RêvHaïti de Kamau Brathwaite
Catégorie(s) : Théâtre et Poésie => Poésie
Visites : 3 468
Et la présence houleuse de la mer qui fractionne l'Histoire.
Pratiquement inconnu dans nos pays Edward Kamau BRATHWAITE (né en 1930, à Bridgetown, à la Barbade), est considéré comme une des plus grandes voix actuelles de la poésie des Caraïbes. Il a longtemps vécu à la Jamaïque et a également exercé comme professeur de littérature comparée à New York. Il vit désormais à nouveau à la Barbade.
RêvHaïti est une des sept « rêvhistoires » ("DreamStories") publiée en 1994, il s’agit ici de la version de « Savacou North », beaucoup plus riche typographiquement.
C'est de la poésie en prose, mais d’un type inclassable, qui combine des références politiques (le régime des Duvaliers…), historiques (la lutte pour la libération des esclaves…) etc… dans la poésie même, et qui raconte ici les malheurs des Boat People qui quittaient Haïti pour fuir la dictature de ce pays, et qui n’étaient ni aidés, ni recueillis par les gardes côtes US…
C’est une poésie où prédomine l’imagination empathique, les poèmes semblent partir à la dérive du langage créole, aux jeux sonores, aux perceptions, aux allusions plus ou moins cachées, aux descriptions... C’est aussi une langue marquée par des inflexions propres au métissage des caraïbes, mais en même temps intensément personnelle.
Le plus étonnant dans les écrits de BRATHWAITE est... la typographie de ses textes, on a l’impression que la poésie se « frotte » au graphisme, à l'ordinateur, en peu de mots je dirais que les effets typographiques «donnent à voir» ce qu’il faut entendre !...
Le poéte joue sur les polices, leurs tailles et leurs aspects… La typographie reflète les inflexions de la voix et guide le lecteur à travers les écrits du poète. Ainsi p. ex. les lettres allongées un peu confuses suggèrent à la fois la décomposition des corps dans l’eau, et l’incertitude quant à l’identité du locuteur qui change tour à tour...
Que dire de plus ? J’ai eu parfois du mal à comprendre et à tout appréhender, notamment sans doute du fait de mon manque de références culturelles, pour ce qui est somme toute, une poésie typiquement des caraïbes… Mais, je suppose que le "cheminement" et le fait de devoir se forcer pour entrer et comprendre le texte, sont sans doute de la volonté de l’auteur.
C’est une poésie dérangeante, ne fut-ce que par les « artifices » typographiques et linguistiques (il n’y a p. ex. pas de points, pas de virgules…), utilisés par le poète, mais une poésie qui une fois acceptée, digérée, se révèle être une poésie de tout premier ordre.
Un extrait (la typographie est celle de l’auteur ) :
(…) Il se passait tant de choses par-dessus par
dessous tout autour de nous avec les passeurs
qui criaient et se battaient pour les survivants
même si nous étions tous bien morts et
ballonnés
entre temps
& certains s’étaient même mis à flotter sur leurs
déboires submergés jusqu’à leur visage tuméfié
et c’était alors je suppose que nous pouvions
en graine voir que personne ne jetait pas de
ligne de vie ni bougre de bouée ni rien de tout
cela vers nous et de toute façon je n’avais pas
le temps de penser gratter rien de ceci
même si j’avais pu – dans tous ces cris & chutes &
bousculades
effondrements & hauteurs (…)
Kamau BRATHWAITE a été le lauréat du Neustadt Inetrnational Prize en 1994.
Son œuvre a également été récompensée par le prix « Casa de las Americas »
et le « Charity Randall Citation for Performance and Written Poetry » en 1999.
Les éditions
-
Revhaiti
de Brathwaite, Kamau Pagnoulle, Christine (Traducteur)
Mémoire d'encrier
ISBN : 9782897120573 ; 29,00 € ; 20/02/2013 ; 66 p. ; Broché
Les livres liés
Pas de série ou de livres liés. Enregistrez-vous pour créer ou modifier une série
Forums: RêvHaïti
Il n'y a pas encore de discussion autour de "RêvHaïti".