Mario de Carlo Cassola

Mario de Carlo Cassola
(Monte Mario)

Catégorie(s) : Littérature => Européenne non-francophone

Critiqué par Jlc, le 4 septembre 2013 (Inscrit le 6 décembre 2004, 80 ans)
La note : 6 étoiles
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Huis clos amoureux

« Mario » pourrait être qualifié de huis clos, tant toute l’action ou presque se passe dans un petit appartement occupé par un militaire fort satisfait de lui-même et de la promotion qui va en faire un capitaine. Il a 35 ans, c’est un homme rangé qui ne dédaigne pas les aventures passagères, qui a ses habitudes, très attaché à une mère pleine de bon sens. D’origine modeste, il a « toujours accepté le milieu qui l’entourait, sans jamais rechercher autre chose que l’estime de ses proches et de ses égaux. » Apprécié de ses chefs, Mario attend « le jour où les forces de l’ordre devraient remplir le vide créé par une classe politique lâche et corrompue ». Nous sommes en Italie au début des années 70 et on sait ce qu’il advint quelques années plus tard.

Tout ce conformisme va être balayé par l’arrivée d’Elena. Elle est belle, elle est jeune (26 ans), issue d’un milieu aisé elle a été la fiancée de Mario avant de le quitter sans qu’on sache trop pourquoi, la peur peut-être de devoir se conformer à l’image qu’une épouse de militaire doit donner. A la suite d’une dispute avec son père, fasciste depuis que les titistes l’ont exproprié, elle vient se réfugier chez Mario parce qu’il est le plus gentil qu’elle connaisse, « une sorte de frère ».

Le roman nous raconte cette nouvelle rencontre entre deux amoureux que tout, en surface, oppose. Elle est fantasque, il est militaire ; elle est entêtée, il négocie ; elle est extravagante, il est ennuyeux ; elle est fuyante comme une anguille, il est patient comme un pêcheur ; il se montre sentimental, elle traduit coucherie ; elle est une vraie girouette, il est le vent ; elle est hors du système, il en fait partie. Elle est sérieuse et fantasque, il la respecte parce qu’elle lui fait confiance mais il l’épie pendant son sommeil, à l’affût d’un moment d’abandon.

Elena a peur d’être trahie. Pour elle, « se donner est un cadeau, pas un devoir conjugal » et, surtout, elle veut rester libre de sa vie. La fin est inéluctable avec, comme très souvent chez Cassola , un espoir aussi fugace que ténu qui peut-être…

Carlo Cassola est un grand romancier toscan d’après guerre même si ce récit se passe à Rome dans les années 70. Malgré ce changement de lieu et de temps avec ses ouvrages précédents, on retrouve ici aussi l’art de raconter, la simplicité de l’écriture que le poète Philippe Jaccottet a parfaitement traduite, cette façon de faire le portrait de ses héroïnes. Cassola aime les femmes fières, courageuses, indépendantes, farouches, avec toujours la crainte d’être déçues par ceux qui disent les aimer et confondent désir et envie. Ces femmes ont l’arrogance de leur beauté, qu’elle soit physique ou morale alors que les hommes qu’elles rencontrent sont souvent sans noblesse . La faiblesse de ce roman tient à l’unité d’action, l’auteur ayant du mal à renouveler les échanges entre les deux faux amants.

Bien sûr ce roman a vieilli tant l’Italie a changé. L’exigence de la virginité et l’obligation du mariage n’ont plus la même dimension sociale qu’il y a 40 ans. Mais ce caractère un peu désuet n’est pas sans charme.

Pour ceux qui ne connaissent pas encore Cassola, « Mario » n’est pas son meilleur livre et on peut lui préférer « Fausto et Anna », « Un cœur aride » ou « La ragazza » dont Sissi a dit ici tout le bien qu’elle en pensait (et que je partage).

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