Nos mères de Antoine Wauters

Nos mères de Antoine Wauters

Catégorie(s) : Littérature => Francophone

Critiqué par Deashelle, le 9 mai 2014 (Tervuren, Inscrite le 22 décembre 2009, 15 ans)
La note : 7 étoiles
Moyenne des notes : 7 étoiles (basée sur 2 avis)
Cote pondérée : 5 étoiles (41 284ème position).
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Les mots fertiles

Quelque part au Proche Orient (au Liban?), un jeune garçon, Jean Charbel, va quitter sa mère biologique pour débuter une vie nouvelle dans une province paisible d’un pays d’accueil européen où l’attend une nouvelle mère, une nouvelle langue et les joies de l’école. Malgré cette rupture et ce traumatisme, l’enfant sera enfin loin de la guerre civile qui a tué son père.

En attendant le départ, sa mère folle de douleur veut le protéger et de la guerre ambiante et de la dévastation dans laquelle elle se trouve. Elle l’enferme dans un grenier où le jeune garçon laisse libre cours à son imagination. « Ne voulant pas nous voir souffrir, ni nous montrer qu'elles souffrent, elles nous retirent ni plus ni moins du monde, nos mères, elles nous coupent l'horizon. »
Jean survit grâce à son imaginaire, s’invente même une fratrie, qui lui offre l’abri de la pluralité.

Au deuxième acte, chez sa nouvelle mère adoptive, le petit Jean découvre une nouvelle guerre : la guerre intérieure d’une mère profondément blessée qui voudrait désespérément l’aimer mais ne sait comment. Tous deux s’épaulent dans un travail de résilience jusqu’à ce que renaissent à nouveau les mots complices qui traduisent l’amour et mettent le sourire aux lèvres de « nos mères ».

« Et nous les aimons, et nous les haïssons, et elles nous aiment, non, elles nous adorent. Elles nous protègent des blessures du monde. C'est tout. » C’est « tout » dire et « tout » est dit dans le mot « tout ».

L’écriture très tonique et poétique de la première partie montre combien la langue est en soi une sorte de berceau qui permet l’envol loin des fracas de guerres et des contingences délétères. A noter que dans son pays d’accueil c’est le silence qui semble chargé de violence et l’écriture change, musicalement. L’enfant doit dépasser et surmonter de nouvelles tristes réalités.

Au troisième acte, il est enfin sauvé par la vie inventée de l’écrivain. Ecriture et imaginaire sont la réalité de l'homme. Une écriture souvent imitative des chocs de la vie, très chargée de l’émotion auditive des mots qui naissent. Enchaînement de rythmes à la recherche de l’harmonie de l’être. Ce jeune auteur a fait fort et percutant. Une suggestion : relire le livre en sens inverse! Pourquoi pas?

P.S. Le lauréat du PRIX PREMIÈRE 2014 est ANTOINE WAUTERS pour son premier roman NOS MÈRES, publié aux éditions Verdier. Son livre a été choisi par un jury d’auditeurs de LA PREMIÈRE parmi une sélection de dix premiers romans. Ce prix, doté de 5.000 E, lui a été remis ce jeudi 20 février 2014 à 12h30, dans le cadre de la FOIRE DU LIVRE DE BRUXELLES à Tour & Taxis. Le PRIX PREMIÈRE récompense un premier roman francophone.

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un enfant victime de la guerre

7 étoiles

Critique de Ddh (Mouscron, Inscrit le 16 octobre 2005, 82 ans) - 7 avril 2015

Nos mères au pluriel ? Oui dans le cas présent. Jean a deux mères, la sienne et celle d’adoption qu’il reconnaîtra.
Il y a les bruits des détonations de kalachnikovs sur les plages du Liban. Il y a des milices armées et le peuple innocent qui se fait massacrer. Il y a la peur qui hante les familles qui se cachent. Il y a les rêves de Jean de la vie d’avant et les réalités tragiques d’aujourd’hui. Il y a son père tué et sa mère qui l’envoie en Europe, chez nous. Jean est déraciné, il tressaute à chaque explosion dans la carrière voisine ; cela rappelle les éclats d’obus là-bas au bord de la Méditerranée où coulait aussi le miel.
L’écriture est pour le moins originale. C’est dans un milieu hostile que pérégrine Jean : son père, sa mère, la guerre. Tout est sombre. Très peu d’embellies : Luc et Alice ; un rêve et une réalité impossible à vivre dans ce contexte angoissant.
Il manque de la douceur, on cogne sur des murs…

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