L'art en question ... ou la société ?
Critique de Chakili (Floreffe, Inscrit le 30 décembre 2010, 76 ans) - 31 décembre 2010
L'histoire est traitée avec très grande originalité. Le style purement narratif est efficace et la thématique profonde. Le rythme est lent sur les trois premiers livrets sans nuire à l'intérêt d'une lecture captivante; il s'emballe dans le dernier livret par un découpage de scènes brèves successives jusqu'au dénouement final.
Le roman n'est pas moralisateur; il en est d'autant plus terrifiant que derrière ce monde de l'art futuriste, nous pensons inexorablement à notre société contemporaine (cynisme et vulgarité, capitalisme, téléréalité ...)
Somoza est réellement un auteur à découvrir. L'originalité et la profondeur de la trame sont soutenus par une habileté narrative qui vous présente un monde d'anticipation tout à fait plausible. J'ai personnellement lu le roman dans sa version originale (Clara y la Penumbra - édition "Debolsillo) et je n'ai éprouvé aucune difficulté à assimiler la terminologie futuriste qui ne figure dans aucun dictionnaire.
De l'éthique dans l'art, de ses limites
Critique de Veneziano (Paris, Inscrit le 4 mai 2005, 46 ans) - 15 octobre 2009
La trame part du postulat que tout aurait été fait dans l'art et qu'il ne lui resterait plus, pour évolution encore, que la transgression utile.
C'est comme ça, sauf contresens de ma part, que j'ai interprété ce livre.
Pour toutes ces raisons, j'ai eu du mal à l'aborder, à avancer, alors que la rencontre avec moi avait toutes les raisons d'être effectuée, vue que l'histoire de l'art est pour moi un violon d'Ingres. J'avoue avoir été heurté, avant de progresser dans la lecture comme dans une enquête dans l'indicible. Ce roman est indubitablement très fort, trop pour moi, ce qui explique ma note. J'avoue ma faiblesse, je n'ai pas été un lecteur à la hauteur : je pense qu'il vaut le Meilleur des mondes, mais il faut bien reconnaître que rien n'est épargné. Les bas instincts à l'origine d'un tel système sont bien analysés, donc avec une inévitable rudesse.
L'intrigue est bien conçue, avec méthodologie, froideur, dignes d'un chercheur en sociologie, dans le cadre d'une oeuvre de fiction, et d'une anticipation basée des désirs vils bien présents, que la télé-réalité n'hésite pas utiliser.
Tout cela est donc aussi dur, violent, que brillant.
Clara et l'art : terrifiant et presque réel
Critique de Mim (Onex Genève, Inscrite le 30 septembre 2006, 55 ans) - 11 avril 2008
J'en lirai d'autres, c'est sûr.
L'enquête m'a tenue en haleine jusqu'au bout.
C'est terrifiant car cela semble possible dans un futur proche.
J'adore et j'en redemande.
Thriller artistique et futuriste.
Critique de Nana31 (toulouse, Inscrite le 29 janvier 2006, 55 ans) - 4 mars 2008
Au-delà d'une intrigue policière ce roman nous amène à des réflexions sur l'art, ses dérives, ses limites ( jusqu'où pourrait-on aller?).
En espérant que l'on n'en arrivera pas là!
L'art en question
Critique de Nothingman (Marche-en- Famenne, Inscrit le 21 août 2002, 44 ans) - 2 novembre 2005
– Mais elles ne valent rien par rapport à l'art.
– L'art ne signifie rien devant les personnes April!
– Je ne veux pas en discuter Hirum!
– Tout l'art du monde, tout le maudit art du monde, du parthénon à Mona Lisa, du David aux symphonies de Beethoven, est de l'ordure en comparaison avec la personne la plus insignifiante! Tu ne peux pas comprendre ça?
- Je ne veux pas discuter Hirum!"
Bienvenue en 2006! Un futur proche dans lequel l'art "hyper dramatique" a détrôné tous les genres. Les toiles et les objets sont des modèles humains, des supports que l'on apprête, que l'on torture parfois, pour les mettre en condition et leur permettre d'exprimer les perversions et fantasmes des maîtres du genre, dont le ténébreux Bruno Van Tysch. Le rêve de Clara : devenir une toile et être signée, tatouée par le Maître Van Tysch lui-même. Donner son corps en entier à l'art. Fusionner avec lui.
J'ai vraiment aimé les ambiances distillées par l'auteur. C'est souvent glauque, sombre, on nage dans la pénombre. Ce roman offre aussi de nombreuses pistes de réflexion et pose beaucoup de questions. L'art a-t-il des limites? Qu'est-ce que la beauté? La vie a-t-elle un prix? On pourrait croire que ce roman dépeint une société futuriste en complète perte de repères, en voie de déshumanisation. Et pourtant, en y réfléchissant bien, ce futur semble de plus en plus proche. Un grand roman....
Tout est dans la Pénombre
Critique de Bluewitch (Charleroi, Inscrite le 20 février 2001, 45 ans) - 21 juin 2005
Terrible car l'horreur semble si proche et si réaliste que l'on ne peut s'empêcher de mettre ses propres convictions en doute. Ce qui pourrait de prime abord sembler inconcevable parvient de manière pernicieuse à prendre le dessus et à s'autosuggérer probable.
Des personnes transformées en meubles, en domestiques déshumanisés mais de luxe, jusqu'à l'ultime réussite: être dépossédé de soi pour devenir une oeuvre d'art complète, intense et purement matérielle. On peint à l'émotion, on travaille le corps à la violence, on apprête, on esquisse. Jusqu'à la folie.
Ce livre est passionnant par le sujet qu'il traite et par la manière dont il le traite, intelligement, sans théatralisation. Il titille la conscience en liant, en filigrane, ses extrapolations romanesques avec les dérives actuelles et les gouffres dans lesquels la société serait encline à tomber.
Excellent.
Clara et la Pénombre
Critique de Paracelse (Paris, Inscrite le 29 avril 2005, 61 ans) - 29 avril 2005
José Carlos Somoza, cubain exilé à Madrid, a quitté son métier initial de psychiatre-psychanalyste, pour s’adonner exclusivement à l’écriture pour notre plus grand bonheur. Et après « la caverne des idées » parue en 2002 (polar néo-platonicien échappant à tous les genres), il nous livre avec « Clara et la pénombre » un autre thriller métaphysique inquiétant, mâtiné de réflexions sur la beauté, l’éphémère et le prix de la vie.
Dans cette histoire que n’aurait pas renié un Lynch, Somoza s’intéresse aux mises en abymes qui fascinent et effraient, mélange ambigu de lumière et de clair-obscur – et s’interroge sur les dérives de l’art, et de notre société qui veut tout montrer, fascinée qu’elle est par la jeunesse et la beauté, et où l’exhibitionnisme est paré de toutes les vertus… On pense inévitablement à des artistes comme Orban, ou encore Sophie Calle, qui ont choisi de se mettre elles-mêmes en scène, et ce, depuis des années, mais on pense aussi à la Télé-réalité… Et c’est bien toute la qualité d’un écrivain contemporain futuriste que d’arriver par la fiction à retranscrire des idées qui nous touchent pourtant de près au présent.
L’écriture limpide, et parfois compulsive de Somoza, qui laisse libre court à de multiples interprétations, colle parfaitement au sujet ; à l’instar d’un Jauffret, on a parfois l’impression que les mots se diluent pour mieux laisser parler l’absurdité des vies et la dilution des existences. L’envers du décor fascine, et pourtant la frontière entre la démarche artistique et l’imposture est mince. Par l’intermédiaire de Clara, on comprend aussi qu’on peut être d’autant plus attiré par la clarté et la transparence qu’il y a quelque chose en soi qui n’y croit pas, mais qu’on refuse de voir. Avec Somoza, écrivain trop lucide, il n’est de toute façon d’expression que fragmentaire, partielle… et toute lumière cache son ombre… Qu’est-ce qui est réalité, qu’est-ce qui est illusion, tout cela n’est-il pas un jeu de dupes et de miroirs, dont l’art sait mieux que quiconque extraire les reflets ?! Mais comme le dit le personnage du livre lui-même, « toute vérité est dans la pénombre ». Alors forcément, ce livre inclassable laisse planer plus de questions que de réponses, et on n’ira d’ailleurs pas s’en plaindre.
Les déviances de l’art
Critique de Eireann 32 (Lorient, Inscrit le 7 novembre 2004, 77 ans) - 7 avril 2005
« Il acquit également juste pour l’occasion, cinq Langues adolescentes toutes nouvelles et très bien entraînées de Mark Rodgers…………………………… La Langue allongée par terre devant lui, complètement nue et peinte en rose et blanc, aveugle et sourde à cause des caches, tâta le terrain de sa tête blonde, avant de trébucher sur l’autre chaussure et continua à lécher » Ces passages font plus froid dans le dos que les meurtres et l’enquête qui en découle. La seule belle chose de ce livre est la musique qui est mentionnée un très court instant «La musique funèbre pour la reine Mary » de Henry Purcell ». A lire mais avec des pincettes.
Un dernier mot, toutes les critiques pour cet auteur étaient féminines, donc Messieurs un petit effort, lisez Somoza cela vaut la peine.
Fascinant et terrifiant en même temps
Critique de Flyingcow (Paris, Inscrite le 11 février 2005, 50 ans) - 22 mars 2005
Alors là les p’tits gars. Faut avoir le coeur et la cervelle bien accrochée. Il s’agit a priori d’une histoire de tueur en série, en surface. C’est le livre le plus dérangeant que j’ai jamais lu. L’ambiance est glauque, bizarre, et terrifiante au niveau psychologique. Imaginez… Dans votre maison, les meubles, les accessoires sont humains. Vous vous asseyez sur des sièges humains, vous posez vos verres sur des tables humaines. Le porte-serviettes de votre salle de bain est lui aussi humain. Des humains qui servent de lampes, de siège… pendant des heures, indépendamment de la douleurs que subissent leurs muscles, leur colonne vertébrale.
Mais ce n’est pas tout. Il en est fini de la peinture traditionnelle sur toile, Les peintres utilisent des “toiles humaines". Des jeunes filles, des enfants, des hommes, des vieillards. La plupart du temps nus et peints. Il doivent rester des heures dans la posture que le peintre leur a ordonné de garder. On peut les louer, ou les acheter. Ils restent chez vous 8h dans la même position, sans broncher… Évidement ils sont très bien payés pour ça mais quand même…
Ce bouquin est tout aussi fascinant qu’il est presque insupportable à lire. Un petit bijou.
L'Homme est-il un monstre ?
Critique de Sahkti (Genève, Inscrite le 17 avril 2004, 50 ans) - 10 juin 2004
Tout est là, dans le langage, qui traduit la conception qu’on se fait désormais de la personne, de l’être humain. réduit au rang d’objet, on peut tout exiger de lui, tout se paie, tout se vend, s’achète et se détruit. C’est effrayant.
Cet assassinat n’empêche pas la jolie Clara de fantasmer sur le statut de femme-objet d’art, elle rêve de devenir l’égérie du grand Van Tysch. Peu importe si le fait de devenir une toile humaine est avilissant, elle ne pense qu’à ça. Un esclavage moderne où fric et bon goût flirtent dangereusement.
Somoza nous offre ici un roman noir, dans lequel se situe une intrigue policière, mais ce n’est, à mes yeux, pas vraiment là l’essentiel. Celui-ci se situe ailleurs, dans ce nouveau jeu établi des relations humaines, dans la dépravation de l’âme et l’avilissement de l’Homme. Les êtres humains se transforment en objets, consciemment, volontairement ou contraints par la vie. Quel avenir pessimiste que celui qui nous est ici donné à lire !
Mais est-ce vraiment le futur ? Ces femmes-objets que sont les jeunes mannequins qui défilent pour les grands couturiers au prix de tous les sacrifices (la guerre au moindre gramme de chair en trop n’est qu’une des facettes de cette tyrannie de la mode à tout prix) ne sont-elles pas déjà les précurseurs de ces femmes-toiles humaines de Somoza ?
Somoza ne nous fait pas directement la morale (enfin il ne me semble pas), mais les questions induites par son roman sont insupportables. Notre société débloque donc à ce point ?
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