LA MAISON SERT PAS LES NEGUES ET ENCORE MOINS LES PIAFS

ALTO SOLO d’antoine volodine Isbn 2-7073-1385-8


«LA MAISON SERT PAS LES NEGUES ET ENCORE MOINS LES PIAFS»

Publié en 1991 par les éditions de Minuit, ce roman me semble être le livre qui installa les premières bases du monde post-exotique que développe Antoine Volodine depuis plus de vingt ans.

L’action, les évènements décrits ont lieu entre l’après-midi du 27 mai... et le matin du 27 juin dans une ville dénommée Chamrouche
« C’est l’histoire d’un homme» écrit l’auteur, puis de «deux hommes. En fait ils sont trois», Aram, Matko et Will. Ils sortent de prison sous liberté conditionnelle à leur grande surprise.

Mais c’est aussi l’histoire d’un oiseau , un oiseau blessé lors d’une bagarre avec les frondistes. Il s’appelle Ragojine. Puis s’ajoutent un second oiseau, un clown, un violoncelliste, les membres d’un quatuor dont l’altiste qui «archet en main voguait jusqu’à des univers décalés».

Tous combattaient le frondisme qui avait le pouvoir dans le nord du pays alors que la guerre continuait dans le sud.

Antoine Volodine présente chaque personnage par quelques traits physiques et de caractère. La plupart sont des résistants ou des victimes du frondisme qui domine le peuple avec à sa tête le tyran Basynt Zagoebel.
«Basynt Zagoebel est un homme des années quarante, il le sera jusqu’à sa mort. Voilà pourquoi, alors qu’on abordait les années quatre-vingt-dix, l’air avait des relents d’années cinquante et même quarante, et des lueurs de gabardines en cuir, et une consistance un peu fauve, comme dans les remous qui particularisent le sillage des chiens et des maîtres-chiens».
Exemple ; l’annonce affichée dans les commerces de la ville, que j’ai reprise en titre de cette critique.


Le centre de l’action est la confrontation entre les spectateurs du concert de musique classique et les festivités populaires organisées par les frondistes à l’extérieur de la salle de concert.

Le concert sera interrompu brutalement par les hommes de main de Basynt, les musiciens et spectateurs molestés par la foule des «fêtards» s’en donnant à coeur-joie sur ces représentants des «élites».

L’auteur est très efficace dans la description des tensions qui montent, de la violence, de l’angoisse qui comme «une toile compacte, collante et lourde étaient descendues sur nous..» qui se termine par un hallali du «peuple» et la fuite éperdue des survivants , blessés pour la plupart.


J’ai noté l’apparition du verbe «RAUQUER» qu’il utilisera souvent par après, l’importance donnée aux OISEAUX dont la symbolique remonte à la nuit des temps, dont le corbeau qui était associé à la mort puisqu’il fréquentait les champs de bataille. Mais aussi un passeur, un guide, un protecteur.

L’oiseau symbolise souvent l’esprit humain (l’âme) ou le potentiel humain à échapper aux liens avec la vie terrestre et d’accéder à une réalité spirituelle plus élevée, la possibilité de voyage de chacun.

Un des survivants imagine d’ailleurs et regarde par la fenêtre :»En fait, ce n’est pas une fenêtre, mais l’ouverture d’une caverne où habitent des oiseaux.Dehors, tout est à pic, tout est bleu: nuages bleus, soleil bleu, abîmes bleus. Il s’élance.»

Quelle oeuvre! A voir les développements de ces thématiques depuis vingt ans mais aussi des différents auteurs Bassman, Draeger, Kronauer,...!

Il paraît d’ailleurs que lors d’entretiens à propos de ses livres, Antoine Volodine parle de «NOUS avons voulu écrire....»

J’aime les auteurs qui ont créé un univers très personnel à force de travail et de conviction..

• 

  Alto solo [Texte imprimé] Antoine Volodine

  de Volodine, Antoine
  les Éditions de Minuit
  ISBN : 9782707313850 ; 14,00 € ; 30/08/1991 ; 125 p. ; Broché

  Go Amazon