Sans Winslet et DiCaprio, ça marche aussi

« Lundi 11 mai 19., 16 heures. Dès que l’Etoile-des-Mers fut par le travers des îles Skerries, le commandant Davis dit au pilote qu'il n’avait plus besoin de ses services et qu’il allait le débarquer avant même de changer de route ». C'est le plus grand paquebot du monde, il commence là son voyage inaugural et on demande à son capitaine de battre à tout prix le record de vitesse entre Liverpool et New York. Cela vous rappelle quelque chose ? Peisson, capitaine de marine marchande lui-même, raconte, en 1932, l’histoire du Titanic, mais il en fait un roman dans la mesure où les événements sont vus par les yeux des officiers de bord et marins. C’est d’ailleurs un peu la loi du genre chez un auteur comme Edouard Peisson qui appartient à l’Ecole Prolétarienne comme Henri Poulaille et Charles Plisnier par exemple : une peinture du prolétariat de l'intérieur, au contraire des Zola et Maupassant.
Mais rien de militant ici. Juste un superbe roman sur la mer, personnage principal, sur le bateau lui-même, monstre imparfait, sur ceux qui l’ont construit, monstres à leur manière, sur les passagers dont on entend les rires écervelés dans les coursives, et sur les hommes de la mer dont la dignité est de résister à la puissance des flots et à celle de l’argent. Alors que les marins sont décrits comme des êtres humains complexes et globalement positifs, les passagers apparaissent, sans que l’auteur y mette la moindre méchanceté, comme de la volaille en quelque sorte. On n’a pas une extrême considération pour les nantis chez Peisson : « Ce pont était animé comme une volière ; les femmes riaient, pépiaient, puis s'envolaient dans un frou-frou de robes, et les hommes parlaient sur un ton grave comme des corbeau qui conversent en sautillant d’une branche à l’autre. » Bon. Je change de branche.

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  Parti de Liverpool

  de Peisson, Édouard
  B. Grasset
  ISBN : 9782246808497 ; 3,18 € ; 01/01/1967 ; 254 p. ; Broché

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