Mal de mère de Rodéric Valambois

Mal de mère de Rodéric Valambois

Catégorie(s) : Bande dessinée => Divers

Critiqué par Shelton, le 8 août 2015 (Chalon-sur-Saône, Inscrit le 15 février 2005, 68 ans)
La note : 10 étoiles
Visites : 3 114 

Touchant et de qualité !

La bande dessinée est depuis longtemps considérée comme un genre littéraire à part entière, du moins par ceux qui la lisent. En effet, depuis plus d’une décennie, elle a exploré, livre après livre, avec des auteurs de tous les âges, en compagnie de dessinateurs femmes et hommes, dans toutes les langues, les différentes façons de raconter des histoires. La bédé a fait rire, pleurer, trembler, apprendre, réfléchir, comprendre le monde… Et, pourtant, assez paradoxalement, allez comprendre pourquoi, le grand public croit encore que la bande dessinée est un genre pour faire rire les petits quand ils ne savent pas bien lire…

C’est une erreur, une lamentable méprise et le dernier ouvrage de Rodéric Valambois en est la preuve indiscutable ! Rodéric Valambois, est un auteur de bandes dessinées qui a décidé de raconter son histoire avec la méthode narrative qu’il maîtrisait le mieux, la bédé. Oui, je sais bien, raconter son histoire peut être un peu banal, surtout si vous n’avez que la même vie que tout le monde… Encore, faudrait-il savoir ce qu’est la même vie que tout le monde… chaque vie n’est-elle pas unique ?

Rodéric Valambois nous offre donc ce que l’on appelle un très bon roman graphique. L’expression laisse entendre qu’il s’agit là d’une fiction, mais il n’en est rien. C’est bien sa vie que Rodéric raconte, une vie qui n’a pas été drôle tous les jours, une existence dont il n’a perçu le sens que tardivement, car, dans sa famille, des parents et trois enfants, il semble qu’il ait été le dernier à comprendre que sa mère était une alcoolique…

Attention, nous ne sommes pas dans un récit à la Zola, sa mère n’est pas Gervaise et l’auteur a évité d’être larmoyant, triste, mélancolique. Certes, comme il le reconnait lui-même, tout cela ne fut pas plaisant à vivre au quotidien mais il y eut aussi de belles séquences de vie, des éclats de rire et des moments de décompression… Pour rendre cela, Rodéric Valambois a découpé son ouvrage en petits chapitres, en petites séquences de vie, en scénettes, cette organisation de la bande dessinée dédramatisant la globalité du récit…

Car, pour le fond, nous sommes là en présence d’une famille qui va se dissoudre au fur et à mesure, avec un père qui se mure dans son travail, un frère aîné qui vit sa vie sans prendre le temps de comprendre ce qui se passe à la maison, un Rodéric qui ne capte pas tout car déjà un peu dans ses rêves de création, une petite sœur qui comprend tout et souffre plus que ce que les adultes ne le croient, une mère qui décroche de verre en verre, de bouteille en bouteille et qui sombre dans le néant, le reste de la famille qui reproche à tous les autres l’alcoolisme de la maman… Rude !

Rodéric Valambois a pris le temps de laisser les évènements décanter et son récit garde la distance, une distance salutaire pour lui mais qui permet surtout au lecteur de voir les causalités se mettre en place, les conséquences s’enchainer, les faits arriver. Jamais il ne porte de jugement moral, ni contre sa mère, ni contre son père, ni contre tous les autres ou le monde entier. Il raconte ce qu’il a vécu, montre comment il a réussi à se construire, comment il a pu, voulu, un jour, construire sa propre vie avec maintenant femme et enfants…

Tout ce qui ne tue pas fait grandir, certes, mais faut-il avoir les ressources pour y arriver dans cette situation. Il a un regret, une sorte de questionnement qui persiste à murmurer au fond de lui et il termine la bande dessinée avec ces mots : « Ma mère est morte. Je n’ai jamais su pourquoi elle buvait. ».

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