Rencontres fortuites de Mavis Gallant

Rencontres fortuites de Mavis Gallant
(A fairly good time)

Catégorie(s) : Littérature => Anglophone

Critiqué par Dirlandaise, le 5 avril 2014 (Québec, Inscrite le 28 août 2004, 68 ans)
La note : 9 étoiles
Visites : 3 305 

La vie débridée de Shirley

Mavis Gallant n’a écrit que deux romans. Le reste de sa production est composé de nouvelles excellentes d’ailleurs. L’action se situe en 1963. Le personnage principal de ce roman est une jeune femme nord-américaine récemment mariée à un journaliste français. Le couple habite à Paris où Shirley est considérée comme une étrangère bizarre affublée d’une façon de vivre étrange et parfois choquante. En effet, Shirley relève de l’adolescente attardée : elle est fantasque, immorale, nulle en rangement et ne sait à peu près rien faire de ses dix doigts. Mais elle aime son mari malgré leurs différences culturelles et elle souhaite le garder. Philippe est souvent en voyage alors Shirley passe son temps en balades parisiennes où elle fait certaines rencontres fortuites qui changeront le cours de son existence. Un jour, une amie de Shirley dans le pétrin réclame son aide et son soutien moral afin de se remettre d’une épreuve. La jeune femme n’écoutant que son cœur accourt chez celle-ci et ne rentre pas de la nuit ce qui met son mariage en sérieux péril.

Les critiques comparent Mavis Gallant à Henry James, Edith Wharton et Mordecaï Richter. J’ajouterais aussi Colette pour le style d’écriture et le sujet. Le roman est savoureux et je l’ai lu avec bonheur et ravissement malgré quelques passages qui m’ont laissée perplexe et certains dialogues frôlant l’absurde. J’ai eu parfois du mal à comprendre le comportement de Shirley face à certaines situations et aussi celui de la famille de Claudie. Tout cela me semblait assez débridé et décousu. Par contre, j’ai bien aimé les références littéraires, les passages épistoliers, les remontées dans le temps et surtout, la dernière lettre de Shirley adressée à Philippe sans espoir d’être lue par cet homme auquel elle tient mais qui ne veut plus rien savoir d’elle.

C’est un roman racontant une séparation entre deux êtres dont les différences sociales et culturelles sont trop évidentes pour être compatibles : une jeune femme bohème et irresponsable, un jeune homme sérieux couvé par sa mère et sa soeur.

Le roman très européen adopte souvent un style théâtral qui me plaît bien. Ces chassés-croisés, cette vie débridée que mène Shirley, ce tourbillon d’événements, cette incertitude face à l’avenir et surtout ces rencontres fortuites composent un arrière-plan sur lequel évolue la jeune femme sans toujours voir venir les embûches et les chausse-trappes qui émaillent son parcours parisien et menacent de la dépouiller de tout ce qu’elle croit posséder.

« Il ne ressemblait pas à sa mère. Il me ressemblait. En Italie, pendant notre voyage de noces, nous passions pour frère et sœur. Par notre taille, nos lunettes, nos regards de myopes, notre assurance, nos vêtements négligés et confortables, nous semblions apparentés et en quelque sorte inclassables. Seul un Nord-Américain aurait pu deviner de quel genre de familles nous étions issus, quel était notre niveau d’éducation, et d’où provenait l’argent de notre voyage. La plupart du temps, nous n’étions que des visages anonymes au regard un peu vide, comme les touristes des réclames publicitaires. Les touristes sont toujours propres, et les Européens sont toujours des paysans, des chefs cuisiniers, ou des facteurs. Ils sourient, ils regardent les étrangers avec gentillesse. Ce n’est pas vrai. Dans la vraie vie, Pete et moi étions sales, et les autres propres, et personne ne nous souriait. »

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