L'intrus de William Faulkner
( Intruder in the dust)
Catégorie(s) : Littérature => Anglophone
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Un excellent Faulkner
N’ayant pas été, ces derniers temps, attiré en librairie par un grand auteur, je me suis donc tourné vers ma bibliothèque pour y trouver ce que je savais qui n’allait pas me décevoir…
J’ai senti que Faulkner avait une envie de prendre l’air et « L’intrus », le premier livre que j’ai lu écrit par lui, m’est arrivé dans les mains.
Premières lignes : « Il était exactement midi, ce dimanche là, quand le shérif parvint à la prison avec Lucas Beauchamp. Mais toute la ville (et même tout le comté) savait depuis la veille au soir que Lucas avait tué un blanc. »
Nous voilà directement plongés dans l’affaire ! Un blanc a été tué, nous sommes dans le Sud, un noir est coupable, tout est donc dans l’ordre… Mais voilà, un gosse blanc, un jeune noir et une vieille femme blanche vont perturber toute cette belle logique. Comme le dit Faulkner à plusieurs reprises : « Si vous avez, en marge du train habituel, quelque chose que vous devez faire et qui ne peut attendre, ne perdez pas votre temps avec les hommes ; ils agissent d’après ce que votre oncle appelle les lois et les règlements. Allez chercher les femmes et les enfants : eux ils agissent d’après les circonstances. » C’est ce que le jeune Charles, neveu de Gavin Steven, l’attorney que nous retrouverons dans « Requiem pour une nonne », va faire avec Alek Sander, son domestique noir, et Miss Habersham (dont les origines sont également évoquées dans « Requiem pour une nonne) qui a soixante douze ans.
Tout au long du livre ces trois personnages vont secouer les hommes en place pour tenter d’éviter à Lucas Beauchamp d’être lynché, aspergé d’essence et brûlé par une foule de blancs en colère. Colère qui pourrait d’ailleurs retomber sur tous les autres prisonniers noirs de la prison.
Voilà ce qui servira de support à Faulkner pour décrire ce Sud aux idées raciales si bien ancrées, ces petits blancs qui ne pensent qu’en fonction de schémas et qui n’ont pas encore intériorisé les idées du Nord, par ailleurs bien mal appliquées là-bas aussi.
Le noir, quant à lui, est décrit ici comme un être dont la principale arme est la patience, la discrétion, la soumission. Il est présent partout, mais il se fait petit et se terre au moindre danger. Contre cette patience, l’homme blanc est désarmé dit l’auteur. Il insiste aussi sur le fait que le noir se comporte comme le blanc le souhaite, et s’y attend, de la même façon que le noir s’attend au comportement du blanc qui s’y conforme tout autant.
Mais tout au long de son histoire, Faulkner, qui adore les digressions et les fouille tout autant que les éléments importants, aborde bien d’autres sujets lorsque l’idée lui en vient. Gavin Steven referme la porte de la cellule de Lucas Beauchamp et Faulkner écrit : « …tandis que son oncle sortait en tirant la porte derrière lui, le pêne massif pénétrant bruyamment dans sa gâche avec un bruit sourd et huilé, irréfutable et sans appel, comme cet universel jugement dernier qui retentira, bien graissé, lorsque, ainsi que le disait son oncle, les machines de l’homme auront finalement fait disparaître celui-ci et l’auront effacé de la terre, sans profit maintenant pour elles-mêmes puisqu’il ne resterait rien à détruire, et auront clos sur leur propre apothéose sans ancêtres la dernière porte ajustée à l’émeri, derrière une serrure sans timbre avertisseur qui ne répondra qu’au dernier coup de l’éternité… » Et des idées, il y en a à la pelle !…
Oui, le style de Faulkner est difficile à suivre tant les digressions sont nombreuses et tellement il les fouille. Vous passez sans cesse entre des virgules, des tirets et des parenthèses qui peuvent faire vingt lignes. J’ai trouvé une seule phrase qui fait trois pages ! Mais, surtout, ne vous avisez pas de sauter des lignes ou des paragraphes, car vous risqueriez bien de rater ainsi des éléments importants ou des idées des plus intéressantes émises par l’auteur.
Dostoïevki secoue, nous dit Saule, Faulkner aussi ! N’est ce pas tout l’intérêt des grands auteurs ? Et Faulkner en fait certainement partie !
Les éditions
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L'Intrus [Texte imprimé] William Faulkner traduit de l'anglais par R.-N. [René-Noël] Raimbault et revu par Michel Gresset
de Faulkner, William Gresset, Michel (Traducteur) Raimbault, René-Noël (Traducteur)
Gallimard / Collection Folio.
ISBN : 9782070364206 ; 8,60 € ; 26/07/1973 ; 306 p. ; Poche
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Les critiques éclairs (2)
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Pas du tout pour moi
Critique de Sahkti (Genève, Inscrite le 17 avril 2004, 50 ans) - 27 août 2007
A suivre avec d'autres titres de l'auteur, histoire de confirmer ou non mes impressions.
Western à Yoknapatawpha
Critique de Cuné (, Inscrite le 16 février 2004, 57 ans) - 29 juin 2005
Secondaire car elle avance à pas de plombs, et si on veut considérer l'intrigue on est très certainement totalement perdus dans les incessantes digressions à chaque phrase. Mais comme effectivement, elles durent en moyenne 20 lignes, avec bien entendu quelques une très courtes mais aussi de nombreuses sur plusieurs pages... Il faut lire avant tout ces à-côté, s'y plonger, les méditer, et être surpris - heureusement- par un retour à l'histoire qui nous permet de faire le point sur l'assassin, de temps à autre...
Vous dire que j'ai aimé, non, ce serait mentir. Ce n'est pas du tout, du tout, ce que j'aime chez un auteur.
Par contre, j'ai noirci 4 pages de notes, j'ai lu à haute voix certains passages, j'ai appris une construction littéraire et une sonorité réellement différente, et pour ça, j'ai apprécié ma lecture. Par exemple les pages 191 à 198 où l'oncle explique sa vision des Etats-Unis, de l'homme américain, de l'homogénéité comme absolu fondateur d'une nation.
Pour la beauté des mots décrivant du banal :
" Eux disparus, la Place et la rue furent de nouveau désertes bien que pendant un moment encore continuassent de sonner les cloches habitantes du ciel citoyennes dépossédées de l'air sans limite trop hautaines trop sereines pour la terre rampante cédant sans hâte coup par coup au frémissement souterrain des orgues et à la ronde imperturbable et frénétique des pigeons persévérants."
Ou celle des idées aussi :
" Souviens-toi seulement qu'on peut supporter n'importe quoi, accepter n'importe quel fait (il n'y a que les hommes qui escamotent les faits) pourvu qu'on n'ait pas besoin de les regarder en face; qu'on peut l'assimiler en détournant la tête et en tendant la main derrière-soi, comme le politicien accepte le pot de vin."
Et puis un chapitre 11, le dernier, tout à coup extrêmement drôle, (non pas que l'humour soit absent du reste du roman, la causticité est présente à plusieurs endroits), avec une chute pour refermer la dernière page en souriant....
J'ai souri, donc, mais j'ai surtout été contente d'être arrivée au bout, laborieuse et appliquée, rendez-vous dans plusieurs longs, longs mois pour le second, Mister Faulkner !
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