La Bataille de l'Empereur- Kaiserschlacht mars-novembre 1918 de Mario Graneri-Clave
Catégorie(s) : Sciences humaines et exactes => Histoire , Sciences humaines et exactes => Essais
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Guillaume II se caille sec
"La Bataille de l'Empereur- Kaiserschlacht mars-novembre 1918" est un ouvrage qui occupe l’espace de temps qui court de fin mars à début novembre 1918 comme son titre l’annonce et c’est le moment où l’Allemagne passe de la perspective de la victoire (elle n’a plus de front à soutenir à l’Est) à celui de la défaite certaine.
Les faiblesses de l’ouvrage sont d’abord de ne présenter que deux cartes (l’une du front occidental en mars 1918 et l’autre de la guerre dans le sud des Balkans avant l’offensive d’automne 1918 (elle a l’avantage de montrer que l’Albanie, officiellement neutre, est occupée par l’armée autrichienne pour les six septièmes de son territoire et que le sud du pays est aux mains des Alliés). Le livre "Atlas de la première guerre mondiale : La chute des Empires européens" (présenté ici) se révèle un complément possible face à ce manque. Le second point regrettable est d’avoir omis de proposer une table des matières.
Toutefois les chapitres, qui suivent un ordre chronologique, sont remarquablement construits car ils portent à chaque fois une idée forte. Ce sont dans l’ordre : la percée, l’exploitation (à partir de la page 31), Deutchland über alles (à partir de la page 55), le Tigre (à partir de la page 71), le Chemin des dames (à partir de la page 87), les princes (à partir de la page 113), le tournant (à partir de la page 131), il faut tirer le bilan (à partir de la page 159), crépuscules sanglants (à partir de la page 177), le bouddha (à partir de la page 205), la dernière bataille (à partir de la page 235).
L’ouvrage rappelle que Clemenceau était le dernier vivant des 107 députés qui avaient refusé de ratifier le traité qui cédait l’Alsace-Lorraine au Reich. On mentionne le rôle de Blaise Diagne dans la levée de tirailleurs sénégalais, malgré les réticences des administrateurs de l’Afrique occidentale française. Le rôle d’Aristide Briand (précédent président du conseil) pour éclaircir les buts de guerre de la France sont rappelés (page 84) mais on peut regretter des phrases caricaturales à son propos (page 82) comme au sujet des socialistes SFIO en bloc. Le livre, que prépare Christophe Bellon sur Aristide Briand, s’avèrera précieux tant l’action de ce dernier durant la Grande Guerre mérite d’être éclaircie.
Mario Granneri-Clavé explique bien pourquoi l’effet de surprise de l’attaque sur le Chemin des dames en mai 1918 fut total et ceci d’autant plus que deux déserteurs allemands avaient fourni des renseignements si précis à ce propos que leur témoignage avait paru le fruit d’une tentative de manipulation (page 91). L’ouvrage a le mérite de mettre ponctuellement en exergue le Prince Rupprecht (cousin germain de la reine des Belges et fils de Louis III, donc héritier de la couronne de Bavière) tant pour avoir pointé très rapidement les limites possibles de l’offensive de mai-juin 1918 (page 104) que pour avoir tenté en conséquence une approche de paix en juin 1918 (pages 115-128).
Guillaume Apollinaire (dont plusieurs lettres du front de 1915 sont présentées et commentées dans "Écrire en temps de guerre" présenté ici) fait d’ailleurs allusion au prince Luitpold ou Léopold de Bavière (un des grands-pères du Prince Rupprecht) dans son recueil de poèmes "Alcools" :
« Luitpold, le vieux prince régent
Tuteur de deux royautés folles
Sanglote-t-il en y songeant
Quand vacillent les lucioles
Mouches dorées de la Saint-Jean ».
Les raisons de l’effondrement de l’armée bulgare, à la grande surprise de Georges Clemenceau (qui parlait des poilus du front de l’Orient en termes de "jardiniers de Salonique") mais pas à celle d’Aristide Briand à l’initiative de ce front-là, sont bien développées (pages 188-194) ; Ludendorff s’était d’ailleurs refusé à renvoyer des troupes allemandes sur le front sud des Balkans. Le rôle capital de Wilson dans le futur règlement de la paix est bien approché et il est bon de rappeler que les socialistes français, dont Marcel Cachin proclamait alors qu’il indiquait la voie à suivre et qu’Édouard Herriot vantait une démocratie américaine « qui croit à la vertu créatrice du bien ».
En résumé, voilà un bon ouvrage pour un lectorat qui, sans vouloir s’embarrasser d’un appareil de notes, désire comprendre les ressorts essentiels de la fin du conflit.
Les éditions
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La Bataille de l'Empereur
de Graneri-Clave, Mario
les Éd. du Bord du Lot
ISBN : 9782352081524 ; 18,00 € ; 10/12/2013 ; 256 p. ; Broché
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