Kyôto de Yasunari Kawabata
(Koto)
Catégorie(s) : Littérature => Asiatique
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Plaidoyer pour la nature
"Pays de neige" du même auteur m’avait déplu pour son thème, une apologie de la geisha, ces jeunes filles de 15 ans à peine, souvent d'origine modeste qui n'avaient comme seules ressources que se soumettre aux bons plaisirs des hommes mûrs, mariés et en charge de famille.
Jamais l'auteur n’avait eu l’idée de donner la parole à ces filles, se contentant de décrire le bonheur ressenti par le héros à leur contact, et se donnant bonne conscience en répétant qu'après tout, ces filles étaient amoureuses de lui et se contentaient de ces quelques instants de bonheur volés.
Dans "Kyoto", Kawabata ne peut éviter de remettre ce thème sur le tapis (simple obsession de sa part ? ou plus simplement désir de mettre l'accent sur les us et coutumes japonais ?), mais heureusement, ce sujet ne fait l’objet que de quelques lignes dans le récit.
Après avoir lu "Kyoto", plus personne n'ignorera qu'au Japon, on sait faire la fête sous tous les prétextes : il y a la fête du Gion, l'embrasement du Dai-mongi le 16 août où sont allumés les feux de l'escorte qui illuminent les montagnes, le rite du passage de l'été, la fête d’ Aoi du 22 octobre, une fête historique, la fête du feu, la fête des coupeurs de bambous, la fête des Tubercules et des tas d’autres cérémonies, comme l'offrande des Potirons, la fête du concombre, la fête de la Mauve ou le festin de l’eau sinueuse,…
En utilisant comme toile de fond toutes ces fêtes traditionnelles japonaises, l'auteur a lié l’histoire de deux jeunes filles, l’une vivant en ville dans un magnifique magasin dans le style du vieux Kyoto, tandis que l’autre travaille à la campagne dans une entreprise de bois de construction de Kitayama.
Ce qui m’a enchanté dans ce livre, c’est ce formidable plaidoyer pour la nature qui transparaît à chaque page. Des jeunes gens se téléphonent, se rencontrent, devinez où ? Non pas dans le dernier lieu branché pour se trémousser, non plus pour visionner le dernier Quentin Tarantino, ou encore rêver devant les vitrines de mode..
Non, ils se donnent rendez-vous pour aller admirer les camphriers, les jeunes feuilles d’érable, voir la cueillette du thé, les cerisiers du Heian, les cryptomères de Kitayama "quand je vois ces arbres qui se dressent bien droits, si nets, mon coeur se libère", ou pour cueillir les pointes de prêles avec "leurs tiges longues et volumineuses".
"Dans ce monde, si l'homme n'existait pas, une ville comme Kyoto n'existerait pas non plus, il n'y aurait que des forêts sauvages et des champs d’herbes folles. Et ici, ce serait le domaine des sangliers ou des cerfs. Pourquoi les hommes existent-ils ?
Ils sont effrayants… "
"N’importe quelle fleur, selon le lieu, le moment où on la voit, peut nous fasciner"
Roman nostalgique sur ces splendeurs japonaises qui lentement mais inexorablement disparaissent au même rythme que ces étoffes anciennes de Tatsumura, remplacées peu à peu par des tissus occidentaux.
Les éditions
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Kyôto [Texte imprimé] Yasunari Kawabata,...
de Kawabata, Yasunari
le Livre de poche / Le Livre de poche.
ISBN : 9782253041535 ; 6,20 € ; 01/04/1987 ; 189 p. ; Poche
Les livres liés
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Les critiques éclairs (8)
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Ode à la nature et affrontement entre deux Japon
Critique de OC- (, Inscrit le 4 mars 2011, 27 ans) - 17 août 2014
Ce roman est aussi l'occasion de belles descriptions de la Nature japonaise et des jardins ou serres de Kyoto.
Néanmoins, j'ai trouvé les personnages et l'intrigue trop pâles, sans réelle couleur.
Nostalgie
Critique de Débézed (Besançon, Inscrit le 10 février 2008, 77 ans) - 1 décembre 2013
Dans cette merveilleuse ville millénaire, Chieko, jeune fille unique adoptée par un couple de commerçants en gros de tissus pour kimonos, est convaincue qu’elle est une enfant trouvée mais ses parents lui affirment qu’elle n’a pas à craindre cette infamie, elle n’a pas été trouvée dans la rue mais ravie à ses parents dans un parc. La jeune fille finit cependant par connaître la vérité quand elle rencontre celle qui est sa sœur jumelle, celle qui lui raconte ses origines, celle qu’elle va essayer d’inclure dans sa vie… L’occasion pour l’auteur de traiter le thème du double : filles jumelles, fleurs doubles des cerisiers rouges, paupières doubles de la fillette rencontrées par le père dans une maison de thé…
Mais la véritable héroïne de ce roman n’est pas la jeune fille mais Kyôto, la ville si chère à Kawabata qu’il ne se lasse pas de contempler, de décrire, de raconter, du cœur de la vieille cité jusqu’aux sommets des cinq collines couvertes de forêts merveilleuses et de multiples temples. Cette ville qu’il appelle encore « La Capitale » qu’elle fut avant que Tokyo le devienne et qui incarne le Japon éternel comme cette luxuriante végétation qui meurt et renait chaque année. Et pourtant cette éternité bute sous le poids de la roue du temps : les fleurs fanent, les filles perdent leur éclat, les parents vieillissent… et Kawabata, voit, lui, avec terreur sa vieillesse, porteuse de déchéance, arriver inéluctablement. Même le Japon éternel vivant encore à Kyôto est menacé par les assauts de la modernité : l’artisanat de haute qualité ploie devant l’industrie productiviste, l’art traditionnel se perd, la création disparait. Nostalgie du Japon traditionnel s’effaçant avec sa civilisation et ses valeurs ancestrales pour laisser la place à une société mercantile et puérile. Une page se tourne le Japon change, la tradition se meurt, l’ère de Kawabata s’achève, on sent dans la lecture de ce texte comme une résignation, comme si le maître avait déjà pris la décision d’en finir vite avec cette vie. « L’appel du passé. La solitude du présent ».
Un texte d’une grande sensibilité, plein de délicatesse et d’élégance, un hommage à sa ville, un hommage au Japon éternel, un hommage aux jeunes filles, même aux très jeunes filles, qu’il évoque avec beaucoup de tendresse et une sensualité qui confine à l’érotisme quand il décrit la rencontre entre les deux jumelles, «… la chaleur du corps de Naeko qui la couvrait des pieds à la tête se transmettait à Chieko, la pénétrait profondément. C’était une douce intimité, que ne peuvent rendre les mots ». Tout Kawabata transpire dans ce court roman.
Fleurs et tissus...
Critique de Sissi (Besançon, Inscrite le 29 novembre 2010, 54 ans) - 4 mai 2013
Quel beau voyage au cœur de Kyôto, la « Capitale » qui refleurit et dont on imagine les cryptomères, les camphriers, toutes les variétés de fleurs, et les bois de bambous !
Une ode à la simplicité, aux promenades dans les jardins, mais aussi au travail artisanal, lent et méticuleux, celui des kimonos et des ceintures qu’on tisse au rouet, après en avoir longuement conçu le motif.
On visualise très bien le vieux M. Sata réaliser ses « esquisses de kyôzome » (étoffes teintes, spécialités de Kyoto), on apprend le nom des différents tissus, on se promène dans les maisons de thé, on imagine toutes les fêtes traditionnelles avec leurs costumes chatoyants et leurs palanquins…et on déplore que beaucoup d’entre elles disparaissent au fil du temps, que les bus remplacent les tramways, que les tulipes envahissent les jardins botaniques et que certains métiers ou commerces soient condamnés à mourir à plus ou moins long terme, supplantés par le progrès et l’occidentalisation du Japon.
Alors, on se sent triste et nostalgique…
Deux soeurs
Critique de Dirlandaise (Québec, Inscrite le 28 août 2004, 69 ans) - 30 novembre 2012
Très beau roman. L’amour de Kawabata pour la ville de Kyôto imprègne chaque page, chaque ligne. Il décrit avec douceur et subtilité le monde du commerce toujours changeant et en voie de s’américaniser. Les personnages affectionnent la nature, effectuent de longues promenades en contemplant les montagnes, le vert des pins et les flamboyantes couleurs des fleurs de cerisiers. Le roman débute au printemps et se termine en hiver. Chaque saison amène son lot de beautés, de fêtes traditionnelles et l’écrivain enchâsse son histoire dans cet écrin que constitue la nature japonaise changeante et toujours renouvelée.
Un chef-d’œuvre dont la richesse littéraire et artistique n’a cessé de m’éblouir tout au long de ma lecture. La prose de Kawabata est d’une élégante sobriété et se teinte d’une douce nostalgie en décrivant un monde fortement dominé par les différences de classes sociales, un monde voué à disparaître face au modernisme occidental.
L'Univers dans un vase !
Critique de Frunny (PARIS, Inscrit le 28 décembre 2009, 59 ans) - 19 octobre 2012
En 1968, il reçoit le prix Nobel de littérature, ce qui contribue à faire largement connaître son œuvre en Occident. Pourtant, il met lui-même fin à ses jours en 1972.
Au gré des allées et venues de Chieko - personnage principal du roman - le lecteur entreprend une visite touristique de la ville de Kyôto. Une présentation des traditions, des fêtes et des cortèges.
La Nature est omniprésente au travers les arbres et les fleurs.
Avec les personnages, nous longeons des avenues bordées de saules pleureurs, de camphriers, de lespedèzes blanches. Bambous et cryptomères de Kitayama se dressent majestueusement pour rappeler à l'Homme sa véritable place dans l'univers .
Tant de beauté qui nous fait presque oublier l'histoire de Chieko, une enfant trouvée, abandonnée à la naissance par ses parents. Elevée par Sara Takichiro; grossiste en tissus de kimono qui font la célébrité de Kyôto.
Chieko va rencontrer fortuitement sa soeur jumelle, une jeune fille de la campagne... son double !
Un roman tout en sensation, au rythme lent et sensuel.
J'ai aimé la juste harmonie entre tradition, nature et histoire. Le style est limpide, un ouvrage qui se lit d'une traite .
Un excellent moment de lecture !
Mélancoliques saisons...au Japon.
Critique de Hirondelle. (, Inscrite le 24 avril 2012, 62 ans) - 25 avril 2012
Les titres disponibles sont assez rares.
Je me laisse tenter par " Kyôto".
Dès le premier chapitre, je retrouve immédiatement le style poétique finement ciselé qui m'a précédemment séduite.
"Une journée de printemps tout en douceur, où le ciel s'embrume comme un arbre en fleurs", ..."deux souches de violettes cachées dans un érable aux bourgeons rouges",..."une danse de papillons blancs" …une vieille lanterne en pierre"..."des grillons"...
Le décor paisible est planté.
Il servira d'écrin à une histoire troublante.
CHEIKO, jeune-fille de vingt ans, est-elle heureuse?
Entre son père, Takichiro, Shige, sa mère, et quelques amis fidèles, elle mène une vie bien rangée, choisie par ses parents, dans un milieu traditionnel: celui consacré au négoce des étoffes destinées à la confection des Kimonos et celui du tissage des ceintures.
On assiste au travail artistique, méticuleux et épuisant, des tisserands, représentés par Hideo, dans "la cité des kimonos".
Ce jeune-homme ne ferait-il pas un bon gendre?
Cheiko se déplace beaucoup.
Elle court les fêtes traditionnelles, aux noms exotiques, qui jalonnent l'année: ainsi de la Fête de la Mauve, ou de la Fête des Coupeurs de Bambous, ou de la Fête du Feu, ou encore celle des Feux de l'Escorte.
Nous trottons à ses côtés.
C'est la grande Fête du Gion.
Nous sommes témoins d'un choc qui va faire basculer sa vie.
Elle se savait enfant abandonnée, mais voici qu'elle se trouve en présence, tout à fait par hasard, de son double, sa "moitié",... sa soeur jumelle : Naeko.
Le rapprochement souhaité par Cheiko sera-t-il possible?
Les sentiments éprouvés par l'une seront-ils partagés par l'autre?
Malgré une certaine complicité lors de leurs brèves rencontres, elles restent malgré tout " une jeune -fille de la ville" et "une jeune-fille de la montagne".
Naeko est réellement "heureuse" lorsque sa soeur lui rend visite. Mais elle s'obstine à l'appeler" Mademoiselle".
Kawabata dépeint les émotions les plus intenses avec délicatesse,(scène de l'orage),et avec pudeur.
On est au diapason.
On tourne les pages avec …discrétion.
On ne veut pas connaître la fin trop vite !
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La ressemblance à s'y méprendre des deux soeurs sera cependant à l'origine d'une équivoque qui va compromettre à tout jamais la nouvelle vie imaginée par Cheiko.
Kawabata nous offre une histoire mélancolique, où, toujours sublime en toile de fond, la nature est décrite dans un esthétisme des plus purs.
"Les cryptomères (de Kitayama)", "aux troncs blancs de grosseur parfaitement égale, polis, étaient de toute beauté"..."on dirait des objets d'art"...
"Ces troncs dressés, côte à côte, parfaitement droits, étaient splendides. Le toupet de feuilles laissé à la cime semblait dû à la main délicate d'un artisan"....
On ne s'en lasse pas....
" KYÔTO" Ce roman est paru en 1962
Une année à Kyoto
Critique de Cafeine (, Inscrite le 12 juin 2007, 50 ans) - 3 août 2011
En parallèle, on suit Chieko, à la recherche de son passé, d'une partie de son identité.
Voilà en deux mots, maladroitement et froidement l'histoire, ensuite, la force de Kawabata est dans la douceur de son écriture, dans sa manière de rendre hommage à la nature, dans l'évocation d'un temps qui n'existe déjà plus.
Il n'est ici question que d'effleurer, tout semble fragile...ou presque.
Intérêt romanesque ou intérêt documentaire ?
Critique de Alma (, Inscrite le 22 novembre 2006, - ans) - 9 mars 2009
Cela pourrait être Chieko, personnage pivot autour duquel gravitent tous les autres, qui pendant l’année où se déroule l’action, vit une étape importante de son existence : elle découvre sa jumelle et par là-même celle qu’elle aurait pu être, le pouvoir qu’elle peut exercer sur les garçons et réfléchit sur le commerce de son père. Elle quitte le monde de l’adolescence pour entrer dans celui des adultes.
Mais le personnage central de l’oeuvre ne serait-il pas plutôt la ville de Kyoto? Déjà, le titre incite à le penser ; de plus, la ville est décrite à chacune des saisons , comme une femme qui changerait de kimono . Le lecteur, en compagnie de Chieko, découvre ses différents parcs, ce qui donne lieu à de magnifiques passages descriptifs qui s’intégrent bien au récit, et parcourt les rues qui sillonnent la ville . Les différentes fêtes qui ponctuent l’année offrent à l’auteur l’occasion de rappeler leur origine, de donner à voir les défilés et les personnages qui y sont incarnés…. Je dois avouer que je me suis perdue dans tous ces passages à intérêt documentaire qui me semblent parasiter l’intrigue, noyée dans tous ces noms aux consonances exotiques. Ce qui pour le lecteur japonais est évocation des traditions est devenu au fil des pages, pour moi, lectrice occidentale, un domaine dont je me suis sentie progressivement exclue, faute de connaissances historiques .
La ville de Kyoto est-elle le cadre du roman dont la protagoniste est Chieko ? Ou bien est-ce le personnage de Chieko qui est le prétexte à une évocation des différents visages de la ville de Kyoto, ancienne capitale d’un Japon traditionnel menacé par le modernisme ?
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