Frères de David Clerson
Catégorie(s) : Littérature => Francophone
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Sa Majesté des humains
Frères de David Clerson rappelle Sa majesté des mouches de William Golding que l’on recommande aux élèves alors que la violence, la cruauté et la sensualité en font un roman pour des adultes avertis qui s’intéressent au caractère sombre et fragile de l’humanité. Les deux auteurs se penchent avec finesse sur ce sujet à travers le parcours régressif d’enfants livrés à eux-mêmes. Ça ne répond aucunement à l’esprit des enfants subjugués à leur âge par le merveilleux. Il y a de ces œuvres que l’on pourrait croire enfantines comme Le Petit Prince de Saint-Exupéry alors qu’elles s’adressent à ceux dont les préoccupations sont plutôt d’ordre philosophique ou social.
David Clerson, un trentenaire natif de Sherbrooke, décrit avec brio le cheminement des enfants vers le monde adulte. Et les sentiers à parcourir pour y parvenir sont loin d’être molletonnés. Bruno Bettelheim en a rendu compte dans Psychanalyse des contes de fées. La méchanceté et la cruauté sont souvent au rendez-vous dans les contes que l’on propose aux enfants. Les deux frères du roman de David Clerson n’échappent pas aux haruspices malveillants des dieux. Déjà à la naissance, l’aîné s’est fait couper un bras par sa mère pour donner naissance à son frère cadet, comme Ève est née de la côte d’Adam. L’auteur est allumé par notre culture, qui s’enracine dans des vérités qui, depuis l’Antiquité, ont été édictées à travers des mythes. Son roman prend ainsi une envergure presque prométhéenne, voire oedipienne.
Pour se réaliser, les deux enfants doivent se débarrasser de « leur chien de père », un être ayant pris la nature des êtres marins. Ils affrètent un bateau pour aller à sa rencontre afin de mettre un terme à sa vie. Sa mort vue comme une naissance. Mais leur course maritime est remplie d’aléas. Naviguer en pleine mer, c’est aussi apprendre ce que l’on est. Et la mer ne fait pas de partie à quiconque. Il faut compter sur autrui pour s’en sortir.
L’aîné est finalement accueilli sur une île, où il fera vraiment l’apprentissage des hommes. Qui sont-ils ? L’humanité voisine la bestialité. Mordre et tuer sont des modes auxquels les deux ordres recourent. Déguisé en chien, l’aîné découvre curieusement son humanité en fraternisant avec les canins, qui l’amènent à prospecter sa sexualité latente. L’homme n’est ni ange ni démon. C’est un être effrayant, mais qui peut aussi s’intéresser à la vie comme le démontre l’intérêt des deux frères pour les os qu’ils collectionnent afin de créer des êtres nouveaux.
Bref, ce roman est un manuel d’apprentissage de la vie, dépourvu, heureusement, de la morale qui conclut les contes et les fables. Cette œuvre protéiforme peut décourager certains à la lire à cause de son ton apparenté à celui des livres pour enfants. Mais il reste que cette dissection de notre humanité est menée de main de maître. Et l’écriture, dépouillée de tout gongorisme, coule comme par magie.
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Critique de NICWIL (, Inscrite le 25 octobre 2016, 53 ans) - 25 janvier 2017
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