La vie selon Gus Orviston de David James Duncan
( The river why)
Catégorie(s) : Littérature => Anglophone
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La ligne de lumière
Gus Orviston est un pêcheur, genre prodige de la canne à attraper tout ce qui nage, du moins ce qui ressemble à un poisson. Depuis sa tendre enfance il passe tout son temps à pêcher sans que rien ne puisse entraver sa volonté de capturer ceux qui hantent les rivières. Et il a de qui tenir. Un père écrivain et fanatique de la pêche à la mouche, toute autre technique étant à ses yeux une hérésie, et une mère rude, à la poigne de fer, et moins à cheval que son mari sur les techniques halieutiques et sur l'art d'élever ses enfants. Toute l'existence de la famille Orviston est tournée vers la pêche et toutes ses variantes possibles, notamment Gus qui néglige tout le reste que ce soit l'éducation scolaire, l'existence des autres ou bien en rejetant l'idée qu'il y ait une vie après la pêche.
Son frère cadet, Bill Bob, lui se voit affliger d'une totale inaptitude à pratiquer l'art de la pêche et même se montre réfractaire à tout ce qui à un rapport de près ou de loin avec l'eau, élément vital des poissons et de sa famille. Les rapports entre la mère et le père de Gus s'avèrent être assez chaotiques. Leurs conceptions de la pêche étant irrémédiablement inconciliables, et ceci depuis leur première rencontre, ce qui débouche sur des situations drôles et parfois tendues dans cette famille typiquement Américaine et pourtant si originale.
Gus finit par en avoir ras le bol de cette famille pécheresse si oppressante, il décide de la quitter, non sans avoir éructé ses récriminations à la face de ses chers parents. Il part se réfugier dans un chalet au bord de la rivière Tamanawis au fin fond de la forêt, où il mettra en application son "Programme Idéal", qui tient en trois mots....... pêche, pêche et pêche.
Tout ira pour le mieux, jusqu'au jour ou ses rencontres successives avec Abe le cadavre flottant et Titus le philosophe et porte-parole de son chien Descartes, vont bouleverser sa vie. Dans le même temps sa découverte du ? gravé par l'eau sur la berge de la Tamanawis va l'amener à jeter un regard différent sur son existence et à poser les premiers jalons d'une quête ou plutôt d'une reconquête de sa destinée. Dès lors s'engage un périple dans les méandres de son âme et de la Tamanawis à la recherche de son église et de ses racines spirituelles, tout comme l'Indien Tillamook qui autrefois partait s'isoler durant plusieurs jours jusqu'à ce que son Esprit Gardien vienne le visiter pour lui montrer la voie à suivre dans son existence terrestre.
Au hasard de ses pérégrinations il rencontre Eddy perchée tout en haut d'un arbre, reliée à la Tamanawis par la soie de sa canne. Après quelques paroles confuses et troublé par sa nudité illuminée par les reflets de l'eau, il la voit disparaître plongeant dans la rivière à la poursuite du poisson ferré par l'hameçon, tandis que lui-même se retrouve pris au piège de l'hameçon appelé Amour. Ses rêves et ses pensées seront désormais hantés par cette apparition aussi féerique qu'insaisissable.
A la fois cocasse et plein d'humour, le récit prend la forme d'une fable philosophique et écologique, le tout savamment distillé dans cet œuvre dont l'écriture limpide nous fait penser parfois à John Irving pour les situations cocasses et à Jim Harrison pour son côté truculent, mais à n'en pas douter le style est à 200% D.J. Duncan (dont j'ai hâte de pouvoir découvrir un nouveau titre, lorsqu'il sera traduit). Son écriture est sensible et subtile, elle sait nous faire cheminer vers les contrées qui recèlent toutes les nuances de nos vies, sans que l'on puisse toujours les appréhender avec justesse tant il est difficile de rester lucide…. parfois. Récit magnifique sur le parcours initiatique du jeune Gus qui devra faire un long chemin pour découvrir la source où réside les mystères de la vie, et ainsi accéder à une existence d'épanouissement parcouru par les frissons du bonheur.
C'est le Chinook, pris au piège de la ligne, qui le conduira vers cet endroit, seulement éclairé par la lune, où règne la magie que tout homme désire connaître, cette source de vie qui alimente les âmes et les rivières où s'écoulent les rêves. La ligne de lumière viendra traverser son cœur et le reliera à son Esprit Gardien, cet Esprit fait d'Amour.
Moi qui suis réfractaire à toute notion de croyances issues d'une confession ou d'une autre, j'ai été touché par cette quête de l'absolu qui se trouve défini par la capacité de chacun de pouvoir construire son royaume de plénitude sans pour autant qu'il soit nécessaire de se rattacher à une déité obsolète et surtout sans fondement. Je pense qu'il est possible d'avoir une foi en réponse aux multiples questions qu'inexorablement assaillent ceux qui cherchent à donner un sens à "tout ça". Quant à moi je crois en la nature, aux arbres, aux oiseaux, aux rivières, au vent, au soleil, à la pluie, aux larmes et aux rires, aux enfants…. à la vie. Mon église se trouve nulle part et partout en même temps.
Juste un petit regret (vraiment tout petit), c'est la fin qui paraît un peu bâclée par rapport à l'ensemble du récit au par ailleurs très bien construit et captivant.
Les éditions
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La vie selon Gus Orviston [Texte imprimé] par David James Duncan trad. de l'américain par Michel Lederer
de Duncan, David James Lederer, Michel (Traducteur)
10-18 / Domaine étranger
ISBN : 9782264030764 ; 7,45 € ; 28/09/2001 ; 441 p. ; Poche
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Délire à donf
Critique de Xerinata (Amiens, Inscrite le 5 avril 2006, 67 ans) - 8 mai 2007
Puis j'ai abandonné à la page 200 (la moitié en gros).
Sincèrement, je ne sais pas ce que fume l'auteur, mais ce doit être du bon.
Exemple :
"Tu vois, Gussy, dit-il, les Anges Jardins viennent de la terre, comme les carottes. C'est leur monde et c'est pour ça qu'on les appelle les Anges Jardins. Quand ils sortent pour la première fois de la terre pour rentrer dans le Monde Jardin, ils sont très vieux, ou alors blessés, malades, handicapés ou encore tristes, mais les autres Anges les aident et, petit à petit, ils se rétablissent, et ensuite ils sont très heureux d'être dans ce monde parce que partout c'est si joli et si calme, comme le plus beau jardin de la terre, sauf que c'est partout comme ça et que tout le monde est très gentil, sans rien qui fasse peur, sans rien qui fasse du mal comme dans notre monde à nous.
Et ça continue pendant des pages et des pages. Personnellement, je n'accroche pas.
Le bonheur au bout de l'hameçon
Critique de Barda (, Inscrit le 7 juillet 2005, 54 ans) - 20 mars 2006
À bout, Gus quitte le domicile familial, se trouve une cabane perdue au fond des bois près de la Tamanawis (nom fictif donné à la vallée et à la rivière...) et s'installe, bien décidé à appliquer son "programme idéal" : pêche, pêche, encore et toujours pêche... Las, Gus se fatigue assez vite de ce programme et l'art halieutique ne lui apparaît bientôt plus que sous la forme d'un travail à la chaîne. La solitude lui pèse et il doit faire face à une crise existentielle, laquelle se voit renforcée par la découverte d'un cadavre - un pêcheur - dans lequel on a peine à ne pas reconnaître un double possible de Gus, le chapitre prenant l'allure d'une scène de roman gothique et Gus une incarnation iconoclaste du Charron sur le Styx. Gus fait l'expérience du vide et du néant.
L'éducation parentale reçue en héritage, son goût exclusif pour la pêche, tout cela a rendu Gus comme inapte à affronter la vie. L'ermitage lui paraissant hors de portée, il consent donc à se joindre à la communauté et entreprendre la recherche d'un sens à donner à son existence. Des personnages divers vont bien vite apparaître dans la vie de Gus et certains prendre une importance capitale dans sa vie, un vieil indien duquel Gus retirera matière à méditer sur les relations entre la nature et l'homme et l'ingratitude de ce dernier envers la première, Bill Bob, le petit frère ayant échappé miraculeusement à l'emprise des parents Orviston, Titus le philosophe, étrange porte-voix de son chien Descartes, Eddy, la pêcheuse dont s'éprend Gus, autant de personnages qui le guident vers la réponse à donner à cette rivière Tamanawis en forme de ? qui coule sous ses yeux chaque jour. Bien que les formes données à cette réponse m'ont paru, je dois l'avouer, un peu confuses, cela ne nuit absolument pas au plaisir de la lecture, l'auteur convoquant avec drôlerie et avec un goût prononcé pour le surréalisme et la poésie, le taoïsme, le bouddhisme, l'animisme, le christianisme, et ce avec force analogies, le style utilisé se confondant même avec l'objet du récit. Nous arrivons à la fin de l'histoire, un saumon prophète se fait le guide de Gus dans une scène magnifique au terme de laquelle l'homme osera enfin le grand pas vers le consentement, le désintéressement, un grand oui à la vie et au bonheur incarné par l'amour d'Eddy à son encontre, l'amour cette ligne de lumière si fragile reliant les hommes à leur esprit gardien, quel que soit le nom donné à celui-ci.
Un très bon livre donc, auquel seules quelques longueurs m'empêchent d'adhérer pleinement, bémol bien futile au vu de la construction, de la constante invention et de la cocasserie de ce livre hors norme.
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