Une chronique ouïghoure

Dans les années soixante-dix en Chine, le narrateur, un écrivain qui a été envoyé en exil dans le Xinjiang, province chinoise peuplée en majorité par les Ouïghours, fait un jour la rencontre de Maerke. C'est un menuisier ouïghour que les villageois surnomment affectueusement « l’Idiot », car il justifie son indiscipline envers les cadres du Parti en citant jusqu'à l'absurde des passages entiers du Petit Livre Rouge. Aliya, sa femme, est réputée quant à elle pour sa grande beauté et ses magnifiques yeux gris-clair. Intrigué par ce couple atypique, le narrateur va peu à peu se lier d’amitié avec Maerke et Aliya.

Je ne saurai dire dans quelle catégorie classer ce court roman assez étrange : est-ce donc un conte, une longue nouvelle, une chronique ? Un peu de tout cela sans doute. Certes le récit est ancré dans un réel autobiographique, puisqu’il fait écho au propre exil de l’auteur (Wang Meng a été déporté pendant quinze ans dans le Xinjiang), mais le ton oscille aussi du côté du conte humoristique. A ce titre le personnage de Maerke en effet n’est pas sans rappeler parfois la figure des « fous qui étaient sages », tandis que certains passages brocardent joyeusement l’ubuesque bureaucratie communiste des Hans.

Aliya, la femme de Maerke offre un contrepoids à un récit qui aurait pu, sans sa présence, s’apparenter à une farce politique. Sa douceur, ses silences, sa maladie, teintent la narration d’une gravité que ne laissait pas présager les premières pages du livre. A travers elle, Wang Meng rééquilibre le roman en l’imprégnant autant de tristesse que de mélancolie, rappelant au lecteur le goût amer de l'exil et de l'oppression.

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  Des yeux gris clair [Texte imprimé], roman Wang Meng trad. du chinois par Françoise Naour

  de Meng, Wang Naour, Françoise (Traducteur)
  Bleu de Chine / Chine en poche
  ISBN : 9782910884550 ; 8,50 € ; 09/09/2002 ; 124 p. ; Poche

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